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La Stratégie nationale antidrogue du Service correctionnel du Canada

Michel Roy1
Développement organisationnel, Service correctionnel du Canada

L’objectif premier de la Stratégie antidrogue du Service correctionnel du Canada (SCC) est de livrer et de promouvoir deux messages fondamentaux : freiner l’introduction de drogues dans nos établissements et réduire la demande de drogues chez les délinquants sous responsabilité fédérale au moyen de la prévention et du traitement.

La Stratégie canadienne antidrogue

Les problèmes liés à la drogue constituent un danger sérieux à long terme pour la santé et le bien-être de tous les Canadiens. Au cours des années 1980, des initiatives concertées ont été lancées pour lutter contre la consommation de drogue, et plusieurs ministères et organismes du gouvernement fédéral, y compris le SCC, ont uni leurs efforts en formant un partenariat dans le but de sensibiliser le public aux problèmes associés à la consommation de drogue et de lui fournir de l’information sur cette question. La Stratégie canadienne antidrogue réaffirme la volonté de ne pas tolérer le trafic de drogue et fait de la consommation avant tout une question de santé plutôt que d’application de la loi et présuppose que la prévention par la sensibilisation et l’information est un mode d’action plus réaliste et plus efficace.

La Stratégie nationale antidrogue du SCC

On reconnaît de plus en plus, à l’échelle nationale et internationale, la nécessité de trouver de nouvelles solutions pour réduire les coûts humains et financiers de la toxicomanie. Depuis 1995, on constate de manière générale que les stratégies axées principalement sur l’application de la loi ne produisent pas les résultats escomptés.

Dans ce contexte, la Stratégie canadienne antidrogue (1998) propose une approche plus équilibrée visant non seulement à freiner l’approvisionnement de drogues, mais aussi à réduire la demande d’alcool et de drogue. La toxicomanie est ainsi considérée dans une perspective de santé publique plutôt que comme une infraction criminelle.

Dans sa stratégie, le SCC inclut aussi bien l’alcool que la drogue, car la plupart des gens font une distinction entre la consommation d’alcool et l’usage de drogues. Cette distinction résulte surtout du fait que la consommation d’alcool est non seulement légale, mais aussi socialement acceptable. Cependant, l’analyse des données sur les délinquants à l’admission pour les trois dernières années montre que la majorité d’entre eux éprouvent un problème d’alcool et de drogue (45 %), comparativement à ceux qui ont seulement un problème d’alcool (13 %) ou de drogue (18 %). Seulement 24 % des délinquants n’ont aucun problème d’alcool ou de drogue.

La consommation de substances intoxicantes est un problème grave chez les délinquants sous responsabilité fédérale. En effet, on estime qu’environ 70 % d’entre eux ont un problème connu d’alcool ou de drogue, ou des deux, et qu’environ 56 % étaient sous l’influence de l’alcool ou de la drogue quand ils ont commis l’infraction à l’origine de leur incarcération. Les recherches réalisées par le SCC montrent que le rapport entre la toxicomanie et la criminalité augmente radicalement en fonction de la gravité des problèmes de toxicomanie qu’éprouvent les délinquants. Plus de 50 % des délinquants ayant un léger problème avaient consommé de l’alcool ou de la drogue quand ils ont commis l’infraction à l’origine de leur peine actuelle, comparativement à 90 % des délinquants ayant un problème grave. On observe le même phénomène en ce qui concerne les antécédents criminels des délinquants. Environ 25 % des crimes commis par les délinquants ayant un léger problème étaient associés à l’alcool ou à la drogue, comparativement à 80 % par les délinquants ayant un problème grave d’alcool ou de drogue.

L’existence de maladies infectieuses chez les délinquants sous responsabilité fédérale constitue une menace sérieuse non seulement pour le personnel et les autres délinquants, mais aussi pour les membres de leur famille et de leur collectivité quand ils sont remis en liberté. Chaque année, environ 5 000 délinquants sont remis en liberté.

Le nombre de détenus sous responsabilité fédérale qui, selon les renseignements disponibles, sont porteurs du VIH ou atteints du sida s’est élevé à 200 pour la première fois en avril 1999, soit une augmentation de près de 100 % depuis 1994. On estime aussi que de 25 à 40 % des délinquants sont atteints de l’hépatite C.

Au cours de l’exercice financier 1999-2000, le SCC a effectué plusieurs évaluations des mesures de détection et d’intervention : opérations de fouille et de saisie, programme de prise d’échantillons d’urine, programmes de base pour toxicomanes et phase I du Programme de traitement d’entretien à la méthadone. De plus, le Groupe de travail sur la sécurité du SCC a examiné les aspects des mesures de sécurité qui ont une incidence sur les moyens mis en place pour freiner le trafic de drogues et la consommation d’alcool et de drogue chez les délinquants. Les résultats de ces études seront intégrés à la politique et aux instructions permanentes.

Le SCC jouit d’une réputation internationale comme chef de file dans le domaine de la recherche sur la toxicomanie et de son traitement en milieu correctionnel. Deux de ses programmes de base pour toxicomanes, le Programme prélibératoire pour toxicomanes (PPT) et le programme Choices offert dans la collectivité, ont été accrédités par un groupe d’experts internationaux en toxicomanie.

Les programmes nationaux pour toxicomanes offerts par le SCC s’avèrent efficaces pour aider les délinquants à changer leur comportement. Une étude récente2 du Programme prélibératoire pour toxicomanes (PPT) a montré qu’en comparaison avec un groupe apparié de délinquants qui n’ont pas suivi ce programme, les participants affichaient des taux inférieurs en ce qui concerne la réincarcération, les nouvelles condamnations et les infractions avec violence.

D’autres données dont dispose le SCC indiquent que, même si la majorité des délinquants choisissent l’abstinence, le taux des nouvelles condamnations chez ceux qui ont suivi le PPT dans le but de modérer leur consommation d’alcool et de drogue est nettement inférieur à celui des délinquants qui ont tenté de s’abstenir complètement de toute consommation d’alcool et de drogue.

Le SCC est toujours activement à la recherche de «pratiques exemplaires» en usage dans les systèmes correctionnels provinciaux et territoriaux ainsi que dans la communauté correctionnelle internationale pour lutter contre la toxicomanie et pour régler des problèmes de santé.

Le SCC a aussi collaboré avec cinq comités fédéraux-provinciaux-territoriaux, sous la direction de Santé Canada, afin de préparer la réponse du gouvernement fédéral au rapport du Réseau juridique canadien VIH/sida, intitulé L’injection de drogue et le VIH/sida : questions juridiques et éthiques. Les travaux ont porté notamment sur les questions concernant les programmes d’échange d’aiguilles, le traitement d’entretien à la méthadone et d’autres interventions de santé publique à l’intention des délinquants.

Conclusion

Dans les limites d’un cadre d’action, la position stratégique et les priorités du SCC, en accord avec la Stratégie canadienne antidrogue, constituent une initiative qui doit être poursuivie avec la prudence et la diligence qui s’imposent. Nos stratégies et nos politiques doivent être le prolongement des stratégies adoptées par le gouvernement fédéral, tout en respectant le cadre juridique actuel.

Le Service correctionnel du Canada occupe une position unique qui lui permet d’assumer un rôle de premier plan dans l’élaboration de stratégies qui sont le complément de celles du gouvernement fédéral et des initiatives communautaires en matière de soins de santé pour les délinquants et de lutte contre la toxicomanie. Nous possédons beaucoup d’information au sujet des délinquants. Il existe dans les établissements différents types de trafiquants (généralement liés aux gangs et au crime organisé), de revendeurs et de consommateurs de drogue. Le groupe des consommateurs de drogue comprend des individus qui en font un usage récréatif et d’autres qui éprouvent des problèmes de toxicomanie modérés, graves ou chroniques. Ces différences exigent une gamme d’interventions adaptées.

Pour donner suite à notre ferme volonté d’élaborer des stratégies efficaces, nous devons collaborer étroitement avec les collectivités, nos partenaires du système de justice pénale, notre personnel et les délinquants dont nous avons la garde. Il est important aussi de reconnaître que ce qui donne de bons résultats dans d’autres pays ou d’autres collectivités ne peut pas nécessairement être reproduit directement dans l’environnement canadien ou dans celui du SCC. Tous les intervenants doivent faire leur part en vue de déterminer toutes les options, toutes les occasions et tous les obstacles possible, et de prendre les mesures nécessaires.


1.   340, avenue Laurier Ouest, Ottawa (Ontario) K1A0P9.

2.  T3 Associates.Évaluation des résultats de la participation aux programmes de traitement de la toxicomanie du SCC : OSAPP, ALTO et Choices, Rapport final, Ottawa, ON, Service correctionnel du Canada, 1999.