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Stratégie pour les services correctionnels communautaires

À l'approche du prochain siècle

Trois thèmes reviennent constamment dans les articles de ce numéro de Forum -- le passé, le présent et l'avenir. Il y a aussi trois raisons pour lesquelles le passé, le présent et l'avenir préoccupent les praticiens des services correctionnels communautaires.

La première raison est que l'année 1999 marquera le 100e anniversaire de la mise en liberté sous condition au Canada, qui a commencé avec le système du Ticket of Leave. Au cours des années, il y a eu beaucoup de progrès et de réalisations dans ce domaine, et de nombreux pionniers et héros se sont efforcés de donner aux Canadiens et aux Canadiennes un système humain et sûr pour réintégrer les délinquants dans la collectivité.

La deuxième raison est que nous célébrerons, dans environ 500 jours, l'arrivée du nouveau millénaire. En tant qu'individus et en tant que praticiens des services correctionnels communautaires, nous commençons déjà à nous interroger sur ce que l'avenir nous réserve. Si nous réussissons, comme nous l'a demandé le ministre, à établir un équilibre entre les populations de délinquants en prison et dans la collectivité en favorisant la réinsertion sociale d'un plus grand nombre de délinquants et en veillant à ce que ceux qui sont mis en liberté dans la collectivité y restent, nous aurons une raison bien spéciale de fêter durant l'année 2000 et les années suivantes.

Pour ce qui est de la troisième raison -- une prise de conscience du présent --, M. Angus Reid du Groupe Angus Reid en a parlé durant son exposé à la réunion de la gestion supérieure qui a eu lieu en mai 1998. En décrivant, d'une façon qui suscite la réflexion, les forces qui influencent actuellement la société canadienne, il a mis en évidence les répercussions de ces facteurs sur l'ensemble des services correctionnels. En plus d'en appeler à notre conscience, il a donné quelques conseils qui nous aideront à tirer profit des leçons apprises au cours des cent dernières années et nous prépareront à maintenir l'équilibre au sein des populations de délinquants au cours des cent prochaines années.

Période de paradoxes

M. Reid a laissé entendre qu'un grand nombre des règles que les Canadiens et les Canadiennes utilisaient dans leur vie ont été chamboulées au cours des dix dernières années. Comme d'autres, il décrit ce phénomène comme une période de paradoxes où des choses qui semblent contradictoires sont vraies en même temps. Ainsi, la population n'est pas du tout convaincue que la science et la technologie peuvent nous sauver, mais, en même temps, elle s'attend à ce que nous prévoyions les comportements délinquants avec une plus grande précision qu'auparavant et à ce que nous les prévenions de façon plus efficace. À la lecture des articles dans ce numéro de Forum, il apparaît évident que nous comprenons beaucoup mieux qu'avant la nature de la criminalité et les interventions qui peuvent aider les délinquants à devenir des citoyens respectueux des lois.

M. Reid a mentionné que le vieillissement de la population explique en partie un autre paradoxe qu'on rencontre dans le domaine correctionnel : malgré une diminution du taux de criminalité, on constate une augmentation générale de la peur du crime. Les personnes âgées se sentent plus vulnérables, ont un seuil de tolérance moins grand face au risque et craignent davantage les blessures corporelles; il peut donc arriver qu'elles réagissent de façon disproportionnée au taux de criminalité réel. Comme beaucoup d'autres, M. Reid a précisé qu'il y aura beaucoup plus de personnes âgées dans les années qui viennent.

Enfin, M. Reid a décrit les forces du marché qui déterminent ce que lui et d'autres, comme Nuala Beck, présentent comme la «nouvelle économie». Des facteurs comme le libre-échange, le passage d'une croissance commandée par les consommateurs à une croissance commandée par le commerce, et la volonté du milieu des affaires de faire davantage et mieux avec moins de ressources, peuvent sembler bien étrangers aux bureaux de libération conditionnelle et aux maisons de transition. Cependant, les conséquences qui en découlent, comme le changement des perspectives d'emploi, la croissance de l'esprit d'entreprise, l'augmentation des attentes à l'égard du secteur des services, la nécessité d'être autonome, l'augmentation de l'habilitation et la hausse de la concurrence, exercent une influence sur les services correctionnels communautaires.

Pourrons-nous atteindre nos objectifs?

Nous devons trouver le moyen de tirer profit des changements qui découlent de notre passé et qui façonnent notre avenir, et de les intégrer à la stratégie du Service correctionnel du Canada pour les services correctionnels communautaires.

Si la mondialisation rend le monde si grand que les personnes essaient de s'identifier à des groupes plus petits comme des quartiers ou des groupes sociaux, nous devons nous efforcer de faire partie de ces quartiers et de ces groupes. Nous pourrions par exemple augmenter la présence de nos employés dans la collectivité en les encourageant à avoir des contacts plus nombreux avec les citoyens. Nous pourrions aussi installer nos activités au même endroit que celles de partenaires. Enfin, nous pourrions encourager les organismes communautaires à participer à la réinsertion sociale des délinquants.

La mondialisation a amené le monde à notre porte. Des visiteurs du monde entier peuvent vouloir en apprendre davantage sur nos stratégies les plus efficaces; d'autres peuvent nous faire partager les solutions qu'ils ont apportées aux problèmes qui nous laissent perplexes. M. Reid a souligné que les Canadiens et les Canadiennes ont de plus en plus tendance à trouver qu'ils ont davantage de choses en commun avec les États qui se trouvent sous le 49e parallèle qu'avec les provinces adjacentes ou avec celles qui sont situées à l'autre extrémité du pays. On ne sait pas encore si ce phénomène les amènera à adopter le modèle des lois américaines sur les services communautaires correctionnels, mais il semble évident que nous devons comprendre les choix qui s'offrent à nous, adopter les meilleures solutions et partager avec les autres les meilleures choses que nous avons à offrir.

Nos partenaires internationaux s'attendent à ce que nous jouions un rôle prépondérant dans la prestation de services correctionnels excellents. Notre stratégie sur les services correctionnels communautaires doit intégrer les leçons tirées des solutions que les autres pays ont apportées à leurs problèmes. En outre, nous devons faire connaître notre stratégie et nos techniques dans des publications comme Forum et les nombreuses revues consacrées aux services correctionnels communautaires. Les employés du Service doivent participer à des conférences, être membres d'associations professionnelles de services correctionnels communautaires et faire preuve d'initiative dans leurs activités pour favoriser le dialogue sur les questions correctionnelles.

La technologie, un outil précieux parmi d'autres

Le réseau Internet, qui nous permet de rejoindre des partenaires éloignés et d'augmenter nos connaissances, est une des façons dont la technologie est devenue partie intégrante de notre vie et de notre travail quotidiens. Tout en nous efforçant de trouver des moyens de préparer les délinquants à bien fonctionner dans l'«économie de l'information», nous devons aussi déterminer comment utiliser cette technologie de la façon la plus efficace.

Une des façons est d'étendre l'accès à notre Système de gestion des détenus à nos maisons de transition et aux bureaux de surveillance que nous engageons sous contrat. Il nous faut aussi établir un équilibre entre le temps que les employés passent devant l'ordinateur et celui qu'ils passent avec les clients, tout comme nous devons veiller à ce que nos systèmes utilisent la technologie la plus efficace qui soit. Cependant, un marché innovateur et compétitif offre maintenant des techniques peu coûteuses pour la surveillance des délinquants, comme les dispositifs de vérification vocale et les kiosques complètement équipés (avec éthylomètre) où les délinquants en liberté peuvent se présenter. Nous devons évaluer constamment les nouvelles techniques et leurs répercussions sur la société de façon à pouvoir faire des suggestions pertinentes à la population qui nous demande de faire davantage et mieux pour moins cher. Si nous ne sommes pas en mesure de conseiller la population, d'autres l'aideront à faire des choix pour nous.

Si nous croyons que les interventions humaines constituent notre meilleur outil, nous devons également accepter l'obligation de rendre compte qui s'y rattache. Nous devons être capables de prouver à la population, aux victimes et à d'autres que leurs impôts sont utilisés à des fins profitables. Dans le choix des méthodes que nous utilisons pour la surveillance des délinquants, il nous faut tenir compte des résultats de nos recherches et montrer que nous avons essayé tout ce qui était possible.

Une grande partie de notre stratégie a consisté à soutenir un grand nombre d'organismes et de groupes de la collectivité, non seulement parmi nos partenaires traditionnels, mais aussi parmi ceux qui peuvent apporter de nouvelles perspectives à la question de la réinsertion sociale. Il nous faut énoncer les principes qui guident cette relation, puis agir selon ces principes.

Optimisation des ressources

Notre stratégie sur les services correctionnels communautaires doit être comprise par le citoyen moyen; celui-ci doit estimer qu'il en a pour son argent. Elle doit aussi respecter la diversité de la société canadienne. Si les Canadiens et les Canadiennes ne s'identifient pas à notre stratégie, alors ils considéreront toujours les délinquants comme des marginaux et que ce n'est pas à la population de trouver des solutions au problème.

La participation des citoyens aux activités correctionnelles communautaires est un élément essentiel. Le mot communautaire ne reporte pas seulement à l'endroit où les services correctionnels sont offerts, mais aussi les intervenants qui doivent participer à la prestation des services.

Mais comment faire participer une population qui n'est pas nécessairement d'accord avec ce que nous essayons de faire? On trouve une réponse intéressante à cette question dans The Community of the Future : [traduction] « Nous devons écouter davantage la population, organiser des rencontres où chacun exprime ses idées et ses préoccupations et écoute celles des autres. Il n'est pas nécessaire que tous interprètent un événement ou une question de la même façon, mais tous doivent cependant considérer que la question est importante2.» Rien ne garantit que la participation mène toujours au succès, mais il est certain que la non-participation conduit inévitablement à l'échec à long terme.

Conclusion

Durant la réunion de la gestion supérieure où le M. Reid a pris la parole, la sous-commissaire principale a parlé du passé, du présent et de l'avenir de nos activités. Elle a souligné que si des gens nous demandent si nous arriverons à atteindre nos objectifs, nous pouvons leur suggérer de regarder en arrière. À cette époque, pensions-nous vraiment que nous pourrions en arriver où nous en sommes aujourd'hui?

Dans le même ordre d'idées, M. Reid nous a invités à ne pas tenter de recréer «le bon vieux temps», qui est maintenant révolu. Nous devons plutôt regarder ce que nous avons accompli et en tirer les meilleures leçons. Nous devons examiner l'information et les données dont nous disposons aujourd'hui et voir ce qui est efficace et ce qui ne l'est pas. Enfin, nous devons envisager l'avenir, nous associer à des partenaires qui veulent aller dans la même direction et trouver des moyens d'atteindre notre but.

Au printemps de cette année, la Division de la réinsertion sociale, Opérations communautaires, a tenu des séances de discussion dans chaque région, avec des conseillers autochtones et des délinquants. Certaines des idées exprimées ici proviennent de ces séances. On peut obtenir sur demande un document sur ces consultations. À l'automne, deux études importantes seront réalisées : une sur le rôle des centres correctionnels communautaires et une sur la mesure de la charge de travail dans les services correctionnels communautaires. On combinera les résultats de ces études à d'autres documents pour créer une stratégie globale pour les services correctionnels communautaires qui sera soumise à la gestion supérieure.


1. 340, avenue Laurier Ouest, Ottawa (Ontario) K1A 0P9

2. WHEATLEY, Margaret J. et KELLNER-ROGERS, Myron, «The Paradox and Promise of Community», The Community of the Future, Frances Hessselbein, éditeur, San Francisco, CA, Jossey-Bass Publishers, 1997, p. 18.