Cette page Web a été archivée dans le Web.
Prévoir la récidive chez les délinquants sexuels
Des recherches récentes(2) ont permis d'établir un modèle actuariel pour la prévision de la récidive d'ordre sexuel. Le Guide d'évaluation du risque chez les délinquants sexuels a démontré qu'il était relativement efficace quant à la prédiction de la récidive d'ordre sexuel et de la récidive en général.Tableau 1
Récidive chez les délinquants
sexuels et catégorie d'infraction |
|
Type d'infraction à l'origine de la récidive |
Proportion de délinquants |
Infraction d'ordre sexuel | 19,3% |
Infraction autre que sexuelle | 10,5% |
Violation d'une condition de la liberté | 14,0% |
Total | 43,9% |
Une corrélation bisériale de point a révélé l'existence d'une
relation linéaire significative entre les scores obtenus selon le Guide d'évaluation du
risque chez les délinquants sexuels et la récidive (p < 0,01).
Pour mieux vérifier la validité de l'instrument, on a eu recours à une simulation
informatique afin de déterminer la justesse des prévisions pour les scores correspondant
à chacune des catégories du Guide d'évaluation du risque chez les
délinquants sexuels, et donc le bien-fondé des décisions de mise en
liberté s'appuyant sur elles.
Le guide comporte neuf catégories de prévision, pour lesquelles la probabilité de
récidive avec violence va de 0,0 à 1,0. Pour chaque catégorie de prévision,
la méthode de simulation a permis de calculer le pourcentage de récidivistes correctement
dépistés par l'instrument dans l'échantillon, le pourcentage de faux
négatifs (les délinquants pour lesquels on avait prévu la réussite mais qui
ont récidivé) et le pourcentage de faux positifs (les délinquants qui ont bien
réintégré la société alors qu'on avait prévu un
échec).
Cela signifie par exemple que si le guide avait fait prévoir l'échec, quant à la
réinsertion sociale, de tous les détenus, 43,9 % de l'échantillon (les
récidivistes) auraient été bien dépistés, mais 56,1 % seraient
demeurés incarcérés inutilement.
L'exactitude des prévisions et les types d'erreurs produits par le modèle variaient selon
les neuf catégories de prévision (voir le tableau 2).
Tableau 2
Résultats d'une simulation informatique
des décisions de mise en liberté à l'aide du Guide d'evaluation du risque chez les délinquants sexuels |
|||
Catégorie de prévision |
Délinquants correctement dépistés |
Faux négatifs (prévu la réussite, mais le délinquants a récidivé) |
Faux positifs (prévu un échec, mais le délinquants n'a récidivé) |
0,00 |
43,9% |
0,0% |
56,1% |
0,08 |
43,9% |
0,0% |
56,1% |
0,12 |
43,9% |
0,0% |
56,1% |
0,17 |
54,4% |
0,0% |
45,6% |
0,35 |
70,2% |
7,0% |
22,8% |
0,44 |
71,9% |
14,0% |
14,0% |
0,55 |
75,4% |
19,3% |
5,3% |
0,76 |
63,2% |
35,1% |
1,7% |
1,00 |
57,9% |
42,1% |
0,0% |
Les catégories de prévision allant de 0,00 à 1,00 ont produit différents
niveaux d'exactitude, le pourcentage de l'échantillon dépisté correctement
étant de 75,4 % au maximum (pour la catégorie 0,55).
L'exactitude globale du modèle pour chaque catégorie de prévision revêt un
intérêt théorique et empirique considérable, mais les résultats de la
simulation informatique semblent indiquer que toute tentative de maximiser l'exactitude globale ne fait
pas entrer en ligne de compte les coûts relatifs des erreurs de prévision.
Si l'on choisissait par exemple pour limite la capacité de prévision maximale du
modèle (exactitude dans 75,4 % des cas), cela voudrait dire qu'environ 24,6 % des membres de
l'échantillon seraient mal classés, la plupart des erreurs consistant en des faux
négatifs (libérer des délinquants qui devraient être maintenus en
incarcération). L'abaissement de la limite au score de 0,35 diminuerait la proportion de
prévisions exactes (qui passerait à 70,2 %), mais ferait aussi tomber les faux
négatifs de 19,3 % à 7,0 %. Il faut manifestement, dans le contexte de la prévision
du risque, faire la part des coûts de la récidive et de ceux d'un maintien en
incarcération.
Il va sans dire que la meilleure façon de réduire les coûts tant de la
récidive que du maintien en incarcération consiste à offrir un traitement efficace
aux délinquants sexuels. Le Guide d'évaluation du risque chez les délinquants
sexuels peut être utile pour déterminer les besoins de traitement et la forme de
traitement adaptée.
Ainsi, les délinquants à faible risque (qui obtiennent un score maximal de 0,17 sur
l'instrument) pourraient bénéficier de programmes à faible intensité ou
même ne recevoir aucun traitement. Les délinquants à risque élevé (qui
obtiennent un score d'au moins 0,35) pourraient être aiguillés vers des programmes de
traitement prélibératoires et faire l'objet, après leur mise en liberté,
d'une surveillance étroite.