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Types de traitement et de guérison à apporter aux délinquants sexuels autochtones :Tracer la voie à suivre en fonction des caractéristiques de chacun
Lawrence A. Ellerby1
Forensic Behavioral Management Clinic; Native Clan Organization
Depuis 1987, la Forensic Behavioral Management Clinic (FBMC) de la Native Clan Organization du Manitoba offre des services de traitement et dévalua-tion aux Autochtones et non Autochtones ayant des antécédents de délinquance sexuelle. À nos débuts, nous croyions que les délinquants autochtones envoyés au programme avaient des besoins criminogènes différents de ceux des autres délinquants2. Pour ces personnes, la gestion efficace du risque de récidive à long terme semble passer idéalement par un alliage de traitements pour délinquants sexuels et de processus de rétablissement adaptés à leur culture. Lévolution et la mise en application de cette forme de gestion ont par ailleurs déjà été entièrement décrites et documentées3.
Pour nous assurer de la pertinence de cette approche et pour nous aider à créer dautres programmes, nous avons constitué une banque de données sur notre clientèle. Cette banque de données comprend 235 variables sélectionnées à la suite de consultations avec les employés de la FBMC, y compris des auxiliaires en spiritualité autochtone, et daprès la lecture de rapports, détudes et dautres écrits. Les regroupements que lon retrouve dans cette banque de données sont les suivants : caractéristiques des délinquants en général, caractéristiques particulières aux délinquants autochto-nes, antécédents juvéniles et sociaux, antécédents criminels, antécédents et habitudes de délinquance sexuelle, participation aux traitements et leurs résul-tats. Nous avons ensuite établi les différences et les ressemblances entre les délinquants adultes autochtones et non autochtones qui ont participé aux programmes de traitement en établissement ou dans la collectivité de la FBMC4.
Contrairement à la perception négative quont certains groupes ou particuliers autochtones de ce genre de recherche comparative, notre objectif dans la réalisation de cette étude nétait pas de comparer les délinquants autochtones et non autochtones dans le simple but de les comparer, ni de «décortiquer» ou danalyser les délinquants autochtones, ni de juger les uns par rapport aux autres. Notre but était plutôt de mieux cerner et de mieux comprendre les différences et les ressem-blances entre les délinquants autochtones et non autochtones pour nous aider à déterminer quel type de traitement convient le mieux à chacun et de les aider ainsi à mieux gérer leur risque de récidive et à mieux vivre au sein de la société. Cet article présente certaines des constatations de nos recherches et leurs répercussions sur le traitement des délinquants sexuels autochtones.
Échantillon
La banque de données comprenait 303 cas de délinquants sexuels adultes envoyés à la FBMC pour participer aux programmes de traitement en établissement ou dans la collectivité. La plupart de ces délinquants (82 %) ont été envoyés par les pénitenciers et les bureaux de libération condition-nelle du Service correctionnel du Canada (SCC). Les autres renvois (18 %) proviennent de différents endroits, tels que le Ministère de la Justice du Manitoba, les Services de probation, les Services à lenfant et à la famille de Winnipeg et les ministè-res provinciaux de la Santé mentale et des Services à la famille. Dans léchantillon, on retrouve 121 (40 %) Autochtones et 182 (60 %) non Autochtones. Les 21 délinquants métis (7 %) et le seul Inuit (0,3 %) ont été assimilés au groupe des Autochto-nes, étant trop peu nombreux pour former des catégories distinctes.
Constatations
Caractéristiques et identité culturelle des délinquants autochtones
La majorité des Autochtones de notre échantillon ne parlent que langlais (55 %). Des autres qui connaissent une langue autochtone, la plupart parlent le cri (23 %), suivi de lojibway (11 %) et du saulteux (6 %), ce qui est représentatif des langues parlées dans la région. La majorité des délinquants autochtones de léchantillon ont grandi dans une réserve (61 %), mais un grand nombre sont ensuite partis vivre en milieu urbain (49 %). Seulement quelques-uns (15 %) considèrent avoir été éduqués en respect des traditions de leur communauté, par un apprentissage des cérémonies et des murs culturelles et spirituelles. Le passage par une éducation traditionnelle est important à considérer dans cette recherche, car il révèle le niveau dac-culturation des Autochtones et linfluence de la colonisation. Cela nous permet dévaluer la nécessité et la pertinence de programmes adaptés à la culture de ces délinquants. Par ailleurs, très peu dAutochtones du groupe sont passés par un pensionnat (9 %, n = 11), vraisemblablement parce que la plupart dentre eux sont trop jeunes pour avoir connu ce genre détablissement. De ceux qui ont été placés dans un pensionnat, presque tous ont déclaré y avoir subi des mauvais traitements physiques (91 %) ou psychologiques (82 %), et plus dun tiers (36 %) affirment avoir été victimes dabus sexuels.
Antécédents juvéniles et sociaux
En ce qui a trait aux antécédents juvéniles et sociaux, léchantillon de la FBMC présente des différences importantes entre les délinquants autochtones et non autochtones. En effet, alors que les deux groupes ont vécu des expériences difficiles ou traumatisantes au cours de leur jeunesse, ces expériences savèrent généralement plus intenses chez les Autochtones. Alors que la majorité des délinquants disent avoir été élevés par leurs deux parents, les Autochtones sont plus nombreux à avoir été élevés par des parents éloignés ou à avoir vécu la séparation ou même labandon de leurs parents (69 % contre 52 %). Ils sont par ailleurs plus nombreux à avoir vécu le suicide ou le meurtre dun parent. Les Autochtones sont aussi plus nombreux à avoir connu un parent toxicomane (81 % contre 57 %) ou délinquant (48 % contre 23 %). Finalement, ils sont plus nombreux à avoir connu ou à avoir été témoins de violence familiale ou de murs sexuelles incorrectes.
Dans lensemble, un pourcentage important des délinquants déclare avoir été victime de diffé-rents types de mauvais traitements durant leur enfance : violence physique (65 %), abus sexuels (57 %), violence psychologique (64 %) ou négli-gence (32 %). Nous navons pas constaté de différences significatives entre les Autochtones et les non Autochtones quant à lexposition à la violence physique ou psychologique. Toutefois, les Autochtones ont été beaucoup plus sujets à la négligence (51 % contre 19 %) et aux abus sexuels (65 % contre 52 %).
Scolarité et emploi
Nous avons tenu compte du niveau de scolarité des délinquants car nous croyons quil peut être représentatif des expériences quils ont vécues durant leur jeunesse et qui auraient nui à leur capacité à se concentrer ou à avoir accès à des études. De plus, une faible scolarité peut nuire à ladaptation personnelle à lâge adulte, dans des domaines tels que lestime de soi, lemploi ou la stabilité financière. De façon générale, les délinquants inscrits au programme ont un niveau de scolarité plutôt faible, quelques-uns seulement ayant complété leurs études secondai-res (12 %), fréquenté une école de métiers (5 %) ou luniversité (6 %). Un nombre impressionnant (23 %) nont pas terminé leur 8e année détudes. Les Autochtones présentent un niveau déduca-tion moyen plus bas, une plus grande proportion nayant pas terminé leur 8e année (37 % contre 13 %) et une plus faible proportion nayant pas obtenu de diplôme détudes secon-daires (4 % contre 17 %). De même, les Autoch-tones sont moins nombreux à avoir fréquenté une école de métiers (3 % contre 6 %) ou une université (1 % contre 9 %). Nous avons par ailleurs constaté une différence significative entre les deux catégories de délinquants quant à ladaptation en milieu scolaire, avec 49 % des Autochtones considérant avoir eu des problèmes dadaptation contre 28 % des non Autochtones.
Nous avons aussi considéré que les antécédents en matière demploi représentaient un indice important du bien-être des délinquants, des possibilités quils ont eues, de leur estime de soi, de leur stabilité psychologique et de leur sécu-rité financière. En général, la stabilité demploi des délinquants est plutôt précaire, seulement 33 % dentre eux présentant des antécédents demplois stables. Les Autochtones se sont montrés moins avantagés que les autres à ce chapitre et un plus grand nombre nont tout simplement jamais eu demploi (26 % contre 7 %), alors que les non Autochtones présentent une plus grande stabilité (42 % contre 19 %).
Toxicomanie
Le taux de toxicomanie était significatif parmi léchantillon. Alors que les abus dalcool et de drogues restent notables chez les non Autochto-nes, les abus chez les Autochtones sont beaucoup plus fréquents pour lalcool (95 % contre 61 %), les drogues (66 % contre 43 %) et les solvants (26 % contre 4 %).
Antécédents criminels
Le quart (25 %) des délinquants de notre échan-tillon ont été condamnés au moins une fois avant lâge adulte. Parmi eux, 8 % ont été condamnés pour un ou plusieurs crimes violents et 6 % pour un ou plusieurs crimes sexuels. Nous navons pas constaté de différences entre les Autochtones et les non Autochtones à légard de leurs antécédents de jeunes contrevenants. Toutefois, les Autochtones sont plus nombreux (68 % contre 38 %) à avouer avoir commis des crimes durant leur jeunesse pour lesquels ils nont pas été officiellement accusés.
Comme pour leurs antécédents de jeunes contre-venants, à 9 contre 8, la moyenne des condamna-tions à lâge adulte par délinquant est sensiblement la même pour les Autochtones et les non Autochtones. En particulier, nous navons relevé aucune différence notable entre Autochtones et non Autochtones quant au nombre moyen de condamnations pour des infractions avec violence (3 contre 3) et des infractions sexuelles (2 contre 3).
En ce qui touche les crimes commis à lâge adulte, mais pour lesquels ils nont jamais été condamnés, les Autochtones ont avoué avoir commis plus de crimes violents, alors que les non Autochtones ont avoué avoir commis beaucoup plus de crimes sexuels.
Antécédents et habitudes de délinquance sexuelle
Nous avons découvert des différences intéressan-tes entre les deux groupes de délinquants quant au genre de crimes sexuels quils ont commis. Par exemple, les délinquants autochtones ont une plus grande tendance à commettre des viols que tout autre type de crime sexuel, alors que les délin-quants non autochtones ont plutôt tendance à sen prendre à des jeunes (les victimes étant plus souvent des enfants à lâge pubère, pré-pubère ou très jeunes), surtout dans un contexte incestueux. De plus, les Autochtones ont plutôt tendance à sen prendre à des femmes, alors que les non Autochtones ont plus souvent des victimes des deux sexes (23 % contre 7 %). Par ailleurs, les deux groupes sen prennent le plus souvent à des gens de même race, les Autochtones sen prenant à des Autochtones, et les non Autochtones à des non Autochtones. De plus, les non Autochtones ont plus tendance à sen prendre à des personnes dorigines ethniques variées. Les différences sont peu nombreuses quant aux liens entre les délin-quants et leurs victimes, sauf que les non Autoch-tones ont plus souvent un lien de confiance ou dautorité avec leurs victimes mais sans être un parent (ils sont, par exemple, médecin, chef religieux, enseignant ou entraîneur). Une dernière différence notable entre les deux groupes en ce qui concerne les victimes est que les victimes des délinquants autochtones sont plus souvent sous leffet de lalcool (38 % contre 14 %) au moment du crime que les victimes des autres délinquants. Toutefois, il ne faut surtout pas en conclure que les victimes des délinquants sexuels autochtones, le plus souvent des femmes autochtones adultes, ont une quelconque part de responsabilité quant à linfraction. Ce fait indique plutôt que les délin-quants autochtones ont plus tendance à exploiter une victime ivre ou à la mettre dans cet état afin de commettre le méfait.
Au moment de lévaluation préalable au traite-ment, autant les Autochtones que les non Autoch-tones présentaient des distorsions cognitives minimisant leur responsabilité et la gravité de leurs crimes. La seule différence entre les deux groupes est que les délinquants autochtones étaient plus portés à croire quils nauraient pas commis de crime sils navaient pas été sous linfluence dune substance quelconque. Toutefois, les deux groupes ont présenté une capacité équiva-lente à faire face à leurs distorsions cognitives au cours de leur traitement et à assumer la responsa-bilité de leurs crimes.
Nous avons constaté des différences dans les moyens utilisés par les délinquants pour atteindre leurs victimes. Les délinquants autochtones ont plutôt tendance à offrir des drogues ou de lalcool à leurs victimes pour faciliter leur crime (33 % contre 17 %). De leur côté, les délinquants non autochtones sont plus portés à leur donner des cadeaux (42 % contre 25 %) ou à leur montrer de la pornographie (15 % contre 5 %).
Quant à la fréquence du recours aux menaces durant le crime, les données sont sensiblement les mêmes pour les deux groupes (76 % pour les Autochtones contre 72 % pour les non Autochto-nes). Toutefois, les délinquants sexuels autochto-nes ont plus souvent recours à la violence physique au cours de linfraction (54 % contre 39 %). Nous croyons que cette différence vient du fait que les délinquants autochtones sen prennent plutôt à des femmes adultes, ce qui représente le type dinfraction avec le plus de violence comparative-ment aux autres catégories (infractions sans contact, inceste, pédophilie, infractions contre des adultes et des enfants).
Les délinquants sexuels non autochtones tendent plus que les autres à présenter des attirances sexuelles déviantes. En effet, les non Autochtones sont plus nombreux à déclarer avoir des pensées sexuelles et des fantasmes à légard de leurs victimes et à propos dimages de violence sexuelle. Ils sont aussi beaucoup plus nombreux à se masturber en regardant des photos denfants et à présenter des perversions autres que les infractions sexuelles (p. ex. : exhibitionnisme, ligotage ou sadisme sexuel). Toutefois, il ny avait aucune différence significative lors de la comparaison des profils de préférences sexuelles basés sur des évaluations phallométriques entre Autochtones et non Autochtones.
Résultats des traitements
Les évaluations des thérapeutes nont pas révélé beaucoup de différences entre les délinquants autochtones et non autochtones quant à lefficacité des traitements. Les deux catégories font des progrès substantiels aux niveaux de la prise de conscience, de la responsabilisation et de la connaissance de soi.
Avant lintroduction du programme mixte de traitement conventionnel et de guérison tradition-nelle pour les délinquants sexuels autochtones de la FBMC, le taux de réussite était plus élevé pour les non Autochtones que pour les Autochtones (75 % contre 58 %). Par contre, cette différence sest estompée après la mise en application dun programme adapté à la culture autochtone (le taux de réussite des délinquants autochtones a grimpé à 87 %, comparativement à 58 % des Autochtones suivant un programme pour délinquants sexuels non autochtones; voir le Tableau 1).
Une bonne proportion des délinquants ont pour-suivi leur traitement à la FBMC après sêtre acquittés, à la fin de leur peine, de lobligation dy assister (60 % des non Autochtones contre 42 % des Autochtones). Toutefois, après limplantation du programme mixte pour délinquants autochto-nes, la proportion dAutochtones qui ont pour-suivi leur traitement après lexpiration de leur peine est montée à 59 %.
Tableau 1
Résultats des traitements pour les délinquants autochtones :
Programme mixte |
||||||||
Programme |
Réussi |
Arrêté |
Abandonné |
Suspended |
||||
n |
% |
n |
% |
n |
% |
n |
% |
|
Mixte traditionnel/ conventionnel |
20 |
87 |
0 |
0 |
0 |
0 |
3 |
13 |
Traitement cognitivo-comportemental |
48 |
58 |
7 |
8 |
14 |
17 |
14 |
17 |
Finalement, à laide de renseignements fournis par le Centre dinformation de la police canadienne (CIPC), nous avons entrepris une étude sur le taux de récidive des infractions sexuelles en comparant, jusquà dix ans après leur libération, un échan-tillon de participants au programme de traitement de la FBMC (282 délinquants) et un groupe témoin de délinquants provenant du Centre psychiatrique régional des Prairies (196 délinquants). Nous avons choisi les membres du groupe témoin, afin quils soient comparables au premier échantillon, en fonction de lâge quils avaient lors de leur première condamnation, de la date de linfraction à lorigine de la peine actuelle, de leur âge lors de cette infraction, du nombre de condamnations avant cette infraction et du nombre dinfractions sexuelles avant cette infraction.
Comme lindique le Graphique 1, il ny a pas de différence significative dans le taux de récidive sexuelle entre les Autochtones et les non Autochto-nes qui ont participé au programme de la FBMC (8 % contre 3 %). Toutefois, il existe une différence considérable entre les délinquants du groupe témoin et ceux qui ont suivi un traitement à la FBMC. Ceux-ci présentent un taux de récidive après traitement beaucoup plus faible que le groupe témoin. Parmi les délinquants autochtones, seulement 8 % de ceux qui ont suivi le programme de la FBMC ont récidivé, comparativement à 25 % de ceux qui ne lont pas suivi.
Graphique 1
Répercussions sur le plan clinique
Par cette étude, nous avons appris quil est important de tenir compte des caractéristiques particu-lières aux Autochtones dans lévaluation des délinquants autochtones. Nous devrions donc, lors de lévaluation, considérer et étudier plus en profondeur le passé et lidentité culturelle de ces délinquants, lexposition relative à la langue et à la culture autochtones, le degré dassimilation et limpact éventuel du passage par un pensionnat, surtout pour les enfants de ces ex-pensionnaires. Une étude plus approfondie du genre de liens avec les proches, de la toxicomanie, de lagressivité et de la colère pourrait aussi être bénéfique dans lévaluation des délinquants sexuels autochtones. Il sera aussi important, lorsque la taille de léchan-tillon le permettra, détudier les différences au sein même du groupe autochtone et de déterminer les caractéristiques particulières aux Métis et aux Inuits.
Limportance de la langue utilisée lors du traitement a aussi été mise en évidence. Alors que des services offerts en anglais ne sont pas un problème pour un grand nombre de délin-quants autochtones, il est important de noter quune langue autochtone constitue la langue maternelle de 45 % des Autochtones, et il faut donc agir en conséquence. La capacité à répon-dre et à participer efficacement à une évaluation et à pleinement bénéficier dun traitement est intimement reliée à la langue parlée et à la capacité à comprendre et à transmettre des concepts et des idées. Lutilisation dune langue appropriée ne sert pas seulement à la compré-hension générale, mais aussi à la compréhension et à lassimilation de ces concepts, qui sont présentés très différemment dans la langue anglaise et dans les langues autochtones5.
Les données soulignent aussi limportance à accorder à la famille dorigine des délinquants autochtones, ainsi quaux mauvaises expériences vécues au cours de leur jeunesse. Soccuper de traumatismes causés par la perte dun être cher, par labandon, par une grande douleur ou par des problèmes de mauvais traitements ou dattache-ment peut faire une énorme différence pour le mieux-être et la gestion du risque de récidive des délinquants. Les résultats indiquent aussi limpor-tance à accorder au sein des programmes de traitement à trouver des moyens pour rétablir des liens positifs entre les délinquants et leur famille. Si des problèmes familiaux subsistent toujours, ne pas aider les délinquants à les régler peut contri-buer à faire retomber ceux-ci dans ces problèmes et, du même coup, leur nuire grandement dans lutilisation des outils dadaptation personnelle quils ont acquis au cours du traitement. Appuyer les délinquants autochtones dans lorganisation dun réseau de soutien (avec la famille et en dehors) semble aussi être un point essentiel du traitement.
Les données indiquent également que lacquisition daptitudes de base pour la vie en société est un autre point dintervention stratégique. Il est primordial dintégrer des programmes de formation scolaire et professionnelle. Dans le même ordre didées, étant donné le nombre substantiel de délinquants autochtones à être partis dune réserve pour aller vivre en milieu urbain, le renforcement des aptitudes à la vie en société dans les grandes villes semble être un moyen efficace et pragmatique daider ceux qui en ont besoin. Apporter une attention particulière à la maîtrise de la colère et de la violence semble être un point crucial dans le traitement des délinquants sexuels autochtones.
De plus, daprès les données sur les types de comportements des délinquants sexuels, les troubles comportementaux, les perceptions des femmes et les relations sont des facteurs qui requièrent une plus grande attention. Limpor-tance, mentionnée plus haut, à accorder à la famille dorigine des délinquants et aux expérien-ces vécues au cours de leur jeunesse peut aider à régler ces problèmes puisque la toxicomanie, la colère et lagressivité sont normalement des symptômes qui découlent de ces problèmes. Les données suggèrent aussi que les problèmes dex-position à des murs sexuelles incorrectes et la délimitation de ce que sont les murs sexuelles appropriées devraient être incorporés au traite-ment des délinquants sexuels autochtones. En outre, il apparaît que les traditions autochtones aux niveaux de la langue, de la culture, des enseignements et des cérémonies forment un aspect crucial du processus de guérison des délinquants autochtones, même si peu dentre eux ont grandi dans ce genre denvironnement. Il semble donc important que les délinquants autochtones aient la chance de participer à des programmes dintroduction à la culture et à la spiritualité autochtones ou de laisser la chance à ceux qui les pratiquent déjà dapprofondir leur compréhension et de continuer à pratiquer leurs traditions dorigine. Finalement, les données révèlent que, puisquils sont plus nombreux à réussir le programme mixte de traitement conven-tionnel et de guérison traditionnelle, la possibilité daider les délinquants sexuels autochtones à accroître leurs aptitudes à gérer leur risque de récidive est plus grande si on utilise une approche axée sur leur appartenance culturelle.
1. 138, avenue du Portage E., bureau 203, Winnipeg (Manitoba) R3C 0E1.
2. ELLERBY, L. «Traitement communautaire des délinquants sexuels autochtones : Faire face à la réalité et explorer les possibilités», Forum, Recherche sur lactualité correctionnelle, vol. 6, no 3 1994, p. 23-25.
3. ELLERBY, L. et STONECHILD, J. «Blending traditional and contemporary treatment approaches for sexual offenders: A Canadian experience» dans Sourcebook of treatment programs for sexual offenders, sous la direction de W. MARSHALL, FERNANDEZ, Y., HUDSON, S. et WARD, T., New York, NY, Plenum Press, 1998, p. 399-415. Voir ELLERBY, L. et ELLERBY, J.
Comprendre et évaluer le rôle des aînés et des méthodes de guérison traditionnelles dans le traitement des délinquants sexuels autochtones, série technique no 18, Ottawa, ON, Solliciteur général du Canada, 1998. Voir aussi ELLERBY, L. «Striving towards balance: A blended treatment/healing approach with Aboriginal sexual offenders» dans No place for violence: Canadian Aboriginal alternatives, sous la direction de J. PROULX et S. PERRAULT, Halifax, N. É., Fernwood Publishing, 2000, p. 78-98. Voir aussi ELLERBY, L., BEDARD, J. et CHARTRAND, S. «Holism, wellness and spirituality: Moving from relapse prevention to healing» dans Remaking relapse prevention with sex offenders: A Sourcebook, sous la direction de D. R. LAWS, S. M. HUDSON et T. WARD, Thousand Oaks, CA, Sage, 2000, p. 427-452.
4. ELLERBY, L. et MACPHERSON, P. Profil des délinquants sexuels autochtones : Analyse comparative visant à déterminer les caractéris-tiques des délinquants sexuels autochtones et non autochtones en vue daméliorer les stratégies dévaluation et de traitement destinées à cette clientèle, Rapport de recherche R-122, Ottawa, ON, Service correctionnel du Canada, 2002.
5. ROSS, R. Returning to the teachings: Exploring Aboriginal justice, Toronto, ON, Penguin, 1996.