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Suivi auprès des participants au Programme pour délinquants violents du district de Vancouver

Au début de 1996, la Direction de la recherche du Service correctionnel du Canada a mené une étude de suivi auprès des délinquants participant au programme de l'Unité pour délinquants violents (UDV) du district de Vancouver. Ce programme pilote portant sur la gestion des délinquants violents sous surveillance dans la collectivité a été mis sur pied au début de 1994 dans le but d'assurer une surveillance intensive des délinquants chroniquement violents qui sont placés dans la collectivité.

Méthodes et données

Paramètres de l'étude

La période de suivi correspondait uniquement aux six premiers mois suivant l'admission au programme (déterminée en fonction de la date de la saisie des données), puisqu'il s'agissait de la période minimale d'examen pouvant s'appliquer à l'ensemble des délinquants. Toutefois, à ce moment-là, certains des premiers participants au programme avaient été sous surveillance depuis près de deux ans.

Bien que la plupart des échecs suivant la mise en liberté sous condition se produisent dans les six premiers mois, des recherches antérieures ont révélé qu'un pourcentage appréciable de délinquants échouent plus tard2.

L'étude a porté sur l'ensemble des 73 délinquants qui ont été admis au programme depuis janvier 1994, soit la date d'instauration du programme, selon la répartition suivante :
34 ont été admis en 1994, 38 en 1995, un participant admis en 1994 a été réadmis après un échec initial et trois autres, admis au début de janvier 1996, ont été intégrés au groupe de 1995. La liste des participants a été établie en janvier 1996 de façon à ce que l'on puisse avoir une période de suivi minimale de six mois. Le tableau 1 présente la ventilation par période d'admission au programme.


Tableau 1

Ventilation selon la période d'admission dans le programme
Période
d'admission
au programme
Total des
admissions au
programme
Répartition
admissions au
programme(%)
1994
34
46
1995
40
54
Total Cumulatif
74*
100
Remarque: * LEs 74 admissions incluent un délinquant admis
deux fois, deux années consécutives

Les données sur la réincarcération dont on avait besoin pour l'analyse de suivi ont été recueillies en août 1996. À ce moment-là, au moins six mois s'étaient écoulés pour tous les délinquants depuis leur mise en liberté, et pour 46 % des participants, il s'était écoulé un an depuis leur libération.

Collecte des données

La liste des participants au programme a été fournie par le personnel de la région du Pacifique et a servi à compiler des données sur le profil des délinquants et sur la récidive tirées du Système de gestion des détenus (SGD) du Service correctionnel du Canada, ainsi que des données sur les antécédents criminels tirées du système de la Gendarmerie royale du Canada3.

Par échec, on sous-entendait aussi toute révocation ou suspension imposée durant la période de participation au programme. Tous les échecs ont été datés et catégorisés. On a vérifié que toutes les dates de réincarcération étaient postérieures à l'admission au programme de l'UDV. On a aussi distingué deux types d'échec, soit avec ou sans condamnation pour une nouvelle infraction.

L'étude a porté sur les échecs survenus dans les six premiers mois (et, pour un sous-échantillon, dans l'année) suivant la mise en liberté. Le groupe a également été comparé à d'autres populations de référence (délinquants mis en liberté après avoir participé à un programme en établissement pour délinquants violents à risque élevé de la région du Pacifique et un groupe témoin composé de délinquants présentant les mêmes caractéristiques mais n'ayant pas été traités).

Profil des délinquants
participant à l'UDV

Le programme de l'UDV vise à assurer une surveillance intensive (comportant au moins deux séances thérapeutiques par semaine) des délinquants violents à risque élevé qui sont placés dans la collectivité.

Le Service correctionnel du Canada devrait offrir des programmes correctionnels intensifs (en établissement ou dans la collectivité) aux délinquants dont le risque et les besoins ont été jugés les plus élevés. Plusieurs critères peuvent servir à déterminer quels sont les délinquants violents qui présentent un risque élevé, comme &laqno;l'infraction principale» à l'origine de la peine actuelle, les antécédents criminels du délinquant, lorsqu'ils comprennent de nombreuses condamnations ou des condamnations pour des infractions de violence graves, et les résultats produits par des outils actuariels d'évaluation du risque (p. ex., résultats obtenus sur l'Échelle d'information statistique sur la récidive ou Échelle d'ISR).

Condamnations pour infractions de violence

Dans une étude parallèle portant sur un programme pour le traitement en établissement des délinquants violents, Motiuk et ses collègues ont examiné l'infraction à l'origine de la peine actuelle et les scores obtenus sur l'Échelle d'ISR par les participants à risque élevé (les catégories d'infractions de violence utilisées étaient l'homicide, l'infraction sexuelle, le vol qualifié et les voies de fait)4. Le tableau 2 présente une ventilation analogue des participants à l'UDV selon le type de crime de violence et le niveau de risque, déterminé en fonction du résultat obtenu sur l'Échelle d'ISR.


Tableau 2

Participants au programme des délinquants violents de Vancouver
 
Niveau de risque* (%)
Trés élevé
Élevé
Moyen
Faible
Trés faible
Type d'infraction(n)
20
13
7
0
60
Meurtre (15)
0
22
33
22
22
Homicide
involontaire (9)
38
29
25
4
4
Vol qualifié (23)
38
29
25
4
4
Voies de fait (19)
42
5
26
11
16
Autres infractions(3)
33
0
0
33
33
Remarque: * Le niveau de risque est basé sur le score obtenu par le délinquant sur l'échelle d'ISR

Les dossiers des délinquants révèlent que, pour le tiers (34 %) d'entre eux, l'infraction principale à l'origine de la peine actuelle consiste en un homicide (pour 21 % en un meurtre, et pour 13 % en un homicide coupable involontaire), pour un autre tiers, en un vol qualifié (34 %), pour environ le quart, dans des voies de fait (27 %) et pour le 4 % restant, dans une infraction sans violence. De plus, presque la moitié des participants à l'UDV (47 %) étaient considérés comme présentant un risque &laqno;élevé» ou &laqno;très élevé».

Notre examen des antécédents criminels des participants a confirmé cette constatation. Comme on peut le voir au tableau 3, ces délinquants avaient accumulé collectivement plus de 1 300 condamnations, dont 222 pour des infractions de violence.


Tableau 3

Antécédents criminels des participants
Totaux cumulatifs des condamnations de tous les participants *
Nombre

Homicide
   Meurtre
   Homicide involontaire
Vol qualifié
Infractions sexuelles
Voies de fait

30
18
12
103
2
87
Total des condamnations pour crimes de violence
222
Total de toutes les condamnations pour crimes de violence & autres
1,363
Délinquants condamnés pour un crime de violence
67
Remarque: * Les antécédents criminels étaitent connus pour 70 des 73 délinquants

Plus de 95 % des délinquants (67 sur 70 des délinquants dont nous avons trouvé le dossier) participant au programme de l'UDV avaient été condamnés au moins une fois pour un crime de violence. Les dossiers sur les condamnations criminelles de la Gendarmerie royale du Canada révèlent également que ces délinquants comptaient des condamnations pour 30 homicides et, au total, 103 condamnations pour vol qualifié et 87 pour voies de fait.

On a aussi relevé passablement d'échecs antérieurs en ce qui concerne la surveillance, le cautionnement ou d'autres aspects. Les deux tiers des participants (46) avaient été condamnés pour avoir déjà commis des inconduites, notamment pour violation des conditions de la liberté sous condition (29), défaut de comparaître (22), être illégalement en liberté (20) ou évasion (18). Collectivement, ils ont accumulé 190 condamnations de ce genre.

Ces données montrent clairement que les participants au programme de l'UDV sont des délinquants ayant de longs antécédents de comportement avec violence ou d'autres types de comportement à risque élevé.

Peine actuelle sous responsabilité fédérale

Le nombre de condamnations pour inconduite antérieure montre qu'on a affaire à une population qui a eu de nombreux démêlés avec les tribunaux et le système correctionnel. Les détenus inclus dans cette étude purgeaient entre leur première et leur septième peine sous responsabilité fédérale, la grande majorité d'entre eux (93 %) purgeant leur première à leur troisième peine sous responsabilité fédérale. Près de la moitié (47,9 %) en étaient à leur première peine et le tiers (33,8 %), à leur seconde peine.

Résultats postlibératoires

Comme le révèle le tableau 4, seulement 13 (18 %) des participants au programme de l'UDV ont échoué dans l'année suivant leur mise en liberté. Ce taux ne fait pas entrer en ligne de compte la longueur de la période sous surveillance des participants.


Tableau 4

Nombre total d'échecs dans l'année suivant la mise en liberté
 
Fréquence
(%)

Aucun .chec

61
82,5
échec
13
17,5
Total*
74
100
Remarque: * Y compris un participants admis deux lois au programme

Taux d'échec durant les six premiers mois

En uniformisant à six mois la période sous surveillance éventuelle (voir le tableau 5), l'on constate que le taux d'échec oscillait autour de 15% (11 échecs). Il suffit d'examiner chaque groupe séparément, en fonction du moment auquel il a été admis dans le programme, pour constater que le taux d'échec pour chaque période d'admission dans le programme variait entre 30 % et 5 % et qu'il n'y avait aucun échec parmi les trois participants qui ont été admis dans le programme en janvier 1996.


Tableau 5

Échecs durant les six premiers mois (jusqu'à août 1996)
Période d'admission
au programme
Nbre de
délinquants admis
Proportion de
délinquants admis (%)
Nbre
d'échecs
Proportion
des échec(%)

anvier-juin 1994

24
32
4
17
Juillet-décembre 1994
10
14
3
30
Janvier-juin 1995
21
28
3
5
Juillet-décembre 1995
19
26
1
5
Total cumulatif
74*
100
11
15
Remarque: * Y compris un participant admis deux fois

Un examen des dossiers inclus dans le Système de gestion des détenus pour les 11 cas de réincarcération révèle que dans 10 cas, il s'agissait d'une révocation de la mise en liberté et dans un cas, d'une interruption de la mise en liberté. Dans les 10 cas de révocation, aucune nouvelle infraction n'a été commise.

Taux d'échec comparés

Une comparaison permet de mieux comprendre ces taux d'échec. Dans une étude récente5, on a examiné les taux d'échec de délinquants qui avaient achevé un programme intensif pour le traitement des délinquants violents offert au Centre de santé régional de la région du Pacifique; 60 délinquants ont été mis en liberté et ont fait l'objet d'un suivi. On a également utilisé un groupe témoin, un échantillon de délinquants présentant les mêmes caractéristiques mais n'ayant pas été traités qui ont obtenu leur mise en liberté6.

Au cours de la période de suivi de six mois après la mise en liberté, les taux d'échec des délinquants violents à risque élevé ayant participé au programme de l'UVD dans la collectivité et ceux des délinquants n'ayant pas été traités et ayant obtenu leur liberté étaient identiques (15 %). Le taux d'échec des délinquants ayant participé au traitement offert au Centre de santé régional de la région du Pacifique était à peine plus élevé (17 %). Les résultats sont présentés au tableau 6.


Tableau 6

Délinquants réincarérés dans les six premiers mois - trois populations à risque élevé
Programme
Nbre
admissible
Échecs
Taux
d'échec (%)

Groupe sous surveillance intensive
dans la collectivité de l'UDV

74
11
15
Groupe de traitement intensif en
établissement du CSR
44
9
17
Groupe de délinquants appariés
non traités et mis en liberté
45
8
15

Faible risque et résultats

Cette étude confirme de nouveau que les évaluations du risque, basées principalement sur les antécédents criminels, peuvent être utilisées pour prévoir la récidive suivant la mise en liberté. Aucun échec n'a été enregistré parmi les participants qui, d'après leurs scores sur l'échelle d'ISR, étaient considérés comme présentant un risque &laqno;faible» ou &laqno;très faible» pendant la période de suivi de six mois postérieure à la mise en liberté. En ce qui concerne les 11 délinquants qui ont échoué, sept (64 %) présentaient un risque &laqno;très élevé» ou &laqno;élevé», tandis que les quatre autres (36 %) présentaient un risque &laqno;moyen». L'absence d'échecs attribuables à la perpétration d'une nouvelle infraction semble indiquer qu'une surveillance intensive et la prestation de programmes dans la collectivité peuvent réduire efficacement le risque pour la société.

Nouvelles voies de recherche

Le programme très intensif offert en établissement et le programme de surveillance très intensive dans la collectivité de l'UDV visent principalement les délinquants à risque élevé (selon le principe du risque)7. Ces deux programmes de traitement ont un certain succès mesurable. Les taux d'échec des deux groupes traités à risque élevé ressemblent à ceux des délinquants non traités qui sont mis en liberté. Seuls quelques membres du groupe du Centre de santé régional de la région du Pacifique ont vu leur liberté révoquée pour avoir commis une nouvelle infraction (11 en tout), tandis qu'aucun des participants au programme de l'UVD
n'a été réincarcéré pour avoir récidivé.

Cette enquête révèle de nouvelles voies de recherche possibles. Il faudrait examiner de plus près la relation entre les programmes très intensifs offerts en établissement et les programmes communautaires afin de déterminer comment on peut renforcer dans la collectivité les avantages procurés par les programmes spécialisés administrés en établissement. Dans cette étude, seulement six des délinquants qui avaient participé au programme du Centre de santé régional de la région du Pacifique ont également pris part au programme communautaire de l'UDV. De plus, la mise en place du nouveau système d'évaluation initiale du Service correctionnel du Canada aidera à faire le lien entre les besoins des délinquants et les programmes correctionnels. Nous nous attendons à ce qu'elle améliore sensiblement la gestion du risque que présentent les délinquants.

1. 340, av. Laurier ouest, Ottawa (Ontario) K1A 0P9.

2. NOUWENS, T., MOTIUK, L. et BOE, R., &laqno;Le taux de récidive détaillé», Forum ­ Recherche sur l'actualité correctionnelle, vol. 5, no 3, 1993. D'après nos autres recherches, il semble qu'environ 60 % des échecs se produisent dans les six mois suivant la date de mise en liberté et environ 90 % dans l'année qui la suit.

3. Cette information est particulièrement importante puisqu'elle révèle que des peines imposées pour des crimes de violence peuvent avoir été purgées sous responsabilité provinciale ou dans le système pour jeunes contrevenants.

4, 5 & 6. MOTIUK, L., SMILEY, C. et BLANCHETTE, K., &laqno;Programmes intensifs pour les délinquants violents : enquête comparative», Forum ­ Recherche sur l'actualité correctionnelle, vol. 8, no 3, 1996. Ce

programme spécialisé repose sur l'utilisation d'une démarche cognitivo-comportementale et psychosociale pour changer le comportement antisocial des délinquants. Il dure environ huit mois. Le groupe témoin était constitué de délinquants à peu près dans la même situation et équivalents pour ce qui est de la date de mise en liberté, de l'âge et de la durée de la peine. Un des auteurs, Kelley Blanchette, a effectué une analyse spéciale pour nous permettre de faire ces comparaisons six mois après la date de mise en liberté.

7. ANDREWS, D.A., &laqno;Il est possible de prévoir et d'influencer la récidive : utiliser des outils de prédiction du risque afin de réduire la récidive», Forum ­ Recherche sur l'actualité correctionnelle, vol. 1, no 2, 1989. Comme Andrews l'a fait observer : &laqno;...le principe du risque propose des services plus élaborés pour les cas à risque élevé».