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Repenser les services correctionnels pour les femmes purgeant une peine fédérale au Canada

Depuis longtemps, les femmes purgeant une peine fédérale sont l'un des groupes les plus négligés du système correctionnel canadien. La seule prison de femmes se trouvant à Kingston, en Ontario, de nombreuses délinquantes étaient incarcérées loin de leur famille et de leur localité, séparées de tout non seulement par des murs et des barreaux, mais également par de très grandes distances. D'une certaine façon, ces femmes étaient exilées.

Par ailleurs, même s'il s'agissait d'une prison de femmes, l'organisation, la structure et les programmes au sein de l'établissement reproduisaient dans l'ensemble un modèle conçu pour les hommes.

En un mot, le système correctionnel s'efforçait de répondre aux besoins des délinquants types, plutôt que des délinquantes et, de toute évidence, ce n'était pas suffisant.

En 1990, des mesures ont été prises pour remédier à la situation. Le Solliciteur général du Canada a annoncé que, conformément aux recommandations du Groupe d'étude sur les femmes purgeant une peine fédérale, la Prison des femmes serait remplacée par cinq établissements correctionnels, mettant tous l'accent sur des programmes communautaires.

Dans cet article, nous présentons le nouvel établissement régional de l'Atlantique. Nous examinons aussi comment les nouveaux établissements s'efforceront de mettre en oeuvre des programmes et des traitements qui concourront, en substance, à une expérience correctionnelle pertinente répondant véritablement aux besoins des femmes. Où les nouveaux établissements seront-ils aménagés? À partir de critères approuvés de sélection du lieu, le Service correctionnel du Canada a choisi avec soin l'emplacement des nouveaux établissements. En fin de compte, les collectivités suivantes ont été choisies : Truro, en Nouvelle-Écosse, pour l'établissement régional de l'Atlantique; Kitchener; en Ontario, pour l'établissement régional de l'Ontario; Joliette, au Québec, pour l'établissement régional du Québec; Edmonton, en Alberta, pour l'établissement régional des Prairies; et Maple Creek - Nekaneet, en Saskatchewan, pour le pavillon de ressourcement des femmes autochtones. Le centre correctionnel de Burnaby, en Colombie-Britannique, qui existe déjà, servira d'établissement régional pour le Pacifique. Profil des femmes purgeant une peine fédérale La priorité a été accordée à la définition des besoins des femmes purgeant une peine fédérale. Le rapport La création de choix a permis de dresser le profil de ces femmes(3).

Il y a quelque 300 femmes incarcérées, en tout temps, dans des établissements fédéraux et provinciaux du Canada; elles purgent des peines allant de deux ans à la condamnation à perpétuité. Leur âge varie entre 19 et 74 ans. Environ 15 p. 100 de ces femmes sont Autochtones, les deux tiers sont mères de famille - et souvent, elles sont le seul soutien de leurs enfants.

Ces femmes ont un faible niveau de scolarité et peu de compétences en demande. Elles sont prestataires de l'aide sociale ou occupent un emploi mal rémunéré.

Elles sont nombreuses - en fait, une écrasante majorité d'entre elles - à avoir été victimes de mauvais traitement physique et sexuel (75 p. 100 des délinquantes non autochtones et 85 p. 100 des délinquantes autochtones); les deux tiers consommaient régulièrement de l'alcool ou étaient toxicomanes au moment de commettre leur infraction et 59 p. 100 avaient ou ont encore un comportement d'automutilation. Le taux de suicide de cette population est nettement plus élevé que la moyenne - il y a eu sept suicides au cours des trois dernières années à la Prison des femmes (pour une population moyenne de 115 personnes).

Mais, et c'est plus important encore, la majorité des délinquantes purgent leur première peine fédérale - plus d'un tiers n'avaient pas été condamnées auparavant. Modèle opérationnel Pour répondre aux besoins particuliers des femmes correspondant à ce profil, l'établissement fédéral pour femmes de Truro a mis au point un modèle de programme original. Les programmes - et l'établissement tout entier - seront axés sur la collectivité, holistiques et centrés sur les femmes. Ils tiendront compte des différences culturelles et favoriseront l'autonomie et l'estime de soi sans perdre de vue le but ultime, qui est la libération.

L'établissement offrira des programmes sur place et à l'extérieur, mais la participation à des programmes à l'extérieur ne sera encouragée que lorsque la délinquante ne constitue pas un risque pour la collectivité. De façon générale, les programmes viseront à aider les femmes à prendre des décisions éclairées et judicieuses pour leur vie. Programmes de traitement Les programmes de traitement porteront essentiellement sur les mauvais traitements physiques et sexuels, la consommation excessive d'alcool ou de drogue et la prévention du suicide et de l'automutilation. D'autres programmes porteront sur le rôle parental, les soins prénatals ou postnatals, l'épanouissement personnel et d'autres besoins mis en évidence à mesure que l'établissement évoluera et progressera.

Des programmes plus traditionnels seront axés sur l'acquisition de compétences sociales, la spiritualité, l'éducation, l'emploi, la formation professionnelle et la détente ou les loisirs.

L'objectif sera de donner aux femmes l'occasion de vivre quotidiennement des expériences évoquant le plus étroitement possible la vie dans la collectivité. Programme destiné aux enfants Le programme destiné aux enfants est probablement l'un des aspects les plus nouveaux et les plus controversés du nouvel établissement. Plusieurs modalités sont prévues: certains enfants rendront ponctuellement visite à leur mère tandis que d'autres vivront avec leur mère dans l'établissement.

Une garderie aménagée pour les enfants qui vivent dans l'établissement permettra aux mères de continuer à participer aux programmes.

On espère également travailler en collaboration avec la collectivité et les organismes publics adéquats afin de mettre en place un réseau de foyers d'accueil pour les enfants qui ne vivent pas dans l'établissement, mais qui veulent néanmoins rester à proximité de leur mère. La sécurité L'établissement comptera 21 lits (porté progressivement à 30 lits) et, en matière de sécurité, l'objectif sera toujours d'en arriver à un équilibre entre la surveillance et la participation à des programmes sains dans un milieu favorable. La sécurité sera essentiellement dynamique; par conséquent, tout le personnel sera du personnel correctionnel.

De façon générale, les politiques et les procédures de sécurité tiendront compte du fait que peu de ces femmes sont des délinquantes à risque élevé. Conclusion Le défi sera d'offrir aux femmes incarcérées dans des établissements régionaux, en particulier dans les régions plus petites, tous les programmes dont elles ont besoin, en dépit de leur petit nombre. En cas d'échec, elles pourraient se retrouver plus défavorisées qu'elles ne le sont actuellement, et c'est certainement l'une de leurs craintes.

Ces nouveaux établissements aideront le Service correctionnel du Canada à répondre aux nombreux besoins des femmes purgeant une peine fédérale. Il ne reste plus qu'à mettre la théorie en pratique.


(1)Thérèse LeBlanc, directrice, établissement fédéral pour femmes de Truro, 46, place Inglis, bureau 5, Truro (Nouvelle-Écosse) B2N 4B4.
(2)La création de choix : Rapport du Groupe d'étude sur les femmes purgeant une peine fédérale, Ottawa, Service correctionnel du Canada, 1990.
(3)La création de choix: Rapport du Groupe d'étude sur les femmes purgeant une peine fédérale.