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Réponse au traitement, intervention et réinsertion sociale : un modèle théorique

Cet article souligne les concepts pertinents à la réponse au traitement2 et intègre ceux-ci dans la stratégie de gestion du risque en vue de la réinsertion sociale des délinquants. Dans ce contexte, la réponse au traitement est un ensemble formé de l'état de préparation au traitement et des résultats du traitement, et se définit comme les facteurs qui influent sur l'intervention3. Une intervention efficace réduit le risque et accroît la probabilité d'une réinsertion sociale réussie.4 Dans cet article, la réinsertion sociale s'applique aux transferts dans un établissement à sécurité réduite et à la mise en liberté discrétionnaire dans la collectivité. Une participation aux programmes couronnée de succès est un indicateur qui permet de supposer que le délinquant est susceptible de réussir sa réinsertion sociale5.

Le modèle proposé met l'accent sur l'évaluation systématique du risque et des besoins6 afin de déterminer les besoins d'un délinquant en matière de traitement, y compris l'intensité du traitement qui convient. Ces renseignements servent de point d'ancrage de la stratégie générale de gestion du risque que présente un délinquant en indiquant au personnel correctionnel les objectifs en matière d'interventions ainsi que le meilleur cadre d'exécution des programmes. En général, les programmes devraient être offerts au début de la peine pour assurer une bonne préparation de cas. En outre, l'ordre d'exécution des programmes influe probablement sur la réponse du délinquant au traitement.

Des évaluations structurées de l'état de préparation au traitement et des résultats du traitement peuvent permettre d'établir un indice composé des interventions efficaces. De plus, les résultats du traitement constituent une mesure intermédiaire de la réussite qui est essentielle à la gestion efficace des délinquants pendant qu'ils purgent leur peine. Il reste cependant à démontrer le rapport entre ces mesures intermédiaires et la réussite de la mise en liberté.

Contexte

Même si de plus en plus de données montrent qu'une intervention correctionnelle adéquate réduit la récidive7, on ne dispose pas encore de méthode standardisée permettant de tenir compte des renseignements sur le traitement dans les estimations du potentiel de réinsertion sociale. Sans une telle stratégie, le personnel correctionnel doit émettre des hypothèses sur l'efficacité d'une intervention auprès d'un délinquant donné et sur ses capacités de réinsertion sociale -- situation qui pourrait accroître le nombre d'erreurs de décision. Les services correctionnels ont pour objet de réduire au minimum ce genre d'erreur, et une intervention efficace est considérée comme une bonne façon d'augmenter le potentiel de mise en liberté.

Les principes des programmes correctionnels efficaces sont bien connus8 et ne seront pas répétés ici. Les examens d'homologation déterminent dans quelle mesure les programmes traduisent ces principes. Le modèle proposé suppose que les programmes doivent s'inspirer de ces principes pour produire des interventions efficaces9.

Les besoins en matière de traitement et la motivation des délinquants varient; par conséquent, leurs réponses aux interventions diffèrent, et l'on ne sait pas exactement comment intégrer les résultats de leur traitement aux décisions relatives à leur mise en liberté. L'élaboration d'une méthode d'évaluation structurée constituerait un bon départ, mais le personnel devrait continuer de suivre un modèle complet. Comme l'utilité du traitement10 et la validité de la prise de décision clinique font de plus en plus l'objet d'un débat11, la Direction de la recherche a élaboré des mesures précises de l'état de préparation au traitement et des résultats du traitement12.

Cet article décrit une stratégie d'intégration des renseignements sur le traitement aux stratégies de gestion du risque. L'efficacité d'un tel modèle influera sur la réinsertion sociale des délinquants orientés vers une intervention correctionnelle. Le modèle est présenté maintenant pour susciter de l'intérêt à l'égard de sa validation et de l'élaboration de stratégies de rechange.

Description

Les éléments essentiels du modèle sont les suivants : évaluations du risque et des besoins avant le traitement, évaluation de l'état de préparation au traitement ou de la motivation et évaluation de la participation au traitement et des avantages obtenus. Les deux derniers éléments sont combinés pour traduire la réponse au traitement13. Les évaluations du risque devraient indiquer les facteurs criminogènes du délinquant et les variables associées au risque de récidive. Même si les besoins liés aux facteurs criminogènes individuels sont généralement dynamiques, les échelles actuarielles portent souvent sur les facteurs statiques14, et l'on préfère fonder l'évaluation du risque sur les estimations actuarielles ou statistiques des probabilités de récidive. Cependant, il n'est pas clairement entendu que les échelles actuarielles peuvent fournir des points de démarcation qui aident les utilisateurs à déterminer les erreurs de décision qui entraînent divers genres de résultats pour divers scores15.

Prochaska et ses collègues décrivent le concept de l'état de préparation au traitement16. Miller17 examine également l'importance que revêt la motivation pour l'efficacité du traitement et décrit la technique d'entrevue motivationnelle18. La meilleure étude de l'état de préparation des délinquants au traitement a été effectuée auprès des toxicomanes19. Ces travaux sont prometteurs, mais ils n'ont pas encore permis de produire des mesures d'auto-évaluation fiables et valides de l'état de préparation au traitement qui s'appliquent aux délinquants. Selon d'autres travaux de recherche, les évaluations cliniques structurées établies au moyen de référents comportementaux pourraient servir à surmonter les difficultés de désirabilité sociale inhérentes à ces évaluations20. La motivation constitue alors une variable importante de la façon dont un délinquant répondra au traitement. Sur le plan clinique, cela s'est traduit par des efforts visant à mieux faire correspondre le traitement et les besoins thérapeutiques au sein de diverses populations réfractaires21.

Il a été démontré que certains aspects des avantages du traitement jouent un rôle important dans la détermination des résultats chez les délinquants sexuels22 et les toxicomanes23. D'après des études récentes, on peut procéder à des évaluations structurées de la participation au traitement et des avantages obtenus pendant les travaux effectués dans le cadre des évaluations du risque avant le traitement pour prévoir la récidive24. Étant donné que ces travaux doivent pouvoir être mis à l'essai rapidement et être pertinents sur le plan opérationnel, une définition restreinte de la réponse au traitement a été proposée dans le modèle25. La combinaison de l'état de préparation au traitement motivation et participation et les résultats mesures comportementales de la participation au traitement et des avantages sont additionnés et constituent la réponse au traitement.

Les travaux de la Direction de la recherche mettront à la disposition du personnel chargé du traitement des lignes directrices fondées sur une approche comportementale pour l'évaluation de l'efficacité de certaines interventions. Ces mesures font l'objet de projets pilotes et devraient être présentées aux cliniciens et au personnel chargé de l'exécution des programmes pour qu'ils s'en servent à des fins opérationnelles.

Tableau 1

Indices de l'état de préparation au traitement
1. Reconnaissance du probléme
2. Établissement d'objectifs
3. Motivation
4. Auto-évaluation
5. Attentes
6. Constance comportementale
7. Opinions au sujet du traitement
8. Auto-efficacité
9. Dissonance
10. Soutien externe
11. Élement affectif

Tableau 2

Indices des résultats du traitement
1. Connaissance du contenu du programme
2. Acquisition de compétences
3. Divuigation
4. Confidence
5. Application des connaissances
6. Application des compétences
7. Compréhension de la criminalité
8. Motivation
9. Introspection
10. Assidudé
11. Comportement perturbateur
12. Pertinence
13. Profondeur de la compréhension affective
14. Participation

Règles de décision

L'étape suivante consiste à établir des lignes directrices explicites pour réintégrer l'évaluation du risque et les mesures de traitement afin de déterminer le potentiel d'intégration avec précision. Sans ces lignes directrices, il y a de fortes possibilités d'erreur de jugement.

Selon les recherches, il y a un lien entre l'intensité du traitement et les évaluations du risque et des besoins avant le traitement26 -- il faudrait réserver les interventions plus intensives aux délinquants à risque plus élevé et à besoins plus grands. Le modèle actuel ne traduit pas cet aspect de l'intervention, en partie parce qu'il y a peu de programmes hiérarchiques disponibles. Le modèle a été conçu pour être utilisé avec des programmes de base c.-à-d., compétences psychosociales et toxicomanie, pour lesquels une intervention donnée figure dans le plan correctionnel et les besoins liés aux facteurs criminogènes ont été définis. Dans une certaine mesure, le niveau de sécurité du délinquant permet actuellement de faire face au risque lorsqu'il y a intervention.

Figure 1

Figure 2

Après qu'un délinquant ait été orienté vers un programme de traitement correctionnel, il passe une entrevue en vue de son admission. S'il est admis, le personnel chargé du traitement évalue son état de préparation au traitement les indices des mesures de traitement figurent au Tableau 1. Le modèle actuel indique les cotes générales d'un traitement faible, moyen ou élevé. De même, les résultats du traitement peuvent être évalués voir la Figure 1 comme étant faibles, moyens ou élevés. La Figure 2 présente un modèle prudent de réponse au traitement. Par exemple, un état de préparation faible et de piètres résultats dénotent un niveau de réponse faible. Un état de préparation élevé et des résultats élevés indiquent un niveau de réponse élevé. Toute autre combinaison produit une cote générale moyenne, qui révèle une évaluation judicieuse de la réponse.

On combine la réponse au traitement et les évaluations du risque pour déterminer le potentiel de réinsertion sociale du délinquant ou la stratégie de gestion du risque voir Figure 2. Les cotes de réponse et de risque faibles, moyennes ou élevées sont inversées et indiquent qu'un niveau de réponse élevé et un niveau de risque faible constituent la situation préférée, qui suscite le moins de préoccupations sur le plan de la gestion du risque et qui, par conséquent, révèle le potentiel de réinsertion sociale le plus élevé.

Pour éviter de surestimer l'efficacité de l'intervention, les cellules ont reçu une pondération différente, même s'il faut procéder à cette fin à une validation. C'est-à-dire qu'un niveau de réponse faible ou moyen combiné à un niveau de risque élevé se traduit par un niveau élevé de préoccupations sur le plan de la gestion du risque, comme c'est le cas pour un niveau de réponse faible et un niveau de risque moyen. Un niveau de réponse élevé et un niveau de risque élevé ou moyen se traduisent par un niveau moyen de préoccupation sur le plan de la gestion du risque. Un niveau de réponse faible et un niveau de risque faible se traduisent par un niveau faible de préoccupation sur le plan de la gestion du risque, mais indiquent probablement que le délinquant devrait être placé dans un établissement à sécurité minimale. Un niveau de réponse moyen et élevé et un niveau de risque faible se traduisent par un niveau faible de préoccupation sur le plan de la gestion du risque et indiquent que le délinquant devrait être placé dans un établissement communautaire ou dans un établissement à sécurité minimale. L'écart entre ces deux dernières catégories pourrait refléter les facteurs comme la proportion de la peine purgée, la disponibilité de programmes dans la collectivité et les facteurs de risque dynamiques.

Essai du modèle

Même s'il est empirique, ce modèle fournit un ensemble de règles de décision permettant de tenir compte des renseignements relatifs au traitement dans les stratégies de gestion du risque et, par conséquent, il établit un lien entre l'intervention et le potentiel de réinsertion sociale. Cette approche est préliminaire et devrait faire l'objet de travaux théoriques plus poussés. Le modèle suppose qu'un délinquant a terminé un programme de traitement. Ce n'est pas toujours le cas, et les mesures de l'état de préparation au traitement ou la réponse préalable à l'intervention p. ex., dans une autre province peuvent être les seuls renseignements disponibles sur le traitement. L'utilisation de tels indices pour la mesure de la réponse au traitement peut limiter considérablement l'utilité du modèle. De toute évidence, le modèle doit être validé; à cette fin, il faut entreprendre le projet pilote initial sur les mesures du traitement27 et examiner les points de démarcation des cotes cliniques. Néanmoins, il doit au moins susciter de l'intérêt dans l'élaboration de stratégies pour la prise en considération systématique des facteurs d'intervention dans la prise de décision correctionnelle.


1. 340, avenue Laurier Ouest, Ottawa Ontario K1A 0P9.

2. BONTA, J., «Le principe de la réceptivité et la réadaptation du délinquant» Forum - Recherche sur l'actualité correctionnelle, Vol. 7, no 3, 1995, p. 34-37. Voir également SERIN, R. et KENNEDY, S., La disponibilité et la réceptivité face au traitement et leur contribution à l'efficacité des programmes correctionnels, Rapport de recherche R-54, Ottawa, Service correctionnel du Canada, 1997.

3. SERIN, et KENNEDY, La disponibilité et la réceptivité face au traitement et leur contribution à l'efficacité des programmes correctionnels.

4. ANDREWS, D. et BONTA, J., The Psychology of Criminal Conduct, Cincinnati Ohio, Anderson Publishing, 1994.

5. LUCIANI, F., Security Classification of Offenders: Development of Reclassification Protocols, Ottawa, Service correctionnel du Canada. Sous presse.

6. BROWN, S. et SERIN, R., Situating Risk Assessments into Offender Reintegration: A Consumer's Guide en cours de rédaction. Voir également SERIN, R., «Évaluation et prévision du comportement violent chez les délinquants», dans LEIS, T. A., MOTIUK, L. L., et OGLOFF, J. R. P. dir., Psychologie médico-légale : politique et pratiques en milieu correctionnel, Ottawa, Service correctionnel du Canada, 1995, p. 73-98.

7 & 8. ANDREWS et BONTA, The Psychology of Criminal Conduct. Voir également. McGUIRE, H., What Works: Reducing Reoffending. Guidelines from Research and Practice, Toronto, Wiley and Sons, 1995 et SERIN, R., et BROWN, S., «Stratégies proposées pour améliorer les traitements offerts aux délinquants violents», Forum - Recherche sur l'actualité correctionnelle, Vol. 8, no 3, 1996, p. 45-58.

9. GENDREAU, P., «The Principles of Effective Intervention with Offenders» dans HARLAND, A. T., dir., Choosing Correctional Options that Work: Defining the Demand and Evaluating the Supply, Thousand Oaks Californie, Sage, 1996, p. 117-130.

10. QUINSEY, V. L., RICE, M. E., HARRIS, G. T. et LALUMIÈRE, L. M.,. «Assessing Treatment Efficacy in Outcome Studies of Sex Offenders », Journal of Interpersonal Violence, Vol. 8, 1993, p. 512-523.

11. WEBSTER, C. D., HARRIS, G. T., RICE, M. E., CORMIER, C. et QUINSEY, V. L., The Violence Predictions Scheme: Assessing Dangerousness in High Risk Men, Toronto, Centre for Criminology, Université de Toronto, 1994.

12. SERIN et KENNEDY, La disponibilité et la réceptivité face au traitement et leur contribution à l'efficacité des programmes correctionnels.

13. BONTA, «Le principe de la réceptivité et la réadaptation du délinquant». Voir également SERIN et KENNEDY, La disponibilité et la réceptivité face au traitement et leur contribution à l'efficacité des programmes correctionnels.

14. SERIN, «Évaluation et prévision du comportement violent chez les délinquants».

15. BROWN et SERIN, Situating Risk Assessments into Offender Reintegration.

16.> PROCHASKA, J. O., DICLEMENTE, C. C. et NORCROSS, J. C., «In Search of How People Change: Applications to Addictive Behaviors», American Psychologist, Vol. 47, 1992, p. 1102-1114.

17. MILLER, W. R., «Motivation for Treatment: A Review with Special Emphasis on Alcoholism», Psychological Bulletin, Vol. 98, 1985, p. 84-107.

18. MILLER, W. R., et ROLLNICK, S., Motivational Interviewing, New York, Guilford, 1991.

19. WEEKES, J. R., MOSER, A. E. et LANGEVIN, C. M., Assessing Substance Abusing Offenders for Treatment, document présenté à l'International Community Corrections Association Conference. Cleveland Ohio, 1997.

20. HEILRUN, K. S., BENNETT, W. S., EVANS, J. H., OFFULT, R. A., REIFF, H. J. et WHITE, A. J., «Assessing Treatability in Mentally Disordered Offenders: Strategies for Improving Reliability», Forensic Reports, Vol. 5, 1992, p. 85-96. Voir également SERIN et KENNEDY, «La disponibilité et la réceptivité face au traitement et leur contribution à l'efficacité des programmes correctionnels».

21. PRESTON, D. L. et MURPHY, S., «La motivation en thérapie des clients qui résistent au traitement», Forum - Recherche sur l'actualité correctionnelle, Vol. 9, no 2, 1997, p. 39-43. Voir également BARBAREE, H. E., «Déni de la réalité et minimisation par les délinquants sexuels : Évaluation et résultats du traitement», Forum - Recherche sur l'actualité correctionnelle, Vol. 3, no 4, 1991, p. 30-33. Voir également SERIN, R., «Aptitude des criminels psychopathes à répondre au traitement», Forum - Recherche sur l'actualité correctionnelle, Vol. 7, no 3, 1995, p. 23-26.

22. MARQUES, J. K., DAY, D. M., NELSON, C. et WEST, M. A., «Effects of Cognitive-Behavioral Treatment on Sex Offender Recidivism: Preliminary Results of a Longitudinal Study», Criminal Justice and Behavior, Vol. 21, 1994, p. 28-54.

23. MILLSON, W. A., WEEKES, J. R. et LIGHTFOOT, L. O., Le Programme prélibératoire pour toxicomanes : Analyse des résultats intermédiaires et postlibératoires, Rapport de recherche R-40, Ottawa, Service correctionnel du Canada, 1995.

24. BARBAREE, H. E., SETO, M. C. et MARIC, A., Sex Offender Characteristics, Response to Treatment, and Correctional Release Decisions at the Warkworth Sexual Behaviour Clinic, Rapport de recherche, Toronto, Forensic Division, Clarke Institute of Psychiatry, 1996.

25. SERIN et KENNEDY, «La disponibilité et la réceptivité face au traitement et leur contribution à l'efficacité des programmes correctionnels».

26. ANDREWS et BONTA, The Psychology of Criminal Conduct.

27. SERIN et KENNEDY, «La disponibilité et la réceptivité face au traitement et leur contribution à l'efficacité des programmes correctionnels».