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Utilisation des indicateurs de santé (physique, dentaire, nutritionnelle) obtenus à l’évaluation initiale des délinquants pour déterminer les besoins

Larry Motiuk1
Direction de la recherche, Service correctionnel du Canada

Le processus de l’évaluation initiale des délinquants (EID)2 du Service correctionnel du Canada produit un profil exhaustif et intégré de chaque délinquant sous responsabilité fédérale à son entrée dans le système correctionnel. Cette évaluation basée sur le cas sert principalement à l’élaboration d’un plan correctionnel individualisé destiné à remédier au comportement criminel, mais l’information peut également être utilisée pour estimer les besoins en soins de santé au moment de l’admission.

Nous présentons dans cet article des répartitions de trois indicateurs de santé (physique, dentaire et nutritionnelle) pour les admissions de délinquants (cas nouveaux) et la population carcérale (effectif) au cours d’une période de cinq ans, soit de 1997 à 2001. Nous incluons des réparti-tions additionnelles pour les délinquants en liberté sous condition et examinons les relations entre ces indicateurs et les résultats postlibératoires.

Répartition des indicateurs de santé à l’admission

Conscient des avantages que procurent pour la planification stratégique et opérationnelle des données propres à un cas provenant de systèmes d’évaluation automatisés, le Service a, dès 1994, conçu, élaboré et mis en œuvre un protocole uniformisé à l’échelle nationale d’évaluation des délinquants. Appelé l’EID, ce processus d’évalua-tion comporte deux composantes fondamentales : l’évaluation des facteurs statiques et l’identification et l’analyse des facteurs dynamiques.

Durant l’évaluation, on tient compte de tous les antécédents du délinquant, y compris de ses antécé-dents criminels et de ses caractéristiques personnelles. Bien qu’il soit impossible dans cet article de faire une description complète du processus de l’EID, trois indicateurs de santé retiennent notre attention. Ils sont tous trois inclus dans le Système de gestion des délinquants (SGD) automatisé du Service et peuvent être tirés de la composante principale «santé» du domaine du fonctionnement dans la collectivité de la section Identification et analyse des facteurs dynamiques de l’EID. Ces trois indicateurs sont «mauvaise santé physique», «mauvaise santé dentaire» et «mauvaise santé nutritionnelle».

Certes très utiles sur le plan clinique pour élaborer et gérer le plan correctionnel de chaque délin-quant, ces indicateurs, une fois compilés, permettent aussi au Service de produire des taux de prévalence, de suivre l’évolution des tendances et de signaler aux employés les cas justifiant des évaluations supplémentaires des soins de santé. Il y a lieu de noter que ces indicateurs correspondent à l’état de santé du délinquant au moment de l’évaluation initiale. Il faut un effort additionnel pour déterminer la nature exacte des problèmes de santé au delà de leur simple classement dans les catégories de la santé physique, dentaire ou nutritionnelle.

Admission des délinquants (cas nouveaux)

Un examen du SGD au 31 décembre 2001 a permis de déterminer que, depuis le 1er janvier 1997, le Service avait accueilli 21 457 délinquants auxquels il a fait subir une évaluation initiale. Selon les statistiques officielles sur les admissions, ce nombre correspond à 97,5 % des délinquants nouvellement admis dans un pénitencier fédéral. De tous les délinquants qui ont fait l’objet d’une évaluation initiale pouvant être incluse dans l’analyse, 5 703 (27 %) avaient des problèmes de santé physique à leur entrée dans le système correctionnel, tandis qu’environ 15 % avaient des problèmes de santé dentaire et 7 %, une mauvaise santé nutritionnelle.

Le Graphique 1 inclut trois lignes de tendance distinctes, correspondant aux trois indicateurs de santé choisis, sur une période de cinq années civiles. Chaque point le long d’une ligne repré-sente la proportion des délinquants, dans chaque cohorte d’admissions, qui présentaient des problè-mes de santé physique, dentaire ou nutritionnelle à l’admission.

La ligne de tendance de la «mauvaise santé physique» est généralement ascendante. Somme toute, cela signifie que la proportion de délin-quants nouvellement admis qui ont un indicateur de santé «mauvaise santé physique» a augmenté de 4,4 % depuis 1997.

Toutefois, l’examen a aussi permis de déterminer que les lignes de tendance de la «mauvaise santé dentaire» et de la «mauvaise santé nutritionnelle» sont descendantes. Autrement dit, les proportions de délinquants nouvellement admis qui présentent ces indicateurs ont diminué (de 10,6 % et 20,0 % respectivement).

Graphique 1
Indicateurs de santÈ et admission des dÈlinquants ( cas nouveaux)

Population carcérale ( effectif)

L’examen du SGD effectué à la fin de 2001 a permis de déterminer que 45 559 détenus avaient subi l’EID depuis le 1er janvier 1997. Dans l’en-semble, et d’après les statistiques officielles sur la population carcérale, ce nombre correspond à 70,7 % de la population carcérale sous responsabi-lité fédérale. Les indicateurs de l’EID manquants sont attribuables aux cas hérités du système antérieur (délinquants admis avant la mise en œuvre de l’EID et purgeant des peines de longue durée). Toutefois, pour la fin de l’année 2001, ce nombre correspond à 78,7 % de la population carcérale. Parmi tous les délinquants ayant fait l’objet d’une EID se prêtant à l’analyse, 12 045 (26 %) avaient des problèmes de santé physique à l’admission. Environ 15 % avaient des problèmes de santé dentaire et 7 %, des problèmes de nutrition au moment de leur admission. Ces proportions sont essentiellement un miroir des statistiques sur les admissions (cas nouveaux). Il ne semblerait pas se produire dans les pénitenciers fédéraux d’accumulation appréciable de délin-quants chez qui l’on a décelé à l’admission des problèmes de santé.

Dans ce cas également, le Graphique 2 inclut trois lignes de tendance distinctes correspondant aux différents indicateurs de santé sur une période de cinq ans. Toutefois, chaque point des lignes du Graphique 2 (un instantané) représente la proportion à la fin de l’année des détenus chez qui l’on a décelé des problèmes de santé physique, dentaire ou nutritionnelle à l’admission. Un examen de la ligne de tendance de la «mauvaise santé physique» révèle qu’elle n’a à peu près pas de pente. Par rapport à 1997, la proportion de la population carcérale présentant cet indicateur de santé n’a augmenté que légèrement, soit de 1,9 %.

Graphique 2
Indicateurs de santÈ et population carcÈrale ( effectif)

L’examen effectué à la fin de l’année montre aussi que les lignes de tendance pour les indicateurs «mauvaise santé dentaire» et «mauvaise santé nutritionnelle» ont été relativement plates. Bien que la proportion de délinquants présentant à l’admission l’indicateur «mauvaise santé dentaire» ait diminué de 2,0 % depuis 1997, la ligne de tendance est essentiellement plate.

Bref, les proportions de délinquants présentant ces indicateurs de santé à l’admission sont demeurées relativement stables au cours des cinq dernières années.

Besoins en matière de santé à la mise en liberté sous condition

Le Service surveille (réévalue) automatiquement selon les domaines les niveaux de risque/besoins des délinquants dans la collectivité. Par consé-quent, seuls les indicateurs de santé identifiés à l’admission sont disponibles.

Une recherche de développement antérieure3 sur l’indicateur de santé physique de l’EID a révélé qu’au sein d’une population en liberté sous condition étudiée, il n’y avait pas de relation significative entre cet indicateur et le résultat de la surveillance dans la collectivité. Une étude anté-rieure sur le risque et les besoins des délinquants dans la collectivité4 a également conclu à l’absence de relation entre la santé et le résultat de la liberté sous condition. On a toutefois réexaminé la relation entre la «mauvaise santé physique» à l’admission et le résultat en faisant une analyse sélective de la population de libérés sous condition ayant des indicateurs de santé de l’EID au 1er juillet 2001 et en effectuant un suivi pour déceler toute réincarcération sous responsabilité fédérale dans un délai d’un an.

Un examen au 1er juillet 2001 du SGD du Service a permis de constater que 6 486 délinquants en liberté sous condition avaient subi une EID, soit plus des deux tiers de la population des libérés sous condition. Dans ce cas également, les indica-teurs de l’EID manquants sont attribuables aux cas hérités du système antérieur (délinquants admis ou libérés avant la mise en œuvre de l’EID). Parmi les délinquants ayant fait l’objet d’une EID se prêtant à une analyse, 1 585 (24 %) avaient des problèmes de santé physique à l’admission. De ceux qui avaient un indicateur de «mauvaise santé physique» à l’admission, environ 22 % ont été réincarcérés sous responsabilité fédérale dans un délai d’un an. La proportion des délinquants n’ayant pas une «mauvaise santé physique» qui ont été réincarcérés dans le même délai était équivalente. De plus, ce résultat non significatif s’est manifesté aux quatre phases de la liberté sous condition (trois premiers mois, de trois à six mois, de six à douze mois et plus de douze mois). Autrement dit, il n’existe pas de relation significative entre la santé physique à l’admission et des résultats postlibératoires pertinents sur le plan correctionnel.

Résumé

La prestation de services de santé aux délinquants ayant des problèmes de santé physique, dentaire ou nutritionnelle pose des défis supplémentaires aux administrateurs et praticiens des services correctionnels. Les résultats obtenus pour certains indicateurs de santé dérivés de systèmes d’évalua-tion automatisés comme l’EID font certes prendre conscience de l’état de santé des délinquants à l’admission. Ils appuient aussi empiriquement la prestation de services répondant aux besoins de santé des populations carcérales. Cependant, nous ne sommes toujours pas capables de générer des données précises au sujet de la nature et de l’envergure de ces problèmes de santé. Il se peut que des enquêtes futures sur la santé répondent à ce besoin d’information.


1.  340, avenue Laurier Ouest, Ottawa (Ontario) K1A 0P9.

2.  MOTIUK, L. L. «Système de classification des programmes correctionnels : processus d’évaluation initiale des délinquants (EID)», Forum, Recherche sur l’actualité correctionnelle, vol. 9, no 1, 1997, p. 18-22.

3.  MOTIUK, L. L. et BROWN, S. La validité du processus de détermination et d’analyse des besoins des délinquants dans la collectivité, Rapport de recherche R-34, Ottawa, ON, Service correctionnel du Canada, 1993.

4.  MOTIUK, L. L. et PORPORINO, F. J. Essai pratique de l’échelle d’évaluation du risque et des besoins dans la collectivité : Une étude des libérés sous condition, Rapport de recherche R-6, Ottawa, ON, Service correctionnel du Canada, 1989.