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Le stress et la capacité de résoudre des problèmes dans les établissements correctionnels : nouvelles recherches sur les employés des services correctionnels canadiens

On a souvent dit des employés travaillant dans les établissements qu'ils constituaient un groupe professionnel exposé à des niveaux de stress particulièrement élevés. Les chercheurs s'intéressent maintenant à l'étude des situations qui engendrent le stress dans les établissements correctionnels ainsi qu'à la capacité de résoudre des problèmes qui augmentent le rendement au travail et le degré de satisfaction professionnelle. Les progrès de la recherche en ce domaine peuvent avoir des répercussions importantes sur le recrutement des agents correctionnels, sur la conception des programmes de formation susceptibles d'aider les agents à gérer les situations stressantes ainsi que sur l'adoption de pratiques de gestion efficaces permettant de restreindre le nombre d'événements stressants.

Gareth Hughes, psychologue au Bureau des libérations conditionnelles du district de Kingston, terminait récemment une importante étude sur le sujet; ses travaux nous permettent de mieux comprendre comment les employés travaillant en milieu carcéral définissent le stress rattaché à leur travail et ce qu'ils font pour le combattre. Gareth Hughes a interviewé 109 employés correctionnels de première ligne dans un établissement à sécurité moyenne et dans deux établissements à sécurité maximale situés à Kingston (Ontario). Parmi les employés qui se sont portés volontaires pour cette étude, on retrouvait des agents correctionnels, des professeurs et des moniteurs d'ateliers ainsi que des travailleurs affectés aux tâches générales et de service. Dans le cadre de leurs fonctions, tous les participants à cette étude étaient appelés à travailler directement avec des délinquants. Parmi les éléments évalués par Hughes dans son étude, mentionnons la nature du stress au travail, les modèles de gestion du stress, les traits de personnalité, la satisfaction personnelle et professionnelle, le rendement au travail et l'état de santé. Les renseignements sur l'état de santé ont été recueillis auprès des médecins de famille tan dis que les données sur le rende ment au travail provenaient des dossiers personnels des participants.

La moyenne d'âge des employés correctionnels faisant partie du groupe de Hughes était de 41 ans; ces travailleurs étaient à l'emploi du Service correctionnel du Canada depuis douze ans en moyenne. Le groupe présentait un degré élevé de stabilité familiale 84% des participants étaient mariés ou vivaient avec un conjoint de fait et 82% d'entre eux étaient propriétaires. Le niveau d'études du groupe était également élevé 94% des participants comptaient dix ans ou plus de scolarité, 34% avaient terminé un cours collégial et 6% détenaient un diplôme universitaire. Quarante-six pour cent des travail leurs interrogés étaient fumeurs et la plupart d'entre eux faisaient preuve de modération dans leur consommation d'alcool.

Deux questions ont été posées à chacun des participants : Quels sont les facteurs de stress dans votre milieu de travail? Lequel de ces facteurs est le plus stressant?

Soixante-quinze pour cent des participants ont reconnu que leur milieu de travail était stressant, mais seulement 2% d'entre eux ont avoué que c'était le milieu qui leur causait le plus de stress. De même, environ la moitié des participants ont déclaré que le travail par quarts et les horaires des postes étaient stressants, mais seulement 3% d'entre eux considéraient que ces problèmes étaient une source majeure de stress.

Les situations jugées les plus stressantes par les travailleurs correctionnels étaient surtout les problèmes interpersonnels. Comme l'indique le tableau ci-après, les problèmes avec la gestion (p. ex. comportements illogiques et manque de support) étaient considérés comme la source de stress la plus importante par la majorité des employés. Seulement 39% des employés considéraient les gestionnaires comme étant stressants, mais 27% d'entre eux ont laissé entendre que les gestionnaires constituaient la source de stress la plus importante dans leur milieu de travail. Il est intéressant de noter que seulement 40% des employés considéraient les relations avec les gestionnaires comme une source de stress mais que la majorité d'entre eux considéraient que ces relations étaient le facteur de stress le plus important dans leur milieu de travail. Les relations avec les détenus et les collègues de travail venaient en deuxième lieu. Plusieurs travailleurs correctionnels ont également mentionné l'ennui comme principal facteur de stress.



Figure 1
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Pour ce qui est des rapports entre le stress et les autres éléments de vie, près d'un tiers des participants ont déclaré que le stress en milieu de travail leur causait de sérieux problèmes familiaux.

La méthode la plus fréquemment utilisée pour s'accommoder des situations stressantes au travail consiste à prendre ses distances. D'après Gareth Hughes, le fait de prendre ses distances suppose qu'on rationalise la situation ou qu'on accepte l'idée qu'on ne peut rien y changer. La deuxième technique le plus souvent utilisée pour affronter les facteurs de stress au travail consiste à « résoudre méthodiquement le problème », ce qui suppose une aptitude à l'objectivité permettant de résoudre le problème par étapes. Plusieurs travailleurs recherchent également des moyens pratiques ou un appui psychologique pouvant les aider à faire face aux situations stressantes. En se fondant sur leurs réponses aux différentes questions, Gareth Hughes a également classé les travailleurs en fonction de leur capacité à résoudre des problèmes. En général, les participants démontraient une bonne capacité de gestion du stress et 14% d'entre eux ont obtenu le maximum de points pour leur capacité à résoudre des problèmes. Les travailleurs correctionnels qui utilisent des méthodes rationnelles et qui sollicitent l'appui des autres ont plus de facilité à résoudre leurs problèmes. Ils réagissent rarement de manière spontanée aux situations et s'efforcent habituellement de comprendre le problème. Les plus débrouillards ont moins tendance à blâmer les autres pour le stress vécu au travail. Les moins débrouillards sont plus perturbés par les problèmes vécus en milieu de travail. Ces derniers consacrent également moins de temps aux rencontres sociales en dehors des heures de travail et ont moins de loisirs.

On a également établi des liens entre l'aptitude à gérer efficacement le stress en milieu de travail et certains traits de personnalité. Les travailleurs les plus aptes à résoudre les problèmes sont ceux qui ont un esprit très positif et règlent leur vie de manière logique; leurs réponses à un test indiquent qu'ils ont peu de croyances irrationnelles et ils ont déclaré être en bonne santé. Rien d'étonnant à ce que les plus débrouillards soient très satisfaits de leur emploi et obtiennent des taux de rendement au travail passablement plus élevés que les moins débrouillards.

Il faut sans doute poursuivre la recherche dans le domaine du stress et de la capacité de résoudre les problèmes chez les employés des services correctionnels canadiens, mais déjà les résultats de Gareth Hughes ont d'importantes répercussions sur le travail des gestionnaires. Le fait que les gestionnaires, les détenus et les collègues de travail aient été perçus comme étant la principale source de stress par un nombre important d'employés permet de penser qu'il faudrait se fixer des objectifs bien précis de formation afin d'aider ces employés à résoudre les difficultés interpersonnelles qu'ils vivent en milieu de travail. Près de la moitié des travailleurs correctionnels interrogés ont avoué que leur travail était ennuyant et 12% d'entre eux ont déclaré que l'ennui était le facteur le plus stressant de leur travail. Les gestionnaires devraient peut-être aider les travailleurs du secteur correctionnel à combattre l'ennui et explorer de nouvelles méthodes permettant d'améliorer les interactions entre employés de façon à maintenir leur enthousiasme pour un travail qui constitue un défi quotidien.