Résultats escomptés
Les mesures disciplinaires sont appliquées de façon juste et pour les bons motifs. Les détenues comprennent pourquoi elles font l'objet d'une mesure disciplinaire et peuvent interjeter appel des sanctions qui leur sont imposées.
|
6.35 |
Le processus disciplinaire était conçu de manière à régler rapidement les méfaits, et au plus bas palier possible. Les sanctions étaient généralement légères, mais le traitement d'infractions particulières n'était pas homogène, notamment lorsqu'on avait recours au règlement informel. Le nombre d'accusations graves était à la hausse. On avait peu recours à la force, et les interventions étaient bien gérées, mais l'utilisation d'entraves comme matériel de contrainte était inappropriée. Le temps moyen passé en isolement n'était pas élevé, mais le recours général à cette pratique augmentait. Les activités pour les femmes placées en isolement étaient limitées, et la communication avec le personnel était très restreinte.
|
|
Procédures disciplinaire |
|
6.36 |
La rigueur du système disciplinaire à quatre paliers était progressive : avertissements, règlement informel, tribunal disciplinaire pour infractions mineures et tribunal disciplinaire pour infractions graves. Les avertissements n'entraînaient aucune sanction particulière et étaient consignés dans les dossiers individuels. Les membres du personnel, à tous les échelons, pouvaient préparer des rapports susceptibles de mener à un des quatre paliers des mesures disciplinaires. Si la femme était d'accord, on avait recours au règlement informel s'il y avait eu des avertissements antérieurs ou si un méfait était trop grave pour ne justifier qu'un avertissement. Le règlement informel était une mesure digne de mention visant à réagir rapidement face à un comportement inacceptable en tenant une discussion ouverte avec l'intervenant(e) de première ligne. Un examen interne du processus disciplinaire a été mené à terme en juin 2005. On a alors constaté que bon nombre de règlements informels n'avaient pas été consignés, d'où la difficulté d'assurer l'uniformité du traitement. D'après le petit échantillon que nous avons examiné, on aurait réagi à des comportements similaires en ayant recours à différentes procédures.
|
6.37 |
Les chefs d'équipe décidaient des cas devant être présentés au tribunal disciplinaire et à quel palier, mais il n'y avait aucune surveillance continue régulière en vue de donner suite aux accusations de manière uniforme et adéquate. Un examen récent des comités de discipline, notamment au chapitre de la qualité, a fourni des renseignements utiles et des points de décision.
|
6.38 |
Dans les audiences que nous avons examinées, la plupart du temps était consacré à débattre du bien-fondé et de la valeur concrète des sanctions éventuelles. Le paragraphe 43 de la Directive du commissaire 580 explique que, si une détenue plaide coupable, « la personne qui tient l'audience n'a qu'à passer en revue le résumé des éléments de preuve avant de rendre un verdict ». Il n'incombait pas aux présidents d'être convaincus que l'accusation était fondée. Ainsi, certaines femmes étaient vulnérables d'être reconnues coupables alors qu'une enquête légitime aurait pu permettre de constater qu'elles avaient un moyen de défense, notamment qu'on les avait forcées à prendre le blâme pour les actes d'autres personnes. Le processus disciplinaire s'attachait à empêcher la répétition, et les sanctions n'étaient pas lourdes.
|
6.39 |
Aucune femme n'avait eu recours à la réfutation afin que l'on examine le résultat de l'audience, mais certaines avaient discuté de l'audience avec le chef d'équipe responsable pour clarifier les répercussions.
|
|
Recours à la force |
|
6.40 |
La fréquence du recours à la force planifié et imprévu était faible : l'année précédente, on n'y avait eu recours qu'à neuf reprises, dont cinq impliquaient la même femme. Tous les incidents étaient bien consignés avec les renseignements détaillés fournis par tous les membres du personnel en cause, avec une séance d'information élaborée pour tout recours à la force planifié. Les séances d'information concernant le recours à la force prévu, le recours à la force lui-même, les évaluations médicales après les incidents et les fouilles à nu étaient tous enregistrés sur vidéo. Les recours à la force non planifiés étaient filmés sur vidéo le plus rapidement possible.
|
6.41 |
Dans tous les cas, le recours à la force était examiné à l'échelle locale et régionale dans le but d'en tirer des leçons. Il y avait une équipe d'extraction de cellule ainsi qu'une équipe pénitentiaire d'intervention en cas d'urgence régionale ayant une solide formation, et tous les membres étaient de sexe féminin. On n'avait jamais fait appel à l'équipe pénitentiaire d'intervention en cas d'urgence régionale.
|
6.42 |
Il n'y avait pas de cellules non meublées ou non équipées d'installations sanitaires d'une seule pièce. Dans une cellule de l'unité d'isolement, il y avait un lit fixe au centre de la pièce afin qu'on puisse avoir accès des deux côtés si on utilisait du matériel de contrainte souple, mais cela ne s'était jamais produit.
|
6.43 |
Les femmes ayant reçu la cote de sécurité maximale, au niveau de sécurité le plus élevé, quittaient l'unité de garde en milieu fermé seulement escortées de deux intervenant(e)s de première ligne et avec des menottes et des entraves. Les femmes au niveau de sécurité deux devaient être escortées d'un(e) intervenant(e) de première ligne et porter des menottes. L'utilisation de matériel de contrainte ne faisait l'objet d'aucune évaluation individuelle, et il était clairement inutile dans bon nombre de cas. De même, on utilisait couramment des entraves et des menottes lorsqu'on déplaçait des femmes en dehors de la prison, et elles les portaient durant tout le trajet. L'utilisation d'entraves semblait contraire à la règle 33 de l'Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus des Nations Unies, selon laquelle « les chaînes et les fers ne doivent pas non plus être utilisés en tant que moyens de contrainte ».
|
6.44 |
Durant l'inspection, deux femmes portant des entraves étaient conduites dans la prison par deux intervenant(e)s de première ligne, même si le protocole indiquait qu'il devait y avoir deux intervenant(e)s de première ligne pour chaque femme. C'était là une pratique dangereuse, car sans une personne à ses côtés, chaque femme risquait de trébucher au moment d'emprunter les escaliers ou de tenir la rampe. L'utilisation courante des entraves ne favorisait pas non plus la sécurité : nous avons été témoins d'une femme dont les menottes étaient si lâches que lorsqu'on l'a conduite à l'unité de garde en milieu fermé, elle les a fait glisser et les a remises aux membres du personnel lorsqu'elle est arrivée à destination.
|
6.45 |
Un agent chimique en aérosol était disponible, mais pas transporté couramment. Un gestionnaire principal donnait la permission d'obtenir ou d'utiliser un agent chimique, mais il n'a jamais été utilisé, nous a-t-on dit.
|
|
Unité d'isolement |
|
6.46 |
L'unité d'isolement était située à côté de l'unité de garde en milieu fermé, et on y accédait en franchissant des portes contrôlées par un dispositif électronique. Elle était petite, avec quatre cellules et une douche ainsi qu'une petite aire extérieure comprise dans des murs élevés. L'unité disposait de ses propres installations de buanderie, était propre et bien ordonnée. Dans chaque cellule se trouvait un lit métallique fixe, une table et un évier fixe; il y avait ni chaise ni tabouret dans aucune des cellules. Deux cellules étaient protégées par caméra et pouvaient être surveillées en direct par un(e) intervenant(e) de première ligne qui gérait tous les déplacements à l'unité de garde en milieu fermé. Une cellule disposait d'un lit qui avait été fixé au centre de la cellule (voir le paragraphe 6.34). Toutes les cellules étaient équipées de nombreux points d'attache, y compris des fenêtres à barreaux.
|
6.47 |
On remettait un matelas et des articles de literie à chaque femme arrivant à l'unité. Certaines femmes à risque d'automutilation ou prédisposées à endommager les biens se voyaient remettre un matelas mince en fibre indéchirable plutôt qu'un matelas conventionnel.
|
6.48 |
D'après les dossiers, 33 placements en isolement étaient attribuables à 30 femmes au cours des six mois débutant en avril 2005. De ces femmes, 13 % étaient noires, 20 % étaient autochtones, et 46 % étaient de race blanche (les autres avaient été mises en liberté, et les dossiers n'étaient pas disponibles). La période moyenne passée en isolement était de trois jours et pouvait varier de un à 19 jours. Pour les six mois avant le début d'avril, les dossiers indiquaient que 15 placements en isolement étaient attribuables à 13 femmes, avec une durée moyenne de 5,8 jours et un séjour pouvant varier de un à 22 jours en isolement. Là encore, cela représente une hausse importante par rapport aux six mois précédents où on a eu recours au placement en isolement à huit reprises pour sept femmes, pour une période moyenne de 1,75 jour. Pour l'ensemble de la période de 18 mois, plus de la moitié des femmes placées en isolement avaient quitté l'unité le jour même ou le jour suivant.
|
6.49 |
L'autorisation pour le placement en isolement était consignée adéquatement, et, lorsqu'il y avait lieu, on faisait participer les femmes aux examens — qui avaient lieu dans les 72 heures, cinq jours après le placement en isolement et 30 jours après le placement en isolement —, mais très peu de femmes y demeuraient longtemps. Les activités pour les femmes placées en isolement se limitaient à une heure dans la cour et à une douche quotidienne. Il est arrivé que quelques femmes qui restaient à l'unité pendant une longue période soient autorisées à avoir des biens personnels supplémentaires et à passer plus de temps à l'extérieur de leur cellule dehors, à travailler au nettoyage ou à regarder la télévision dans le corridor.
|
6.50 |
Le directeur adjoint et le chef d'équipe adjoint de l'unité de garde en milieu fermé rendaient visite aux femmes placées en isolement chaque jour, et la directrice de l'établissement leur rendait visite chaque semaine. Il n'y avait pas de disposition officielle concernant le soutien spirituel (voir le paragraphe 5.54).
|
6.51 |
On parlait couramment aux femmes placées en isolement à travers l'ouverture dans la porte, conçue pour servir les repas aux femmes qui étaient trop violentes pour qu'on puisse les laisser sortir. Durant l'inspection, une infirmière effectuant ses rondes quotidiennes et les intervenant(e)s de première ligne parlaient par l'ouverture de la porte à une femme ayant des antécédents de violence et présentant un risque courant d'automutilation; on lui remettait également les documents et ses repas par cette ouverture. L'interaction positive avec les membres du personnel était très limitée, mais les intervenant(e)s de première ligne faisaient preuve de sensibilité et de patience. Toutefois, la femme avait fait l'objet d'un transfèrement d'urgence, et tous les dossiers de son cas étaient en français. Près d'une semaine s'est écoulée avant que l'intervenante de première ligne de langue française lui soit affectée, qu'elle examine le dossier et qu'elle informe les autres personnes.
|
6.52 |
Au cours des six mois précédant l'inspection, une femme avait été placée en isolement pendant dix jours à titre de sanction après une audience devant le tribunal disciplinaire pour infraction grave, et six femmes avaient été placées en isolement parce qu'elles présentaient un risque d'automutilation. En 18 mois, six des femmes placées en isolement l'avaient été parce qu'elles l'avaient demandé, selon les dossiers.
|
6.53 |
L'objectif officiel de l'isolement était d'offrir un encadrement complet, non punitif pour les femmes, sans possibilité d'entretenir des rapports avec l'ensemble de la population carcérale générale. L'objectif n'était pas atteint.
|
|
Points de décision |
|
6.54 |
Les procédures disciplinaires, y compris le règlement informel, doivent faire l'objet d'une surveillance continue afin de garantir la conformité ainsi qu'une approche uniforme et juste en matière d'accusations et de sanctions.
|
6.55 |
Les présidents des tribunaux disciplinaires pour infractions mineures et infractions graves doivent avoir la conviction, au moyen d'une enquête raisonnable, que les accusations sont fondées avant de rendre un verdict, peu importe si la détenue plaide coupable.
|
6.56 |
À la lumière d'autres interventions, meilleures, pour la gestion des femmes violentes ou qui s'infligent des blessures, il convient d'abolir les protocoles permettant que les femmes soient maîtrisées en les immobilisant sur un lit ou une chaise.
|
6.57 |
Les programmes et les conditions visant les femmes placées en isolement doivent être adaptés individuellement de manière à ce que l'on tienne compte des motifs du placement en isolement.
|
6.58 |
On ne doit pas parler aux femmes placées à l'unité d'isolement par l'ouverture de la porte ni leur servir leurs repas par cette ouverture.
|
6.59 |
Les modalités du recours au placement en isolement devraient faire l'objet d'une surveillance continue dans le but de cerner les tendances, notamment la durée du placement, les motifs du placement en isolement et le groupe ethnique dans le but de réduire son utilisation.
|
6.60 |
Il convient de préparer des séances d'information complètes dans la langue appropriée avant qu'une femme qui présente un risque pour la sécurité d'autrui ou pour sa propre sécurité soit transférée d'un établissement à un autre.
|
|
Bonne pratique |
|
6.61 |
L'enregistrement vidéo du recours à la force ainsi que les séances d'information et les évaluations connexes de nature administrative protégeaient les femmes et le personnel contre les voies de fait non observées ou contre les fausses allégations découlant de l'incident.
|
|