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Les aspects juridiques de la proclamation de la Loi contre les émeutes

Les émeutes d'Archambault et de Drumheller ont suscité beaucoup de discussions concernant les interventions policières requises pour maîtriser une émeute importante. Le Code criminel du Canada contient certaines dispositions relatives aux rassemblements illégaux et aux émeutes, dispositions qui peuvent tout aussi bien s'appliquer aux émeutes publiques qu'à celles qui ont lieu dans les pénitenciers. Ces dispositions décrivent, entre autres, le type d'intervention que permet la Loi lorsqu'une émeute est déclarée. Cet article a pour but d'examiner les considérations d'ordre juridique et pratique entourant la mise en application de la « Loi contre les émeutes ». À quel moment la « Loi contre les émeutes » peut-elle être proclamée? En vertu de l'article 67 du Code criminel, la proclamation de la « Loi contre les émeutes » peut être lue par un juge de paix toutes les fois que « douze personnes ou plus sont réunies illégalement et d'une façon émeutière ». L'expression « d'une façon émeutière » fait référence à une perturbation tumultueuse de la paix. Ces termes étant sujet à interprétation, un bref examen des mots « réunies illégalement » et « perturbation tumultueuse de la paix » s'impose.

Un examen des dispositions pertinentes du Code criminel et de la jurisprudence qui lui est rattachée nous apprend qu'il y a rassemble-ment illégal dès que trois personnes ou plus se réunissent dans un but commun et qu'il y a des motifs raisonnables de croire qu'il y aura violation tumultueuse de la paix : voir Regina vs Thomas [1971], 2 WWR 734 (Cour de comté de la Colombie-Britannique). Dans la cause Regina vs Katyn, (1980) 52 CCC (2nd) 378 (Cour provinciale de la Saskatchewan), la Cour a fait valoir que, dans les cas où le rassemblement est tumultueux (c'est-à-dire que plusieurs personnes causent du désordre qui n'est pas seulement du brait), ce rassemblement peut être présumé séditieux. En dernier recours, un rassemblement peut être déclaré séditieux lorsqu'il y a utilisation de force ou de violence ou tentative d'empécher les agents de la paix d'accomplir leur devoir de protection.

La proclamation de la « Loi contre les émeutes » doit se faire dans les termes suivants ou en termes équivalents:

« Sa Majesté la Reine enjoint et commande à tous ceux qui sont ici réunis de se disperser immédiatement et de retourner paisiblement à leurs demeures ou à leurs occupations légitimes, sous peine d'être coupables d'une infraction pour laquelle, sur déclaration de culpabilité, ils peuvent être condamnés à l'emprisonnement à perpétuité. DIEU SAUVE LA REINE. »

Qui peut lire la proclamation de la « Loi contre les émeutes »?

Conformément à l'article 67 du Code criminel, la proclamation de la « Loi contre les émeutes » ne peut être lue que par certains individus, tels que les juges de paix, les juges de la cour provinciale, les maires ou les shérifs.

À l'exception des provinces de Québec et du Manitoba, qui ont désigné les cadres supérieurs des établissements aux postes de juges de paix chargés de lire la « Loi contre les émeutes », les autres provinces préfèrent demander aux juges de paix locaux de se rendre à l'établissement et d'y constater l'existence d'une émeute, s'il y a lieu. Pourquoi faut-il lire la proclamation de la « Loi contre les émeutes » ? Dans les cas de perturbation majeure ou mineure au sein du pénitencier, le directeur ou le chef de l'établissement peut, en vertu du Règlement sur les services des pénitenciers et de la Loi sur les pénitenciers, ordonner aux détenus de mettre fin à leur rassemblement illégal et de se disperser. Si les détenus refusent d'obéir à cet ordre, ils sont passibles de sanctions disciplinaires, et le directeur peut ordonner au personnel d'utiliser la force. En l'absence d'une proclamation de la « Loi contre les émeutes », les agents de la paix n'ont d'autre recours que les dispositions prévues aux articles 25 et 32 du Code criminel pour justifier leurs actions en application de la Loi. Les dispositions légales sont limitées en ce qui concerne l'usage de la force en vue ou susceptible de causer la mort ou de graves lésions corporelles. En fait, en vertu de l'article 25 du Code criminel, l'agent de la paix n'est pas justifié d'employer la force avec l'intention de causer, ou de nature à causer la mort ou des lésions corporelles ou des lésions corporelles graves, à moins qu'il n'estime, pour des motifs raisonnables, que cette utilisation de la force est nécessaire afin de se protéger lui- même ou de protéger toute autre personne sous sa protection, contre la mort ou contre des lésions corporelles.

Cependant, lorsque les conditions prévues à l'article 67 du Code criminel sont réunies et qu'il y a proclamation de la « Loi contre les émeutes », les agents de la paix sont tenus, en vertu de l'article 33, de disperser ou d'arrêter ceux qui ne se conforment pas à la proclamation; ces dispositions viennent s'ajouter à la justification limitée de l'usage de la force prévue aux articles 25 et 32 du Code criminel. À cet effet, le paragraphe 33(2) stipule qu'il ne peut être intenté aucune procédure civile ou pénale contre un agent de la paix à l'égard de tout décès ou de toute blessure en raison d'une résistance des détenus. En plus des sanctions disciplinaires dont nous avons déjà fait mention, les détenus ayant refusé de se disperser dans les trente minutes suivant la lecture de la proclamation peuvent être reconnus coupables d'un acte criminel et sont passibles d'emprisonnement à vie.

Les avantages liés à la lecture de la proclamation de la « Loi contre les émeutes » sont clairs. Premièrement, les agents de la paix bénéficient d'une protection accrue en ce qui concerne le degré de force utilisée. Deuxièmement, les détenus ont tout avantage à se disperser et à mettre fin à leur rassemblement dans la mesure où leur refus d'obéir peut leur valoir une peine d'emprisonnement à vie.

Lorsque les circonstances prévues à l'article 67 du Code criminel se trouvent réunies, les employés des établissements ont donc avantage à s'assurer que la proclamation de la « Loi contre les émeutes » est lue le plus rapidement possible au cours de la crise.