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La délinquance dans l'entourage, l'attachement aux amis et la déviance

Les chercheurs sont d'avis que la pression du groupe vers la conformité a une influence capitale sur le développement de la délinquance. Pratiquement tous les chercheurs partagent le même point de vue à ce sujet: une personne est nettement plus susceptible d'être délinquante si son entourage l'est.

Les résultats d'une récente étude sur la délinquance dans l'entourage, l'attachement aux amis et la déviance appuient cette affirmation. Cette étude a montré que les jeunes hommes les plus délinquants sont aussi ceux qui ont le moins confiance en leurs amis et qui les respectent le moins. Le point sur la recherche Dans l'ensemble, les recherches ont révélé que la délinquance est plus fermement ancrée chez les personnes qui sont très attachées à leurs pairs. Par contre, certaines recherches ont prouvé que lorsque l'attachement aux pairs s'atténue, la délinquance s aggrave.

Certaines des données les plus éclairantes et les plus détaillées sur la nature des rapports qu'entretiennent les délinquants entre eux proviennent de la recherche sur les bandes. Allant à l'encontre de l'opinion la plus répandue parmi les chercheurs au sujet de la délinquance individuelle, la recherche sur les bandes a révélé que les liens unissant les membres de bandes sont faibles, voire inexistants.

Les adolescents peuvent se rallier à une bande parce qu'ils ne maîtrisent pas les aptitudes sociales nécessaires pour tisser des liens personnels proches avec les autres. En fait, certains chercheurs ont même trouvé que la loyauté au sein des bandes de délinquants est alimentée par des facteurs externes. Ce serait le cas, par exemple, au sein d'une bande si désunie qu'elle se serait désagrégée sans les pressions extérieures exercées par d'autres bandes ou par la police. Méthode L'étude dont il est question ici s'interessait au rapport entre la délinquance dans l'entourage, l'attachement aux amis et la délinquance rapportée par les individus étudiés. Les données utilisées proviennent de l'enquête sur la jeunesse de Seattle (Seattle Youth Study) menée par l'université de Washington. Des renseignements ont été recueillis sur 847 jeunes hommes blancs au moyen de questionnaires et d'entrevues.

Les chercheurs se sont fondés sur l'indice Hirschi de délinquance volontairement rapportée qui est mesuré par des questions comme la suivante: « vous est-il déjà arrivé de délibérément endommager un objet qui ne vous appartenait pas?» Les réponses aux questions sont réparties en trois catégories : pas d'actes délinquants, un acte délinquant, deux actes délinquants et plus. Malheureusement, avec ce système de classement, les personnes qui ont commis des douzaines d'actes délinquants sont mises dans le même sac que celles qui n'ont commis que deux infractions.

Lorsqu'ils se sont intéressés à la nature des rapports que les personnes interrogées entretiennent avec leurs amis et leur entourage, les chercheurs ont fait la distinction entre les éléments qui caractérisent les rapports entre la personne interrogée et un seul ami proche et les éléments propres aux rapports avec les amis en général. Résultats Les résultats obtenus s'inscrivent dans la même veine que ceux de recherches passées : il existe un lien entre la délinquance dans l'entourage et la délinquance individuelle rapportée par les intéressés. Autrement dit, plus souvent qu'autrement, les amis des personnes ayant commis des actes délinquants étaient également délinquants; ce n'était pas aussi souvent le cas des personnes non délinquantes.

Ainsi, 89,1 p. 100 des jeunes qui ont rapporté qu'au moins un de leurs amis proches avait eu des démêlés avec la police avaient commis deux actes délinquants ou plus. Seulement 56,6 p. 100 des jeunes dont les amis proches n'étaient pas délinquants avaient commis autant d'actes délinquants.

Par ailleurs, lorsque interrogés sur les activités délinquantes d'un seul ami proche, plus de 90 p. 100 des jeunes qui ont déclaré que leur seul et unique ami proche avait eu affaire aux autorités avaient commis deux actes délinquants ou plus. Cette proportion était de 66 p. 100 chez les jeunes dont l'unique ami proche ne s'était jamais trouvé entre les mains de la police.

Dans un deuxième temps, les chercheurs se sont penchés sur le lien entre l'attachement aux amis et la délinquance. Ils se sont fondés sur quatre facteurs pour sonder la solidité des liens avec les amis; deux facteurs servaient à mesurer l'attachement à un ami proche et les deux autres permettaient d'évaluer l'attachement aux amis en général. Il s'agissait de l'identification avec un ami proche, des confidences faites à un ami proche, de la confiance en ses amis et du respect pour ses amis.

Les chercheurs n'ont pas trouvé de lien manifeste entre l'attachement à un seul ami proche et la délinquance. Pourtant, un tel lien existait dans le cas de l'attachement aux amis en général.

Plus précisément, les chercheurs ont constaté que plus les jeunes avaient confiance en leurs amis (et non en un ami proche) et plus ils les respectaient, plus le taux de délinquance était bas. Ainsi, les jeunes qui étaient d'avis que leurs amis ne mentent pas sont nettement moins susceptibles d'avoir commis deux actes délinquants ou plus que le reste de l'échantillon (71,9 p. 100 et 82,2 p. 100 respectivement).

Les chercheurs ont également demandé aux jeunes s'ils étaient d'accord ou non avec l'énoncé suivant: « j'ai beaucoup de respect pour mes amis ». Quatre-vingt-cinq pour cent des jeunes qui n'étaient pas d'accord avaient commis deux actes délinquants ou plus, par rapport à 76,4 p. 100 de ceux qui étaient d'accord.

L'attachement aux amis semble donc freiner quelque peu la délinquance.

Dans un troisième temps, les chercheurs se sont intéressés aux conséquences de l'attachement aux amis. Ils ont entrepris quatre analyses détaillées du rapport entre la délinquance de l'entourage, la délinquance individuelle et l'attachement aux anus.

Les deux premières analyses étaient consacrées au rapport entre la délinquance de l'entourage, la délinquance individuelle rapportée par les intéressés et l'attachement aux amis en général. Comme ils s'y attendaient, les chercheurs ont découvert un rapport très net entre la délinquance admise et la délinquance de l'entourage.

Lorsque la délinquance de l'entourage était un facteur, les chercheurs ne purent établir de rapport manifeste entre l'attachement de l'intéressé à ses amis et ses activités délinquantes.

Par contre, les chercheurs ont remarqué un lien entre l'attachement aux amis et la délinquance des amis. Seulement environ la moitié (51,4 p. 100) des jeunes dont les amis étaient délinquants ont déclaré qu'ils avaient confiance en leurs amis, comparativement aux deux tiers des jeunes dont les amis n'étaient pas délinquants. De même, seulement 18 p. 100 des jeunes dont les amis étaient délinquants ont déclaré « éprouver beaucoup de respect pour leurs amis », par rapport à 24,7 p. 100 des jeunes dont les amis n'étaient pas délinquants.

D'après ces résultats, il semblerait que les délinquants se font moins confiance mutuellement et éprouvent moins de respect les uns pour les autres que les non-délinquants.

Les deux autres analyses portaient sur le rapport entre la délinquance de l'entourage, la délinquance individuelle volontairement rapportée et l'attachement à un seul ami proche. Ces analyses ont donné des résultats comparables aux deux premières, à une importante différence près : les chercheurs n'ont pu établir de rapport net entre l'attachement à un seul ami proche et la délinquance de cet ami (délinquance de l'entourage). Il est intéressant de noter que l'attachement à un seul ami proche ne semble pas changer selon la délinquance ou non-délinquance de cet ami. Cette neutralité s'explique peut-être par le fait qu'un ami proche est par définition l'objet d'une relation personnelle intime, indépendamment de son comportement. Résumé À l'instar de recherches antérieures, cette étude a mis en évidence un lien étroit et manifeste entre la délinquance de l'entourage et la délinquance individuelle.

Le rapport entre l'attachement aux amis et la délinquance est moins net. Précisément, il n'existe pas de rapport significatif entre l'attachement à un seul ami proche et la délinquance.

Par contre, il semble y avoir un lien entre la faiblesse de l'attachement aux amis et la délinquance. L'incidence de délinquance rapportée par les jeunes qui avaient confiance en leurs amis et les respectaient était plus faible. Aussi, les amis des jeunes qui respectaient beaucoup leurs amis et leur faisaient confiance étaient moins susceptibles d'être délinquants.



D. Brownfield et K. Thompson. (Janvier 1991). « Attachment to Peers and Delinquent Behaviour », Revue canadienne de criminologie, 45-60.