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Classement des délinquantes en vue dune intervention efficace : Évaluation du risque et des besoins à partir de renseignements propres à chaque cas
Thèse de doctorat, Carleton University1
Kelley Blanchette2
Directeur de thèse : Laurence Motiuk
Membres du comité : Peter Fried, Adelle Forth, Bob Hoge et Connie Kristiansen
Les éléments produits à lappui de létude sont concluants : de nombreux types dintervention en milieu correctionnel permettent de réduire le nombre de cas de récidive criminelle. Le traitement correctionnel «moyen» entraîne une réduction de 10 % de la récidive au sein des groupes visés, mais certaines études ont révélé que les interventions axées sur les principes de lévaluation du risque et des besoins produisent des résultats nettement meilleurs en moyenne (30 % de réduction des cas de récidive3). En bref, en vertu du principe du risque, il faut que le niveau de traitement soit équivalent au niveau de risque que présente le délinquant, et il faut offrir des services plus intensifs aux délinquants à plus haut risque, tandis que les délinquants à plus faible risque sen sortent aussi bien, sinon mieux, avec des interventions limitées, voire sans aucune intervention. En vertu du principe des besoins, le traitement correctionnel devrait viser les éléments dynamiques de la personnalité du délinquant qui sont liés à son comportement criminel (cest-à-dire à des facteurs criminogènes). Ces principes de classement des délinquants basés sur les cas ont été établis dans le cadre des études relatives aux délinquants de sexe masculin, qui sappuient sur des données empiriques. Dans cet article, nous nous intéressons à lapplicabilité aux délinquantes des principes du risque et des besoins.
Classement basé sur les cas
Même si, depuis quelque temps, on accorde plus dattention aux problèmes liés aux délinquantes, certains affirment que lon connaît encore mal les composantes des programmes [destinés aux femmes] qui visent des résultats positifs comme lindépendance économique et sociale, la réunion des familles et une intervention réduite du système de justice pénale4. Cest peut-être parce quune majorité écrasante de délinquants sont des hommes, que les services offerts aux détenues sont depuis longtemps inspirés de modèles dintervention auprès des hommes. Cest pourquoi les précédentes études consacrées à la façon dont les programmes en place répondent aux besoins des femmes ont révélé que le traitement accordé à celles-ci était soit inapproprié, soit inexistant.
Les études relatives aux interventions correctionnelles adaptées aux femmes sont essentielles, parce que le droit canadien impose la mise en place de programmes distincts pour les délinquantes. Par exemple, larticle 77 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC, 1992) stipule que le Service correctionnel du Canada doit, en ce qui concerne les délinquantes, leur offrir des programmes adaptés à leurs besoins spécifiques et consulter régulièrement, à cet égard, les organisations féminines compétentes ainsi que toute personne ou groupe ayant la compétence et lexpérience appropriées.
Il sagit dune tâche difficile pour les administrateurs des services correctionnels, étant donné que les différents spécialistes ne sentendent pas sur le type de personne que lon peut qualifier de «personne (...) ayant la compétence et lexpérience appropriées.» Dowden et Andrews5 ont récemment présenté des données empiri-ques à lappui des principes du risque et des besoins, dans une méta-analyse des traitements réservés aux délinquantes. Malgré cela, certaines spécialistes féministes,6 pensent que le classement basé sur le risque nest pas adapté aux femmes et quil faut offrir à celles-ci un traitement différent de celui quon réserve aux hommes. En bref, les auteurs de cet ouvrage indiquent à quel point il est important de contextualiser la participation des femmes à des activités criminelles, en examinant leur «cheminement» criminel. À cette occasion, ils affirment quon peut évaluer les besoins de chaque femme et y répondre dans le cadre dune approche holistique. À lappui de leur théorie, ils présentent des arguments philosophiques très convaincants, ainsi que certaines données de nature anecdotique, précisant quils ne disposent pas de données empiriques pertinentes.
Que les délinquantes fassent lobjet dun classement en fonction des principes du risque et des besoins ou dune évaluation selon leur «cheminement» criminel, tout le monde sentend sur un point : lévaluation est la pierre angulaire de toute intervention correctionnelle efficace. Le classement des délinquants vise plusieurs objectifs, qui vont du placement en établissement à la planification du traitement, en passant par la prise de décisions relatives à la libération ou les normes de surveillance. Il est nécessaire deffectuer une évaluation individuelle pour établir le risque (et gérer en toute sécurité les populations de délinquants) et adapter les besoins des délinquantes aux ressources affectées au traitement.
Le principe du risque
Le principe du risque comporte deux volets. Première-ment, on suppose que les comportements criminels peuvent être anticipés; deuxièmement, pour limiter les cas de récidive, il faudrait adapter le niveau du traitement au niveau de risque que présente le délinquant. Plus précisément, il faudrait offrir de nombreux services aux délinquants à risque élevé, tandis que les délinquants à plus faible risque sen sortent mieux avec des interventions limitées ou sans aucune intervention. Comme on la mentionné précédemment, certaines études ont présenté de nombreuses données empiriques à lappui du principe du risque.
Malgré les éléments que fournissent les diverses études, certaines spécialistes féministes contestent lapplicabilité aux femmes du principe du risque, et invoquent pour ce faire plusieurs raisons. La critique la plus élémentaire est la suivante : le niveau de risque est établi selon le sexe et selon la race, et il ne doit donc pas être appliqué aux groupes minoritaires. Cet argument sappuie sur le fait que certains facteurs permettant de prévoir les risques associés aux hommes ne sappliquent pas aux femmes. Les tenants de cette théorie ajoutent que le recours à des mesures de classement «sexuellement neutres» conduit à un surclassement des femmes. Cest pourquoi Bloom et Covington7 affirment ceci : dans les environnements où les comportements sexistes sont fréquents, lorsquon qualifie quelque chose de «sexuellement neutre», on fait référence au sexe masculin. Même si lon sait que, par rapport aux hommes, les femmes présentent moins de risques sur les plans de la délinquance criminelle, de la récidive et de la récidive avec violence et pour la sécurité des établissements, aucune donnée empirique nappuie la théorie du surclassement. En fait, diverses études portant sur de nombreuses méthodes dévaluation du risque ont révélé que ces outils classaient régulièrement les femmes à des niveaux inférieurs à ceux auxquels on classe les hommes.
Une deuxième théorie relative à lapplicabilité du principe du risque aux femmes porte sur le concept du risque dynamique. On peut établir une équivalence entre les facteurs de risque dynamique et les besoins criminogènes. Ces facteurs constituent un sous-ensemble du niveau de risque associé aux délinquants; il sagit des éléments dynamiques du profil du délinquant qui, lorsquon les modifie, sont associés aux changements touchant les probabilités de récidive. Des facteurs de risque statiques et dynamiques sont associés aux cas de récidive, mais cest sur les facteurs dynamiques quil faut baser le traitement. Ainsi, lobjet premier de lévaluation des facteurs dynamiques est la planification du traitement. Cependant, même si des facteurs statiques comme lâge, la race et les antécédents criminels permettent très souvent danticiper une récidive, des facteurs dynamiques comme le comportement antisocial, la fréquentation de criminels et la toxicomanie sont encore plus révélateurs.
Ceux qui critiquent le principe du risque pensent que la documentation portant sur ce sujet et les responsables sur le terrain confondent les besoins et le risque8, mais ils ajoutent quen raison de cette confusion, on tend à redéfinir les besoins des délinquantes comme des facteurs de risque. Une des conséquences de cette approche est la suivante : on noffre pas aux femmes les programmes dont elles ont besoin en raison de la (prétendue) priorité accordée à la sécurité et à lévaluation du risque. Même sils critiquent le classement des femmes basé sur le risque, certains auteurs pensent quil faut tenir compte dun certain nombre de facteurs de risque interdépendants lorsquon détermine le traitement destiné aux jeunes filles : facteurs familiaux, problèmes scolaires, fréquentation dautres délinquants et toxicomanie9. Il est intéressant de noter que les facteurs de risque définis par Bloom et Covington comptent parmi les facteurs criminogènes le plus souvent cités, qui devraient être les premiers à faire lobjet de traitements10. Ainsi, les psychologues et les spécialistes féministes sentendent à propos des besoins auxquels il faut répondre dans le cadre du traitement correctionnel. Même si certains critiques affirment que lon ne répond pas aux besoins des femmes, les délinquantes du Canada ont accès à de très nombreux programmes, et le fait que des facteurs dynamiques soient liés aux cas de récidive incite encore plus les organismes correctionnels à offrir des services visant à réduire ces facteurs.
Autre argument contre le principe du risque : les études dont les résultats appuient ce principe utilisent presque toutes des échantillons de délinquants de sexe masculin. Les examens circonstanciés et les méta-analyses appuyant le principe du risque ont soit exclu les échantillons de délinquantes, soit omis de distinguer les données par sexe. On observe néanmoins une exception : la récente méta-analyse de Dowden et Andrews11. Pour examiner la validité des principes du risque et des besoins appliqués aux délinquantes, les auteurs se sont appuyés sur des études relatives aux traitements qui satisfaisaient aux critères suivants :
Les résultats de ces études ont révélé que les programmes de traitement visant des échantillons de délinquantes à risque plus élevé étaient plus efficaces. Plus précisément, les données (45 ampleurs de leffet) ont généré une réduction de 19 % des cas de récidive au sein des groupes à risque élevé, et les traitements nont eu aucun effet sur les groupes à faible risque. En outre, lorsque les auteurs ont limité la portée de leur étude pour y inclure exclusivement les études sur le traitement réservé aux femmes (24 ampleurs de leffet), cet effet était encore plus prononcé, et lon observait une réduction de 24 % des cas de récidive pour le groupe à risque élevé. Les auteurs ont conclu que ces données étayaient lapplication du principe du risque pour assurer lefficacité de lintervention auprès des délinquantes.
Létude de Dowden et Andrews fournit des éléments préliminaires à propos de lapplicabilité du principe du risque aux femmes, mais il faut noter quelle se heurte à certaines limites importantes. Premièrement, par rapport aux études sur les délinquants, le nombre détudes sur les délinquantes est relativement peu élevé. Les analyses effectuées par Dowden et Andrews portent sur seize études visant exclusivement des femmes. À mesure que les études de base continueront à saccumuler, les méta-analyses prospectives permettront de constituer des échantillons plus nombreux, ce qui fera augmenter la fiabilité des résultats.
La deuxième limite porte sur une affirmation de base liée au principe du risque, selon laquelle il faut adapter le niveau de service offert au niveau de risque que présente le(la) délinquant(e). La méta-analyse de Dowden et Andrews nétudie pas cette question en profondeur, puisquelle ne fait pas référence au «dosage», ou à lintensité du traitement. En fait, les auteurs décrivent la réduction du taux de récidive au sein des groupes bénéficiant dun traitement (par rapport à ceux qui nen bénéficient pas). En outre, il est fort possible que les groupes «non traités» soient des groupes qui présentaient moins de risques au départ.
Enfin, on peut douter de la méthode des auteurs consistant à séparer les études entre groupes à risque élevé et groupes à faible risque. Plus précisément, on peut affirmer que les personnes qui ont actuellement ou ont déjà eu affaire à la justice pénale (groupes à risque élevé) sont nettement plus susceptibles que les personnes à faible risque dafficher une réduction de la récidive, parce quils présentent des taux dinfraction plus élevés au départ. La différence entre les taux de base observée lors des études préliminaires est symptomatique de toutes les méta-analyses; elle est toutefois particulièrement flagrante dans létude de Dowden et Andrews, parce quil semble que les groupes à faible risque quils ont examinés étaient en fait composés de non-délinquants.
Il est néanmoins important de noter que le classement des délinquantes dans des groupes à risque «élevé» et «faible» va demeurer plus problématique que dans le cas des délinquants. Ce problème tient essentiellement au premier postulat sur lequel sappuie le principe du risque, suivant lequel le risque peut être anticipé. Même si lon sait que les variables relatives aux antécédents criminels permettent de prévoir une récidive chez les femmes, lintégration de tels éléments statiques aux paradigmes de prévisions mathématiques sest révélée moins fiable. En particulier, la plupart des modèles de risque associés aux délinquants, établis à partir déchantillons composés dhommes, offrent des prévisions de moins bonne qualité lorsquon les applique aux femmes.
Le principe des besoins
Le principe des besoins fait la distinction entre les facteurs criminogènes et les facteurs non criminogènes. Les facteurs criminogènes constituent un sous-ensemble du niveau de risque associé à un délinquant; il sagit déléments dynamiques de la personnalité du délinquant qui, lorsquon les modifie, modifient à leur tour les probabilités de récidive. Les facteurs non criminogènes peuvent eux aussi être modifiés, mais ces changements ne se traduisent généralement pas par des probabilités de récidive différentes. Sur le fond, en vertu du principe du risque, pour limiter les cas de récidive, il faudrait que les services de traitement tiennent compte des facteurs criminogènes.
On a défini des domaines dintervention prometteurs : comportement et sentiments antisociaux, fréquentation dautres personnes antisociales, lacunes sur les plans de la maîtrise de soi, de lauto-contrôle et/ou des compétences en matière de résolution de problèmes, problèmes de toxicomanie, niveau détudes et/ou de formation professionnelle insuffisant, absence de liens familiaux ou relations familiales dysfonctionnelles, et mauvaise utilisation des temps libres. Un grand nombre détudes ont fait de ces éléments dynamiques des facteurs criminogènes. Cependant, certains documents relatifs aux services correctionnels contestent lapplica-bilité aux femmes du principe des besoins. Là encore, le scepticisme des analystes vient du fait que les études appuyant ce principe utilisent des échantillons composés de délinquants de sexe masculin.
En ce qui concerne les délinquantes, ce nest pas le principe des besoins en tant que tel qui a fait lobjet de critiques. En fait, le débat porte sur la définition des facteurs qualifiés de criminogènes pour ce groupe particulier. Certaines données empiriques permettent de croire que les facteurs criminogènes associés aux délinquants sont également adaptés aux délinquantes, mais que leur degré dimportance et la nature de lassociation peuvent différer. Selon plusieurs auteurs, des facteurs criminogènes additionnels sappliquent aux délinquantes, même si, en réalité, il faudrait effectuer davantage détudes pour confirmer le lien entre ces variables et la récidive. Les facteurs dynamiques le plus souvent cités comme des facteurs criminogènes propres aux femmes relèvent du domaine «personnel/affectif» : faible estime de soi, victimisation durant lenfance et à lâge adulte et automutilation/tentatives de suicide.
Emploi/éducation
Il est désormais établi quen moyenne, les délinquants ont un niveau de scolarité inférieur et moins de compétences monnayables que le reste de la population. Près de la moitié des détenus sous responsabilité fédérale (46 % des hommes et 48 % des femmes) nont pas terminé leur 10e année; ce nest le cas que de 19 % de lensemble de la population canadienne. Les problèmes demploi sont également fréquents parmi les populations de détenus, et plus prononcés chez les femmes que chez les hommes; environ 80 % des femmes purgeant une peine dans un établissement fédéral étaient sans emploi au moment de leur admission. En comparaison, seulement 10 % des adultes (hommes et femmes) de lensemble de la population canadienne sont sans emploi. Les programmes de traitement axés sur léducation, le perfectionnement et lemploi sont donc jugés essentiels à la réinsertion sociale.
Seules quelques études ont examiné le lien entre les besoins en matière demploi et déducation et le taux de récidive chez les délinquantes. Les résultats de ces études ne sont pas uniformes, puisquils établissent une corrélation entre les variables demploi/déducation et la récidive de lordre de -0,22 à +0,43. Ils ne permettent donc pas de déterminer si ce domaine constitue vraiment un facteur criminogène pour les femmes; de toute évidence, il faut effectuer davantage détudes.
Famille
Pour toute personne, la base de la vie sociale, cest la famille. Il nest donc pas surprenant que plusieurs documents aient établi que les délinquants sont beaucoup plus nombreux à avoir un passé marqué par des problèmes familiaux. On évalue quenviron le tiers des détenues ont de très graves problèmes dans ce domaine. Certains analystes pensent que les traitements destinés aux délinquantes devraient en priorité sorienter vers les problèmes familiaux. Certaines études empiriques ont commencé à appuyer cette théorie, même si dautres la contestent. Les études établissant un lien entre les problèmes conjugaux/familiaux et la récidive chez les délinquantes ont établi des corrélations allant de -0,10 à +0,51.
Fréquentations
Les spécialistes associent fréquemment le facteur dynamique quest la fréquentation de personnes anti-sociales aux probabilités de récidive; ils recommandent donc quon en fasse une priorité des programmes de traitement. On estime quenviron 20 % des détenues ont dimportants besoins de traitement dans ce domaine.
Même si la majeure partie des résultats obtenus sont basés sur des échantillons composés de délinquants, les études relatives aux délinquantes ont produit des résultats uniformes : la fréquentation de personnes au comportement antisocial/favorable à la criminalité constitue un facteur criminogène important pour les femmes. Les études portant sur le lien entre la fréquentation de personnes antisociales et la récidive criminelle chez les femmes indiquent une corrélation comprise entre +0,11 et +0,45.
Attitude
On considère également que les traitements visant les comportements antisociaux comptent parmi les plus efficaces pour faire baisser le taux de récidive au sein des populations de délinquants. Heureusement, le nombre de délinquantes considérées comme ayant des besoins élevés sur le plan comportemental est relativement peu élevé. À léchelle fédérale, on observe une différence importante dans les comportements antisociaux entre les hommes et les femmes (39 % contre 7 %).
Même si lon reconnaît que le problème du comportement antisocial est lun des domaines de traitement les plus prometteurs au sein des populations carcérales, un nombre relativement limité détudes ont examiné le lien entre ce type de comportement et la récidive chez les délinquantes. Les études prévisionnelles indiquent une corrélation comprise entre +0,10 et +0,45.
Toxicomanie
Le lien entre la toxicomanie et les activités criminelles a été analysé dans de nombreux documents : près des deux tiers des délinquants connaissent des problèmes de toxicomanie à un niveau ou à un autre, et on considère quenviron 40 % des délinquantes ont de graves problèmes de toxicomanie. En outre, certaines études ont révélé un lien très fréquent entre la toxicomanie et diverses formes dactivités criminelles, parfois violentes. Cependant, là encore, la plupart de ces études portaient sur des échantillons composés de délinquants. La plupart des études prédictives examinant le lien entre la toxicomanie et la récidive chez les délinquantes ont démontré lexistence dun lien non négligeable entre diverses mesures de la toxicomanie et la récidive. Les corrélations sont comprises entre +0,07 et +0,44, la majorité des études indiquant un lien important entre la toxicomanie chez les femmes et la récidive.
Comportement dans la collectivité
Lévaluation du comportement dans la collectivité dun(e) délinquant(e) est faite dun ensemble déléments qui donnent une idée de sa vie à lextérieur de la prison. Parmi les outils de mesure de ladaptation à la collec-tivité, on compte les loisirs (passe-temps, activités communautaires), lhébergement, les finances, le soutien (p. ex., le recours aux services sociaux), le maintien (p. ex., lhygiène et la présentation) et la santé. On estime que moins de 15 % des détenues ont de graves problèmes dans ce domaine.
Aucune étude publiée na examiné le lien entre la catégorie globale «adaptation à la collectivité» et le taux de récidive chez les délinquantes. Par contre, certaines ont examiné des éléments particuliers relatifs à la récidive des délinquantes. Les études consacrées au lien entre ladaptation des femmes à la collectivité et la récidive révèlent que la valeur prédictive des sous-éléments varie considérablement; les corrélations avec de nouvelles infractions sont comprises entre -0,03 (problèmes de santé) et +0,41 (problèmes financiers).
Facteurs personnels/affectifs
Dans le cadre de lévaluation des délinquants, les facteurs personnels/affectifs représentent un ensemble de besoins qui couvrent toute une gamme de traits caractéristiques personnels susceptibles de justifier une intervention correctionnelle. Voici les facteurs le plus couramment évalués : concept de soi, problèmes cognitifs (impulsivité, difficulté à résoudre les problèmes, empathie), problèmes de comportement (hostilité, affirmation de soi, tendance névrotique), facultés mentales et santé mentale. Environ 38 % des délinquantes sous responsabilité fédérale affichent des besoins considérables dans ces domaines.
Tout comme cela est le cas pour les nombreuses variables comprises dans le cadre du «comportement dans la collectivité», les études révèlent que les facteurs «personnels/affectifs» peuvent eux aussi, à divers niveaux, annoncer une probable récidive chez les délin-quants, selon les besoins précis quon évalue. Comme pour les autres facteurs criminogènes, peu détudes ont examiné le degré dexactitude des prévisions associées aux variables «personnelles/affectives» en utilisant des échantillons composés de délinquantes. Les études pertinentes examinant les répercurssions des change-ments consécutifs à un traitement sont encore plus rares. Il est donc impossible, à lheure actuelle, de dire si les facteurs «personnels/affectifs» peuvent être considérés comme des facteurs criminogènes applicables aux délinquantes.
Conclusions
Il se peut que cette étude ait plus soulevé des questions quelle na apporté de solutions. En bref, les études existantes révèlent que lévaluation du risque et des besoins à partir de renseignements propres à chaque cas contribuent à offrir des services efficaces aux femmes. On observe malheureusement plusieurs lacunes. En ce qui concerne le classement en fonction du risque, les études ne sont pas vraiment parvenues à établir un outil de mesure de ce classement basé sur des données empiriques, susceptible de sappliquer à la fois aux délinquantes sous responsabilité fédérale et provinciale. Mais surtout, on na établi aucun outil de mesure adapté aux délinquantes.
Nous avons démontré dans cette étude lapplicabilité du principe du risque aux délinquantes. Même si certains éléments préliminaires indiquent que les facteurs criminogènes sont les mêmes pour les hommes que pour les femmes (p. ex., la toxicomanie, les comportements antisociaux ou la fréquentation de personnes antisociales), il est également fort probable quil existe dautres facteurs criminogènes propres aux femmes au niveau personnel/affectif (p. ex., la tendance à lautomutilation ou les problèmes destime de soi). Ainsi, pour évaluer efficacement la situation des délinquantes, il faut tenir compte déléments communs aux évaluations visant les hommes, ainsi que des différences avec ces évaluations, et des éléments qui viennent compléter le modèle masculin standard.
2. 340, avenue Laurier Ouest, Ottawa, Ontario, K1A 0P9.
3. ANDREWS, D. A., ZINGER, I., HOGE, R. D., BONTA, J., GENDREAU, P. et CULLEN, F. T. «Does correctional treatment work? A clinically relevant and psychologically informed meta-analysis», Criminology, vol. 28, 1990, p. 369-404.
4.  KOONS, B. A., BURROW, J. D., MORASH, M. et BYNUM, T. «Expert and offender perceptions of program elements linked to successful outcomes for incarcerated women», Crime and Delinquency, vol. 43, no 4, 1997, p. 512-532.
5. DOWDEN, C. et ANDREWS, D. A. «What works for female offenders: A meta-analytic review», Crime and Delinquency. Vol. 45, 1999, p. 438-452.
6. Voir le document de travail pour une liste complète de la bibliographie.
7. BLOOM B. et COVINGTON, S. (2000). «Gendered Justice: Programming for Women in Correctional Settings», communication présentée lors de lassemblée annuelle de lAmerican Society of Criminology, à
San Francisco, CA, 2000, p. 2.
8. BLOOM & COVINGTON, 2000, p. 5.
9. BLOOM & COVINGTON, 2000, p. 9.
10. ANDREWS & BONTA, 1998.
11. DOWDEN & ANDREWS, 1999.
12. DOWDEN & ANDREWS, 1999, p. 441.