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Les communautés thérapeutiques : l'entraide pour contrer la récidive

Les programmes correctionnels s'adressant aux délinquants aux prises avec des problèmes d'alcool et de drogues ont pris de plus en plus d'importance au cours des dernières années. Un survol récent des programmes américains a permis d'établir qu'entre 1979 et 1987, le pourcentage des délinquants ayant participé à de tels programmes a triplé. En 1988, on a estimé que près de 80 % des délinquants des États-Unis avaient fait usage de drogues avant leur incarcération et que seulement 15 % d'éntre eux participaient à des thérapies en milieu carcéral.

Les rapports qui semblent exister entre la consommation de drogues et le comportement criminel a incité les travailleurs correctionnels à rechercher des programmes de désintoxication afin d'enrayer la dépendance et d'atténuer les taux de récidive. Les programmes s'inspirant de méthodes de communautés thérapeutiques se sont avérés efficaces pour certains types de délinquants toxicomanes.

Le modèle de communauté thérapeutique le plus répandu se fonde sur la théorie de l'apprentissage social. Cette approche s'efforce de générer des comportements pro-sociaux en améliorant les relations interpersonnelles qui permettent de lutter contre les tendances autodestructrices, anti-sociales et hédonistes, caractéristiques que l'on retrouve fréquemment chez les délinquants toxicomanes. Les thérapies individuelles et de groupe visent à développer et à promouvoir chez ces délinquants l'estime de soi, la discipline personnelle, la conscience de soi, la capacité à résoudre des problèmes et la confiance en soi.

Les participants sont choisis à partir de critères précis. On tient compte de leurs antécédents en tant que toxicomanes et du caractère persistant de leur récidive; ils doivent être admissibles à la libération conditionnelle au cours de l'année qui vient et s'être comportés convenablement en établissement. Les détenus psychotiques et ceux qui se sont rendus coupables d'infractions sexuelles ou de comportements violents ne sont habituellement pas admis au programme.

Plusieurs établissements correctionnels des États-Unis ont adopté des programmes de communautés thérapeutiques, mais il n'existe que peu de recherche qui documentent les résultats de ces programmes. Le programme Stay'n Out, mis en place dans l'État de New York, constitue la première étude longitudinale de grande envergure sur les communautés thérapeutiques.

Cette étude a été menée en 1988 par les chercheurs Falkin, Wexler et Lipton, qui ont établi une comparaison entre les participants (n=435) au programme Stay'n Out et trois autres groupes formés de membres non traités du groupe contrôle (n= 159) et composé de détenus qui ne pouvaient bénéficier du programme du fait qu'ils étaient à plus de 12 mois ou à moins de sept mois de leur date d'admissibilité à la libération conditionnelle; de personnes qui bénéficiaient d'un traitement intermédiaire moins intensif (n=573); et de personnes participant à des séances hebdomadaires de counseling (n=261).

Pour établir des comparaisons entre ces différents groupes, on a eu recours à trois facteurs de récidive le pourcentage d'arrestation chez les délinquants en liberté conditionnelle, le nombre moyen de mois avant leur arrestation et le pourcentage de libérations conditionnelles réussies (sans violation des conditions de la liberté conditionnelle, sans arrestation ou sans révocation de la libération conditionnelle).

D'après les résultats obtenus, le pourcentage d'arrestations chez les participants des communautés thérapeutiques était considérablement plus faible que dans les autres groupes. Vingt-sept pour cent des participants au programme Stay'n Out avaient été arrêtés 13,1 mois en moyenne après leur mise en liberté, comparativement à 41 % des membres non traités du groupe contrôle qui avaient été arrêtés 15 mois en moyenne après la fin du programme. Trente-cinq pour cent des personnes du groupe intermédiaire et 40 % des participants au groupe hebdomadaire de counseling avaient été arrêtés 12 mois en moyenne après la fin du programme de communauté thérapeutique.

Les auteurs attribuent à la durée de participation au programme le succès des programmes de désintoxication en milieu communautaire. Le temps précédant l'arrestation était deux fois plus court (neuf mois) pour les participants qui avaient suivi le programme pendant moins de neuf mois que pour ceux dont la participation au programme s'était échelonnée sur une période allant de neuf à 12 mois (18 mois). Cependant, les délinquants qui avaient suivi le programme pendant plus de 12 mois avaient été moins longtemps en liberté (14 mois) avant leur arrestation que ceux qui l'avaient suivi de neuf à 12 mois.

Comme le montre le graphique, seulement 49 % des délinquants ayant suivi le programme pendant moins de trois mois ont eu un comportement acceptable après leur libération conditionnelle comparativement à 77,3 % de ceux dont la participation s'est prolongée sur une période de neuf à 12 mois. Ce pourcentage n'est cependant que de 57 % chez les délinquants qui ont participé au programme Stay'n Out pendant plus de 12 mois.

D'après les auteurs, le fait que les résultats positifs semblent s'atténuer considérablement chez les délinquants qui ont participé à un programme de communauté thérapeutique pendant plus de 12 mois s'explique par une baisse de motivation. Dans l'état de New York, c'est la Commission des libérations conditionnelles qui est responsable des mises en liberté communautaires; elle peut donc refuser cette mise en liberté aux participants des programmes Stay'n Out. Si après 12 mois de participation la mise en liberté communautaire leur est refusée, les délinquants auront en quelque sorte fait le tour du programme dans lequel ils ne trouvent plus la motivation qu'ils ont habituellement au sein de la collectivité.



Graphique 1
Graphique 1
Après avoir été intégrés pendant neuf à 12 mois à une communauté thérapeutique en milieu carcéral, les participants au programme Stay'n Out sont invités à poursuivre leur traitement de désintoxication après leur libération au moyen des programmes de communautés thérapeutiques.

L'étude sur le programme Stay'n Out a démontré que la communauté thérapeutique est plus efficace pour réduire la récidive que l'absence de traitement, qu'elle est plus efficace que les autres formes de traitement et qu'en portant davantage d'attention à la durée de la thérapie on pouvait obtenir des résultats des plus intéressants chez les ex-détenus. Le programme Stay'n Out démontre clairement que la communauté thérapeutique en milieu carcéral peut effectivement abaisser les taux de récidive.



Wexler, R., Falkin, G. et Lipton, D. (1990). Outcome Evaluation of a Prison Therapeutic Community. Criminal Justice and Behavior, 17, n° 1, 71-92.