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Quelques réponses au sondage sur l'engagement du personnel

Les résultats du sondage sur l'engagement du personnel ont été communiqués à l'occasion d'une rencontre des cadres supérieurs du Service correctionnel du Canada en décembre 1991. Les commentaires de trois cadres supérieurs au sujet du sondage ont été traduits et partiellement reproduits ci-après. Commentaires de Dan Kane, sous-commissaire adjoint aux opérations, région de 1'Ontario Tout d'abord, j'ai constaté que le sondage n'a pas fait ressortir grand-chose de nouveau, ce qui ne le rend pas moins intéressant. J'ai toutefois noté un élément qui est à la fois nouveau et déroutant: ce sont les attitudes du groupe des WP(1).

Depuis toujours ce groupe a assuré le renouvellement de la haute direction du Service correctionnel du Canada. Je crois que ce serait commettre une grave erreur que de ne pas prêter attention au changement d'attitude de ce groupe parce celui-ci dénote, selon moi, un phénomène important auquel nous nous devons d'être sensibles.

En revanche, il est difficile d'y être sensible dans la mesure où de tous les groupes au sein du Service correctionnel du Canada, c'est assurément avec le groupe des W'> que la direction s'est montrée le plus proactive, du moins dans la région de l'Ontario. Ce groupe a bénéficié à lui seul de plus d'attention que n'importe quel autre groupe professionnel au sein du Service, et il me semble qu'il est important de souligner que cela n'a pas semblé avoir une incidence quelconque sur son attitude.

Une réunion régionale de tous les cadres supérieurs de la région de l'Ontario, des présidents du syndicat des employés du Solliciteur général et de bon nombre de vice-présidents et de délégués syndicaux a récemment été organisée en Ontario. À cette occasion, nous nous sommes assis tous ensemble pour discuter de l'avenir des programmes de formation du personnel du Service correctionnel du Canada. La discussion s'est avérée fort intéressante alors que nous tentions d'aborder ensemble, de façon concertée, des questions liées à l'avenir du Service.

Nous avons passé une journée entière à discuter de la formation, Le personnel de premier échelon a insisté longuement et lourdement sur la nécessité d'offrir une formation pertinente et sur le fait que les superviseurs du personnel de premier échelon devaient posséder ce que l'on pourrait au mieux appeler des qualités de chef et qui seraient définies comme suit: a) la capacité de susciter le respect de ses subalternes, b) la capacité de gagner le respect de ses supérieurs, c) la capacité d'amener les gens à travailler ensemble pour atteindre un objectif commun en réussissant à éviter les frictions ou la résistance.

Faisant partie d'une même région, nous nous sommes assis à la même table et avons longuement discuté de la question. Nous tentons en ce moment de concentrer nos efforts et de regrouper nos meilleurs éléments pour trouver ensemble un moyen de renverser la situation.

Il semblerait que la perception qu'ont les employés de premier échelon de la structure du Service, de ses valeurs, de ses attitudes et de sa position dépende dans une large mesure de l'opinion qu'ils ont de leurs supérieurs et de la nature des rapports qu'ils entretiennent avec ceux-ci. Je pense qu'il s'agit là d'un élément capital et que si nous n'en tenons pas compte, c'est à nos risques et périls.

Je ne pense pas que nous puissions nous évertuer à convertir les cadres intermédiaires et supérieurs du Service et nous attendre à monts et merveilles. Je pense qu'en somme le groupe des W'> s'est rallié aux principes correctionnels qui ont été si clairement articulés au cours des quelques dernières années. Je ne pense pas que ce soit d'un engagement plus prononcé de ce groupe que nous ayons besoin, mais bien de la fidélité des employés des échelons inférieurs. Ceux-ci réagiront alors directement et de façon constructive à leurs superviseurs.

Je m'objecte ici immédiatement, longuement et lourdement, à l'affirmation que le personnel n'est pas motivé. Il ne s'agit pas de savoir si le personnel est motivé, mais plutôt de savoir à quoi il est résolu. Le sondage demandait aux employés d'indiquer dans quelle mesure ils souscrivaient à des objectifs correctionnels et à des convictions et objectifs précis.

Je sais par exemple que sur la figure qui montre la proportion du personnel qui n'est pas motivée, la grosse partie au haut correspond aux employés qui souscrivent le moins aux objectifs visés par le Service; on affirme donc que la mission du Service tient peu au coeur de ces employés.

Or, j'ai personnellement constaté que des personnes incluses dans ce groupe sont plus ou moins motivées par différentes choses. Ainsi, il peut y avoir dans ce groupe des personnes à qui les buts et les objectifs du Service importent peu, mais qui exercent une influence énorme et disproportionnée en ce qu'elles déterminent les attitudes et les valeurs de leurs collègues et les détournent de ce que nous tentons de réaliser.

Le groupe neutre est important parce qu'il ne s'élèvera pas sous l'effet de l'influence de ce puissant groupe négatif et que nous l'aurons alors perdu. Ceux qui en font partie n'hésiteront pas à affirmer qu'il est terrible que les gens pensent ainsi, mais si on leur donne l'occasion de réagir et d'aborder ces personnes de front, ils prendront la tangente.

C'est pourquoi je ne pense pas qu'il s'agisse d'une question d'engagement. Somme toute, en me fondant sur mon expérience personnelle au sein du Service correctionnel du Canada, je peux affirmer que le personnel du Service est très engagé -reste à savoir à l'égard de quoi, et je crois que c'est sur cet aspect que nous devons concentrer nos efforts.

L'attitude et la compétence des superviseurs de premier échelon a une importance critique sur l'avenir du Service. Il ne suffit pas de pouvoir lancer en choeur « allons, allons, tous ensemble, n'est-ce pas merveilleux, nous nous entendons tous là dessus » en partant du principe que cela suffira à provoquer un changement alors que les superviseurs de premier échelon, qui sont en quelque sorte les sergents de l'armée du Service, ne suivent pas la marche, et vont même jusqu'à traîner les pieds, entravant l'avènement du changement progressif.

Je pense également qu'il y a lieu de se pencher sur le fait que nous confondons depuis déjà longtemps entregent, que nous prisons beaucoup, et qualités de chef. Or, il y a un vaste fossé entre ces deux notions. Certaines personnes ont énormément d'entregent, mais sont incapables de diriger ou de mener les autres. De même, il y a d'excellents chefs qui ne savent pas s'y prendre avec les gens. Il faut s'attarder à cette question. Il faut y porter attention parce qu'il ne suffit pas d'avoir un effectif de «braves gens » ayant beaucoup d'entregent. Nous devons pouvoir aller de l'avant et bâtir sur cette capacité d'entretenir de bons rapports avec les autres pour cultiver des qualités de chef hors-pair.

Le personnel de premier échelon a exprimé en termes assez précis ce que cela signifie pour lui, et cela se résume aux questions suivantes : cette personne sait-elle de quoi je suis responsable? Cette personne comprend-t-elle la situation dans laquelle je me trouve chaque jour? Est-ce que je respecte cette personne? Cette personne passe-t-elle du temps avec moi?

On entend de plus en plus parler du superviseur absent. On demande « où est votre superviseur? » Il est en réunion, il fait tout ce qu'il a à faire, ou peut-être ne le fait-il pas, mais toujours pour la bonne raison. Le personnel de premier échelon veut des superviseurs qui soient plus présents, ils veulent passer plus de temps avec eux.

Je suis convaincu que la clé du succès - c'est-à-dire comment se hisser jusqu'au prochain échelon de réussite au sein du Service - dépendra en grande partie de notre habileté à choisir des superviseurs qui a) possèdent les qualités de chef voulues, b) sont eux-mêmes motivés, et c) ont le temps de se consacrer à leurs fonctions de supervision plutôt qu'à d'autres questions que nous sommes très susceptibles de leur soumettre. Commentaires de Brian Lang, directeur de district, Bureau de libération conditionnelle du district du Nord et de l'intérieur, région du Pacifique Après avoir pris connaissance des résultats du sondage, mon opinion était partagée. Ce sont surtout les différences régionales qui m'ont frappé et je soupçonne que le sondage m'a laissé sur ma faim de bien des façons.

Le peu d'engagement manifesté par les employés chargés de la gestion des cas m'a surpris et un peu déçu - a en juger par mon expérience personnelle, je m'attendais à un engagement plus marqué de leur part. En fait, l'engagement manifesté est faible ce qui m'a surpris, un peu déçu et m'a amené à réfléchir.

Je parle en me fondant sur mon expérience dans un bureau communautaire. Quand j'ai quitté le dernier colloque pour les cadres supérieurs au mois de mai - mon accession à un poste de direction est relativement récente - j'étais très impressionné par la présentation qui avait été donnée sur l'emploi de repères. Il me semble qu'un sondage de ce genre se prête particulièrement bien à un tel emploi, et j'aimerais beaucoup recevoir d'autres documents sur le sujet ainsi que sur les organisations ou les organismes qui fonctionnent particulièrement bien, et pourquoi.

Le sondage ne m'a pas fourni les renseignements qui m'intéressaient sur le groupe de personnel de soutien, ni sur les différences entre l'organisation en établissement et en milieu communautaire. Je pense qu'il se produit un phénomène intéressant et qui a pris de l'ampleur au cours de la dernière année, et je ne sais trop quoi en penser pour le moment, mais je suis d'avis que l'énoncé de mission, dans un certain sens, a suscité certaines attentes chez les employés; en particulier, ils en attendent davantage de la direction. Lorsque ces attentes ne sont pas satisfaites, il en résulte souvent un sentiment d'insatisfaction.

Je peux même citer en exemple ma petite organisation - il y a un an, nous n'avions pas d'ordinateurs. Aujourd'hui, chaque employé en a un. Récemment, quelqu'un s'est plaint à moi que son ordinateur mettait quatre minutes à démarrer alors qu'un autre en mettait deux. Je me suis fait la réflexion que les événements prenaient une tournure bien étrange plus nous disposons d'outils, plus nous en voulons. Il y a lieu de s'interroger là-dessus.

En fin de compte, de bien des façons, les résultats du sondage ne m'ont pas surpris. Je pense que le pourcentage de personnel qui se dit généralement satisfait ou convaincu des objectifs du Service était plutôt prévisible d'un point de vue subjectif, mais il demeure certaines anomalies que j'aimerai beaucoup étudier de plus près. J'espère que nous pourrons nous intéresser plus étroitement aux organisations qui se tirent particulièrement bien d'affaire et utiliser les renseignements que nous tirerons d'études de ce genre pour dépanner les organisations qui s'en tirent peut-être moins bien. Commentaires de Paul Oleniuk, sous-commissaire adjoint aux opérations, région des Prairies Au début des années 1970, le Service canadien des pénitenciers a lancé une campagne de recrutement dans les universités. Je me souviens en particulier d'une affiche qui montrait la photo d'un détenu agrippant les barreaux de sa cellule. Au-dessus, on pouvait lire « Alors, vous voulez changer le monde - commencez ici.. postulez un emploi au Service canadien des pénitenciers », etc. Je trouvais cette image particulièrement dramatique. Lorsque je m'entretiens avec les personnes nouvellement entrées au Service, je ne manque jamais d'être épaté, comme beaucoup d'entre vous j'en suis sûr, par leur enthousiasme, leur énergie et leur entrain. En cours de route, à force de travailler dans le milieu, il leur arrive quelque chose. Après un an, trois ans, cinq ans ou dix ans, elles finissent par perdre un peu de l'entrain et de l'enthousiasme qui les animaient à l'époque où elles ont été recrutées.

Quelles que soient les circonstances qui provoquent cette métamorphose, elles ne se produisent pas dans des cas isolés. Il ne s'agit pas de ne pas obtenir d'heures supplémentaires ou de recevoir en retard un chèque de paiement d'heures supplémentaires ou un changement d'affectation. C'est quelque chose de beaucoup plus insidieux qui change leur attitude vis-à-vis du travail.

Ce que nous devons faire, c'est de remonter à l'origine du problème, de trouver ce qui cause ce changement et de modifier nos politiques pour y parer.

Je ne peux pas affirmer que les résultats du sondage sur l'engagement du personnel sont bons ou mauvais. Par contre, je sais que le nombre d'employés qui ne se sentent pas motivés est pratiquement égal à celui des employés qui se sentent motivés et je ne pense pas que cela soit désirable.

Les sondeurs affirment qu'il est bon qu'une grosse proportion d'un groupe soit indécise parce qu'il est alors possible de la faire changer d'avis. Si c'est le cas, nous sommes en bonne posture parce que nous sommes en mesure d'inciter un bon tiers de l'effectif du Service à changer.

Chose intéressante : j'essayais d'établir une corrélation entre ce qui précède et d'autres caractéristiques de l'effectif et de l'organisation, et j'ai jeté un coup d'oeil rapide aux chiffres sur les griefs. J'ai constaté avec beaucoup d'intérêt que le nombre de griefs déposés était le plus bas dans la région où l'engagement des employés était le plus fort, et vice-versa, c'est-à-dire qu'il était le plus élevé là où les employés étaient le moins motivés. Il n'y avait pas de rapports d'équivalence analogues dans les trois autres régions, mais ceux-ci existent pour les deux extrêmes.

Nous avons un travail à accomplir, et ce travail est de trouver quels sont les facteurs qui démoralisent le personnel, de les éliminer et de modifier nos politiques en conséquence. Ce genre de recherche me semble très valable.



(1)Le groupe professionnel des WP réunit tous les gestionnaires de cas du Service correctionnel du Canada.