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Profil des délinquantes condamnées pour drogues purgeant une peine de ressort fédéral

2009 No R-204

Renée Gobeil
Service correctionnel du Canada
Mai 2009

REMERCIEMENTS

Kelley Blanchette (directrice principale de la Recherche correctionnelle, Service correctionnel du Canada) et Nicole Crutcher (agente de recherche principale, ministère de la Justice du Canada) ont contribué à la planification du contenu du présent rapport, et l’auteure les en remercie. Elle est aussi reconnaissante envers Tammy Cabana (gestionnaire de la Recherche, Service correctionnel du Canada) et Kelley Blanchette pour leur expertise sur le plan de la rédaction 

RÉSUMÉ

Sur une période de 25 ans, soit de 1981 à 2006, la proportion de délinquantes canadiennes purgeant une peine de ressort fédéral pour une infraction liée aux drogues a augmenté sensiblement. Néanmoins, ce groupe a fait l’objet de très peu de recherches, et la plupart de celles-ci ont porté sur des sujets relativement complexes, comme les répercussions des politiques de « guerre contre la drogue » aux États‑Unis. De plus, le peu de recherches qui existent sur les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues sont souvent caractérisées par l’absence de distinction entre ces dernières et les toxicomanes, sans que ce regroupement ne soit justifié. L’établissement d’un profil des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues s’avère donc à la fois opportun et nécessaire pour combler les lacunes en matière de recherche. Ce profil vise à cerner les caractéristiques de la perpétration d’infractions liées aux drogues parmi les délinquantes, pour ainsi éclairer les politiques et les interventions propres à ce groupe.

Le profil est basé sur des examens rétrospectifs des dossiers de cas informatisés des délinquantes et il englobe toutes les délinquantes admises dans un établissement fédéral en vertu d’un mandat de dépôt au cours de la période de cinq ans allant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2004. Selon les infractions dont elles ont été déclarées coupables, les délinquantes ont été réparties en deux groupes : les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues (n = 373) et les délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues (n = 666). Pour les analyses de suivi, le premier groupe a été divisé en deux sous‑groupes : celui des délinquantes dont l’infraction liée aux drogues la plus grave était l’importation ou l’exportation (n = 132) et celui des délinquantes dont l’infraction la plus grave était le trafic de drogues (n = 224). En raison de la faiblesse des taux de base, il s’est révélé impossible de faire un examen des sous‑groupes de délinquantes dont l’infraction liée aux drogues la plus grave était soit la production ou la culture (n = 2) soit la simple possession (n = 15).

Dans l’ensemble, les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues en général et celles faisant partie du sous‑groupe de l’importation ou de l’exportation présentaient des antécédents criminels moins lourds, de plus faibles niveaux de risque et de besoins et des niveaux supérieurs de motivation. Les délinquantes incluses dans le sous‑groupe de l’importation ou de l’exportation étaient aussi moins portées que celles du sous‑groupe du trafic de drogues à avoir des antécédents de consommation de drogues ou d’avoir déjà participé à un programme de traitement de la toxicomanie. Enfin, elles tendaient aussi davantage à obtenir une mise en liberté discrétionnaire et étaient moins susceptibles d’être réincarcérées soit pour manquement aux conditions de la surveillance soit pour avoir commis une nouvelle infraction. Ces conclusions soulignent l’hétérogénéité des délinquantes dont l’infraction la plus grave était liée aux drogues. Elles font également ressortir l’importance de distinguer les délinquantes déclarées coupables d’infractions liées aux drogues de celles chez qui l’on a décelé des problèmes de toxicomanie. Autrement dit, les notions de délinquante condamnée pour une infraction liée aux drogues et de toxicomane ne sont pas interchangeables parmi les délinquantes, même si, antérieurement, les chercheurs ont confondu ces deux groupes.

L’information que renferme ce profil peut être utile aux responsables de l’élaboration des programmes destinés aux délinquantes. Conscients des différences entre les groupes de délinquantes et au sein de ceux-ci, ils pourront élaborer des programmes et autres interventions correctionnelles bien adaptés, augmentant ainsi leur capacité à favoriser le changement.

Table des matières

Liste des tableaux

Liste des annexes

Introduction

Au cours des dernières décennies, la proportion de délinquantes canadiennes purgeant une peine de ressort fédéral pour une infraction liée aux drogues a augmenté sensiblement. Alors qu’en 1981, seulement 16 % des délinquantes purgeant une peine de ressort fédéral avaient commis une infraction liée aux drogues (Sinclair et Boe, 2002), cette proportion atteignait près de 28 % (soit une hausse de 175 %) en 2007 (Direction de la recherche, Service correctionnel du Canada, 2008). L’établissement d’un profil des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues s’impose donc. Les profils permettent de distinguer les groupes de délinquantes et peuvent donc en définitive éclairer les politiques et interventions pertinentes. Ils peuvent aussi servir de base à une recherche plus poussée et approfondie.

Délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues

Comme les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues constituent une proportion croissante des délinquantes purgeant une peine de ressort fédéral, il est étonnant de constater le peu de recherches effectuées sur ce groupe. Une récente étude pertinente a consisté en un bref survol des délinquants et des délinquantes sous responsabilité fédérale condamnés pour une infraction liée aux drogues à la fin de 2005 (Motiuk et Vuong, 2006). Bien que de nombreuses statistiques incluses dans ce survol (p. ex. durée de la peine, proportions des délinquants dans les collectivités et en établissement) aient été calculées pour hommes et femmes confondus, les variables des antécédents criminels et des besoins liés aux facteurs criminogènes ont été examinées séparément pour les femmes. Dans cette étude, les chercheurs ont constaté que les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues avaient de lourds antécédents criminels et qu’elles présentaient dans de fortes proportions des besoins liés aux facteurs criminogènes, surtout dans le domaine des fréquentations antisociales. Motiuk et Vuong (2006) ont noté que les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues différaient sensiblement des délinquants condamnés pour le même type d’infraction sur les plans des antécédents criminels et des besoins. Bien qu’ils aient fourni des statistiques en fonction du type d’infraction liée aux drogues (c.‑à‑d. trafic, importation, culture et possession), ils n’ont pas fait de comparaisons statistiques entre ces sous‑groupes. Néanmoins, certaines différences étaient évidentes. Ainsi, seulement 14 % des délinquantes condamnées pour importation de drogues présentaient des besoins dans le domaine de la toxicomanie, tandis qu’environ 65 % de celles qui avaient été condamnées pour trafic ou possession de drogues avaient des problèmes de toxicomanie. De même, 48 % des délinquantes du groupe de l’importation avaient des besoins dans le domaine de l’emploi, contre près de 70 % de celles qui étaient incluses dans les groupes du trafic et de la possession de drogues.

Des recherches menées ailleurs ont également fait ressortir des différences entre les types de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues. Après son examen de 630 délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues et incarcérées dans un établissement à sécurité maximale de la Virginie, un chercheur a constaté que celles qui avaient été condamnées pour possession présentaient des niveaux inférieurs de détresse interne et de conflit interpersonnel que celles qui avaient été condamnées pour trafic de drogues ou pour des infractions non liées aux drogues (Loper, 2002). Collectivement, ces constatations semblent révéler une grande hétérogénéité parmi les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues en ce qui concerne tant les besoins liés aux facteurs criminogènes que l’adaptation à l’établissement.

Limites de la recherche

Un facteur important qui contribue à la pénurie de recherches sur les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues est le fait que, dans leur examen de ce groupe, de nombreux chercheurs semblent utiliser de manière interchangeable les expressions « délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues » et « toxicomanes » (p. ex. Fischer, Geiger et Hughes, 2007; Hser, Evans, Teruya, Huang et Anglin, 2007). Toutefois, comme Loper (2002) l’a soutenu : [traduction] « Les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues peuvent différer entre elles en ce qui concerne leurs antécédents de toxicomanie » (p. 1 034). C’est pourquoi il est important que les chercheurs examinent explicitement les différences dans les taux de toxicomanie au sein de leurs échantillons avant d’utiliser la terminologie de cette manière.

Signalons aussi qu’aux États‑Unis, une bonne part de la recherche a porté sur les répercussions des politiques liées à la « guerre contre la drogue ». Malgré leur caractère très informatif, la plupart de ces études n’ont pas réussi à donner un aperçu des caractéristiques des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues. Elles présentent à la place les taux d’arrestation et d’incarcération (p. ex. Harrison et Beck, 2006) et ciblent des problèmes comme l’incidence de l’incarcération de la mère sur les enfants (Mumola, 2000). C’est donc dire qu’il n’existe que des recherches restreintes et de base sur les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues. De plus, ces recherches sont caractérisées par des lacunes méthodologiques, comme le regroupement de types hétérogènes de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues ou l’absence de distinction entre ces dernières et les toxicomanes. Il faut une information fondamentale sur les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues.

La présente étude

C’est dans ce contexte que la présente étude visait à tracer un profil des délinquantes purgeant une peine de ressort fédéral dont l’infraction la plus grave consistait en une infraction liée aux drogues. Le profil a porté sur les variables démographiques, les variables liées aux antécédents criminels, les niveaux de risque et de besoins et la récidive. Pour les mettre en contexte, on a comparé les constatations propres aux délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues à celles portant sur les délinquantes condamnées pour d’autres infractions. Comme des chercheurs ont déjà constaté des différences importantes entre les délinquantes condamnées pour diverses infractions liées aux drogues, nous avons également comparé les délinquantes dont l’infraction liée aux drogues la plus grave consistait en l’importation ou l’exportation à celles dont l’infraction liée aux drogues la plus grave était le trafic ou la possession de drogues en vue d’en faire le trafic1.

Méthode

Échantillon

L’échantillon utilisé pour cette étude comprenait toutes les délinquantes admises dans un établissement fédéral en vertu d’un nouveau mandat de dépôt (c.‑à‑d., admises pour une nouvelle condamnation) au cours de la période de cinq ans allant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2004 et pour lesquelles l’infraction la plus grave (à l’origine de la peine actuelle) consistait en une infraction liée aux drogues2. Les infractions incluses dans cette catégorie sont la possession, le trafic, la possession en vue d’en faire le trafic, la production et l’importation de drogues. Dans les cas où une délinquante comptait plus qu’une condamnation satisfaisant à ce critère, seule la première a été incluse3. Au total, 388 délinquantes ont été incluses dans l’échantillon des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues. Quinze délinquantes ont été éliminées parce que leurs dossiers ne comprenaient pas des données complètes d’évaluation initiale, ce qui a laissé 373 délinquantes dans le groupe des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues. Pour les analyses de suivi, les 373 délinquantes incluses dans ce groupe ont été réparties en fonction de leur infraction liée aux drogues la plus grave : importation ou exportation (n = 132); production ou culture (n = 2); trafic ou possession en vue d’en faire le trafic (n = 224); simple possession (n = 15).

Le groupe témoin correspondait à toutes les autres délinquantes admises dans un établissement fédéral en vertu d’un nouveau mandat de dépôt au cours de la période visée. Encore une fois, on a utilisé la première admission pour chaque délinquante. L’échantillon de délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues était composé de 716 délinquantes. Les dossiers de 48 délinquantes ont été éliminés parce qu’il manquait des données d’évaluation initiale. Deux autres délinquantes ont été exclues de l’échantillon parce qu’elles sont décédées avant l’expiration du mandat. Nous nous sommes donc retrouvés avec 666 délinquantes dans le groupe des délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues.

Données

Des données d’archives ont été extraites du Système de gestion des délinquant(e)s, le système automatisé de données sur les délinquants du Service correctionnel du Canada. Pour chaque délinquante, les données portant sur les aspects suivants ont été récupérées : caractéristiques démographiques; infractions et antécédents criminels; évaluation globale du risque, des besoins et de la motivation; évaluation spécifique des besoins dans les domaines de l’emploi, des relations matrimoniales/familiales, des fréquentations et relations sociales, du fonctionnement dans la collectivité, de l’attitude, de la toxicomanie, de l’orientation personnelle/affective; antécédents de toxicomanie; date et type de mise en liberté; résultats postlibératoires.

Sauf pour les renseignements liés à la mise en liberté et aux résultats postlibératoires, les données ont été notées à l’évaluation de chaque délinquante faite dans le cadre de l’Évaluation initiale des délinquants normalisée. Durant ce processus, les responsables de cas ont évalué le risque global, les besoins généraux, les sept domaines de besoins (énumérés précédemment) et les antécédents de toxicomanie de chaque délinquante au moyen d’entrevues et d’examens des documents officiels, y compris des rapports de police, des registres d’antécédents criminels et des commentaires du juge. Pour cette étude, les données ont été obtenues rétrospectivement à partir des dossiers des délinquantes.

Les données relatives à la mise en liberté et aux résultats postlibératoires ont ensuite été notées pour la première mise en liberté correspondant à la peine de chaque délinquante. Autrement dit, si une délinquante avait été libérée, que sa mise en liberté avait été révoquée et qu’elle avait de nouveau été libérée, seule la première mise en liberté était prise en compte dans les analyses. Deux indices de résultats postlibératoires ont été examinés : 1) toute révocation de la mise en liberté sous condition (c.‑à‑d. pour manquement à une condition de la surveillance ou pour perpétration d’une nouvelle infraction), 2) révocation résultant de la perpétration d’une nouvelle infraction ou d’une accusation en instance.

Analyses

Une série d’analyses descriptives a tout d’abord été menée pour examiner le profil des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues. On a aussi exécuté des analyses pour examiner les sous‑groupes de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues en fonction de l’infraction liée aux drogues la plus grave4. Des tests d’indépendance du chi carré ont ensuite été effectués pour faire ressortir les différences dans les profils des délinquantes selon l’infraction la plus grave. Étant donné le nombre d’analyses comparatives effectuées, une correction du type Bonferroni a été appliquée à la détection de la signification statistique, et seuls les résultats atteignant tout au plus un niveau de probabilité de 0,002 ont été pris en compte dans ces analyses. Enfin, des modèles de régression de Cox ont été utilisés pour comparer le taux et la rapidité de la réincarcération pour les groupes de délinquantes.

Résultats

Profil des infractions

Le groupe qui nous intéressait dans cette étude était celui des délinquantes dont l’infraction la plus grave consistait en une infraction liée aux drogues. En moyenne, ces délinquantes avaient été condamnées pour 1,3 infraction liée aux drogues dans le cadre de la peine actuelle. On peut voir au Tableau 1 les nombres et pourcentages de délinquantes condamnées pour chaque type d’infraction liée aux drogues. Les nombres sont présentés de deux manières : premièrement, comme une fonction de toutes les condamnations liées aux drogues au cours de la peine actuelle et, deuxièmement, uniquement par rapport à la condamnation pour infraction liée aux drogues la plus grave dans le cadre de la peine actuelle. Dans les deux cas, le trafic et la possession de drogues en vue d’en faire le trafic constituaient la catégorie la plus commune, suivie de celle de l’importation ou l’exportation. Compte tenu du nombre de délinquantes dont la condamnation pour une infraction liée aux drogues la plus grave appartenait à la catégorie de l’importation ou l’exportation et à celle du trafic ou de la possession de drogues en vue d’en faire le trafic, les analyses subséquentes porteront également sur chacun de ces sous‑groupes. Vu la faiblesse des nombres, on n’effectuera pas d’analyses similaires pour les délinquantes dont l’infraction la plus grave était la production ou la culture ou la simple possession.

Tableau 1
Profil des infractions liées aux drogues
  Toutes les condamnations pour infraction liée aux droguesa Condamnation pour infraction liée aux drogues la plus graveb
Infraction % (n / 373) % (n / 373)
Importation/exportation 35,4 (132) 35,4 (132)
Production/culture 0,5 (2) 0,5 (2)
Trafic/possession en vue d’en faire le trafic 63,5 (237) 60,1 (224)
Simple possession 16,9 (63) 4,0 (15)

a La somme des proportions et des nombres dans cette colonne est supérieure à 100 étant donné que beaucoup de délinquantes ont été condamnées pour plusieurs infractions liées aux drogues qui sont à l’origine de la peine actuelle.
b Les infractions liées aux drogues sont classées par ordre décroissant de gravité comme suit : importation/exportation, production/culture, trafic/possession en vue d’en faire le trafic, simple possession.

On s’est  aussi arrêté aux infractions les plus graves parmi les délinquantes dont l’infraction la plus grave n’était pas liée aux drogues. Dans ce groupe, le vol qualifié constituait l’infraction la plus grave pour la plus forte proportion de délinquantes (voir le Tableau 2). Le meurtre/homicide involontaire coupable, les voies de fait et les « autres » infractions contre les biens (c.‑à‑d. autre que l’introduction par effraction) étaient aussi assez courantes.

Tableau 2
Infractions les plus graves, groupe des délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues
Infraction la plus grave  % (n / 666)
Meurtre/homicide involontaire coupable 14,9 (99)
Tentative de meurtre/ homicide involontaire coupable 1,8 (12)
Infractions sexuelles 2,1 (14)
Vol qualifié 29,4 (196)
Voies de fait 18,2 (121)
Autres infractions avec violence 3,2 (21)
Infractions commises avec facultés affaiblies 2,0 (13)
Introduction par effraction 4,7 (31)
Autres infractions contre les biens 19,2 (128)
Autres infractions 4,7 (31)

Même si, dans les analyses subséquentes, on a examiné uniquement les infractions les plus graves, tant pour le groupe des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues que pour l’autre groupe de délinquantes, on s’est aussi penché sur toutes les infractions à l’origine de la peine actuelle. Comme on peut le voir au Tableau 3, la plupart des délinquantes du groupe de celles qui n’ont pas été condamnées pour une infraction liée aux drogues (environ 90 %) ont été condamnées uniquement pour des infractions non liées aux drogues. De même, beaucoup de délinquantes condamnées pour des infractions liées aux drogues ont été condamnées uniquement pour ces infractions ou, si elles ont été déclarées coupables d’autres infractions, ont souvent été condamnées pour d’« autres » infractions. Cette catégorie inclut principalement des infractions liées à l’administration de la justice, comme le défaut de comparaître au tribunal. Dans l’ensemble, il n’y avait guère de chevauchement entre les deux catégories de délinquantes.

Tableau 3
Infractions à l’origine de la condamnation actuelle
  Groupe de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues Groupe de délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues
Infraction % (n / 373) % (n / 666)
Meurtre/ homicide involontaire coupable 14,9 (99)
Tentative de meurtre/ homicide involontaire coupable 2,4 (16)
Infractions sexuelles 2,3 (15)
Vol qualifié 29,6 (197)
Voies de fait 26,6 (177)
Autres infractions avec violence 12,2 (81)
Infractions liées aux drogues 100 (373) 9,5 (63)
Infractions commises avec facultés affaiblies 0 (0) 2,1 (14)
Introduction par effraction 1,1 (4) 10,5 (70)
Autres infractions contre les biens 17,2 (64) 41,9 (279)
Autres infractions 51,5 (192) 63,7 (424)

Note : Il se peut que la somme des proportions soit supérieure à 100 étant donné que beaucoup de délinquantes ont été déclarées coupables de nombreuses infractions qui sont à l’origine de la peine actuelle.

Profil démographique

Le Tableau 4 donne un aperçu des caractéristiques démographiques tant des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues que de celles qui n’ont pas été condamnées pour ce genre d’infraction. On a constaté des différences significatives en ce qui concerne l’origine ethnique, χ2 (3, N = 1039) = 95,59, p < 0,0001, les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues étant dans une forte proportion des Noires, tandis que les délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues étaient surtout des Blanches ou des Autochtones. Il n’y avait pas de différence statistique entre les deux groupes pour ce qui est de l’état matrimonial; la plupart des délinquantes étaient célibataires, veuves, divorcées ou séparées, même s’il y avait aussi une forte proportion de délinquantes mariées ou vivant dans une union de fait. Enfin, l’âge moyen à l’admission tant des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues que des autres délinquantes était 34,0 ans (ET = 10,0) et 33,5 ans (ET = 9,04) respectivement; il n’y avait pas de différence entre les groupes quant à l’âge.

Tableau 4
Caractéristiques démographiques
  Groupe de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues Groupe de délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues
Variable % (n / 373) % (n / 666)
Origine ethnique*  
Blanche 50,9 (190) 62,3 (415)
Autochtone 16,4 (61) 28,2 (188)
Noire 20,9 (78) 4,7 (31)
Autre/ inconnue 11,8 (44) 4,8 (32)
État matrimonial  
Célibataire, veuve ou divorcée 58,2 (217) 62,0 (413)
Mariée ou en union de fait 40,0 (149) 36,3 (242)
Inconnu 1,9 (7) 1,7 (11)

*< 0,0001.

Les analyses de suivi, présentées au Tableau 5, ont révélé des différences considérables dans les profils démographiques des délinquantes dont les infractions liées aux drogues les plus graves étaient l’importation/exportation et le trafic/possession en vue d’en faire le trafic. Comparativement aux délinquantes dont l’infraction la plus grave était le trafic, les délinquantes dont l’infraction la plus grave était l’importation/exportation étaient dans une plus forte proportion des Noires, ce groupe comptant moins de Blanches ou d’Autochtones. On a aussi constaté dans ce groupe une proportion sensiblement plus élevée de femmes célibataires, veuves ou divorcées. Enfin, les délinquantes dont l’infraction la plus grave était l’importation/exportation étaient aussi plus jeunes (M = 31,4; ET = 8,9) que celles du groupe du trafic (M = 34,7; ET = 9,0), t(354) = 3,42, < 0,001. Il semble que l’absence de différences significatives quant à l’état matrimonial et à l’âge dans les comparaisons entre les délinquantes dont l’infraction la plus grave était liée aux drogues et les autres délinquantes(voir ci‑dessus) masque une variabilité considérable pour ce qui est de ces variables à l’intérieur du groupe des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues.

Tableau 5
Caractéristiques démographiques en fonction de l’infraction liée aux drogues la plus grave
  Importation/exportation Trafic
Variable % (n / 132) % (n / 224)
Origine ethnique*  
Blanche 32,6 (43) 58,9 (132)
Autochtone 2,3 (3) 25,0 (56)
Noire 50,0 (66) 5,4 (12)
Autres/inconnue 15,2 (20) 10,7 (24)
État matrimonial*  
Célibataire, veuve ou divorcée 72,7 (96) 48,7 (109)
Mariée ou en union de fait 24,2 (32) 50,0 (112)
Inconnu 3,0 (4) 1,3 (3)

*p < 0,0001.

Antécédents criminels

Comme le révèle le Tableau 6, il y avait beaucoup de divergences pour ce qui est des rapports antérieurs avec le système de justice pénale parmi les membres de chacun des groupes. Les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues avaient beaucoup moins de condamnations comme adolescentes, χ2 (5, n =1039) = 32,97, < 0,0001, et comme adultes, χ2 (5, n = 1039) = 22,88, < 0,001, que les délinquantes non condamnées pour des infractions liées aux drogues. Si l’on compare les sous‑groupes de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues, on constate que celles dont l’infraction la plus grave était l’importation/exportation avaient moins de condamnations comme adultes que celles dont l’infraction la plus grave était le trafic de drogues, χ2 (5, n = 356) = 90,65, < 0,0001. En réalité, les profils de condamnations antérieures à l’âge adulte des délinquantes condamnées pour trafic de drogues ressemblaient beaucoup à ceux des délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues. Toutefois, pour ce qui est des condamnations à l’adolescence, on n’a constaté aucune différence entre les sous‑groupes des délinquantes condamnées pour importation/exportation de drogues et celles qui ont été déclarées coupables de trafic de drogues.

Tableau 6
Antécédents criminels
  Infractions liées aux drogues Infractions non liées aux drogues
Variable % (n / 373) % (n / 666)
Condamnations à l’adolescence* 16,6 (62) 30,0 (200)
1 infraction 7,0 (26) 6,3 (42)
2‑4 infractions 4,3 (16) 9,0 (60)
5‑9 infractions 3,2 (12) 6,2 (41)
10‑14 infractions 1,1 (4) 4,1 (27)
15 infractions ou plus 1,1 (4) 4,5 (30)
Condamnations à l’âge adulte* 60,6 (226) 72,7 (484)
1 infraction 8,6 (32) 7,2 (48)
2‑4 infractions 15,0 (56) 14,7 (98)
5‑9 infractions 11,8 (44) 14,3 (95)
10‑14 infractions 5,1 (19) 9,2 (61)
15 infractions ou plus 20,1 (75) 27,3 (182)
Affiliation à un gang 4,8 (18) 2,1 (14)

*p < 0,0001.

Il y a lieu de signaler que même si les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues étaient, dans une proportion légèrement plus élevée (4,8 %) que celles non condamnées pour une infraction liée aux drogues (2,1 %), affiliées à un gang ou au crime organisé, cette différence n’est pas significative. On n’a pas non plus décelé de différences significatives pour ce qui est de l’affiliation à un gang ou au crime organisé entre les délinquantes dont l’infraction liée aux drogues la plus grave était l’importation/exportation et celles condamnées pour trafic de drogues. Enfin, on s’est penché sur la durée de la peine. Aucune des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues ne purgeait une peine d’une durée indéterminée. Par contre, c’était le cas de 4,2 % (28) des délinquantes qui n’avaient pas été déclarées coupables d’une infraction liée aux drogues. Parmi les délinquantes purgeant une peine d’une durée déterminée, la durée de la peine agrégée moyenne était sensiblement plus longue dans l’échantillon de délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues (M = 3,1 ans; ET = 1,5) que dans le groupe des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues (M = 2,7 ans; ET = 1,0), t(1037) = 4,29, < 0,0001. Pour ce qui est des sous‑groupes de celui-ci, la durée de la peine était plus longue pour celles déclarées coupables d’importation/exportation (M = 3,1 ans; ET = 1,2) que pour celles condamnées pour trafic de drogues (M = 2,5 ans; ET = 0,8), t(354) = 5,27, < 0,0001.

Risque, besoins et motivation

On a ensuite comparé les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues et celles qui n’ont pas été condamnées pour ce type d’infraction en fonction des niveaux évalués de risque, de besoins et de motivation. Comme le Tableau 7 permet de le voir, comparativement aux délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues, celles qui ont été condamnées pour ce type d’infraction avaient des cotes inférieures de risque, χ2 (2, n = 1039) = 131,30, < 0,0001 et de besoins, χ2 (2, n = 1039) = 167,24, < 0,0001. Les délinquantes déclarées coupables d’infraction en matière de drogue tendaient aussi à avoir des cotes plus élevées de motivation, mais cette différence n’était pas statistiquement significative.

Tableau 7
Cotes de risque, de besoins et de motivation
  Cote
Variable Faible Modérée Élevée
Risque*  
Infractions liées aux drogues 67,0 % 27,4 % 5,6 %
Infractions non liées aux drogues 27,3 % 46,0 % 26,7 %
Besoins*  
Infractions liées aux drogues 37,3 % 45,8 % 16,9 %
Infractions non liées aux drogues 13,1 % 38,6 % 48,4 %
Motivation  
Infractions liées aux drogues 3,5 % 37,3 % 59,3 %
Infractions non liées aux drogues 6,3 % 44,7 % 49,0 %

Note : Groupe des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues : n = 373. Groupe des délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues : n = 666.
*< 0,0001.

Les analyses ciblant les sous‑groupes de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues ont également révélé des différences très significatives. Comme on peut le voir au Tableau 8, les délinquantes dont l’infraction liée aux drogues la plus grave était l’importation/exportation affichaient des cotes beaucoup plus faibles de risque, χ2 (2, n =356) = 55,32, < 0,0001, et de besoins, χ2 (2, n =356) = 105,86, < 0,0001, que celles dont l’infraction liée aux drogues la plus grave était le trafic. Celles du premier groupe avaient aussi des cotes plus élevées pour la motivation, χ2 (2, n =356) = 43,46, < 0,0001. Dans l’ensemble, ces données démontrent que, même si les délinquantes dont l’infraction la plus grave était liée aux drogues affichaient collectivement des profils plus prometteurs sur les plans du risque, des besoins et de la motivation que les autres délinquantes, il y avait beaucoup de variabilité parmi elles. Celles dont l’infraction la plus grave était l’importation/exportation avaient un profil plus prometteur que celles dont l’infraction la plus grave était le trafic de drogues. On a constaté encore une fois des ressemblances dans les profils de délinquantes condamnées pour trafic de drogues et celles qui n’avaient pas commis d’infraction liée aux dogues, surtout en ce qui concerne la motivation.

Tableau 8
Cotes de risque, de besoins et de motivation en fonction de l’infraction liée aux drogues la plus grave
  Cote
Variable Faible Modérée Élevée
Risque*  
Importation/exportation 92,4 % 7,6 % ‑‑
Trafic 54,9 % 36,2 % 8,9 %
Besoins*  
Importation/exportation 72,7 % 23,5 % 3,8 %
Trafic 18,3 % 58,5 % 23,2 %
Motivation*  
Importation/exportation 2,3 % 16,7 % 81,1 %
Trafic 4,5 % 50,0 % 45,5 %

Note : Sous‑groupe des délinquantes condamnées pour importation/exportation de drogues : n = 132. Sous‑groupe des délinquantes condamnées pour trafic de drogues : n = 224.
*< 0,0001.

Le processus d’évaluation initiale inclut aussi des évaluations de sept domaines spécifiques de besoins liés aux facteurs criminogènes : emploi, relations matrimoniales/familiales, fréquentations et relations sociales, fonctionnement dans la collectivité, attitude, toxicomanie et orientation personnelle/affective5. Une série de tests d’indépendance du chi carré ont révélé des différences significatives dans les cotes de quatre de ces domaines (voir le Tableau 9). Peut‑être ironiquement, les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues présentaient moins de difficultés sur les plans de la toxicomanie et de l’orientation personnelle/affective. On a aussi constaté des différences significatives en ce qui concerne les domaines des fréquentations et relations sociales et des relations matrimoniales/familiales, les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues étant plus susceptibles d’obtenir la cote besoin modéré pour les fréquentations et moins susceptibles d’obtenir la cote facteur considéré comme un atout pour les relations matrimoniales/familiales.

Tableau 9
Cotes des besoins liés aux facteurs criminogènes
  Cote
Domaine Atout Aucune difficulté Besoin modéré Besoin manifeste
Emploi        
Infractions liées aux drogues 4,8 % 32,4 % 50,4 % 12,3 %
Aucune infraction liée aux drogues 4,5 % 39,0 % 39,8 % 16,7 %
Relations matrimoniales/ familiales*  
Infractions liées aux drogues 9,1 % 50,9 % 33,5 % 6,4 %
Aucune infraction liée aux drogues 22,4 % 37,4 % 35,3 % 5,0 %
Fréquentations/relations sociales*  
Infractions liées aux drogues 1,9 % 34,1 % 50,1 % 13,9 %
Aucune infraction liée aux drogues 5,1 % 41,7 % 34,8 % 18,3 %
Fonctionnement dans la collectivité  
Infractions liées aux drogues 3,0 % 64,4 % 29,3 % 3,3 %
Aucune infraction liée aux drogues 3,8 % 67,6 % 25,7 % 3,0 %
Attitude  
Infractions liées aux drogues 16,9 % 56,8 % 17,7 % 8,6 %
Aucune infraction liée aux drogues 10,7 % 56,3 % 20,6 % 12,5 %
Toxicomanie*  
Infractions liées aux drogues ‑‑ 49,1 % 13,9 % 37,0 %
Aucune infraction liée aux drogues ‑‑ 29,3 % 12,3 % 58,4 %
Orientation personnelle/ affective*  
Infractions liées aux drogues ‑‑ 33,2 % 42,4 % 24,4 %
Aucune infraction liée aux drogues ‑‑ 10,8 % 34,4 % 54,8 %

Note : Groupe des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues : n = 373. Groupe des délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues : n = 666.
*< 0,0001.

Les analyses de suivi servant à comparer les délinquantes dont l’infraction liée aux drogues la plus grave était l’importation/exportation et celles dont l’infraction la plus grave était le trafic de drogues ont révélé que celles du dernier sous‑groupe présentaient des profils plus problématiques dans six des sept domaines : emploi, relations matrimoniales/familiales, fréquentations et relations sociales, attitude, toxicomanie et orientation personnelle/affective. De leur côté, les délinquantes dont l’infraction la plus grave était l’importation/exportation avaient des problèmes un peu plus marqués en ce qui concerne le fonctionnement dans la collectivité.

Enfin, un certain nombre de variables liées à la toxicomanie ont également été explorées. Les analyses ont révélé que les délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues avaient, dans des proportions sensiblement plus élevées que celles du groupe des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues, des antécédents d’alcoolisme (49,1 % c. 22,0 %), χ2 (1, n =1039) = 73,65, p < 0,0001, de consommation de drogues (65,3 % c. 55,2 %), χ2 (1, n =1039) = 10,29, p < 0,001 et de traitement de la toxicomanie (50,8 % c. 37,3 %), χ2 (1, n =1039) = 17,51, p < 0,0001. En ce qui concerne les sous‑groupes des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues, les délinquantes condamnées pour trafic de drogues avaient dans des proportions sensiblement plus élevées des antécédents d’alcoolisme (31,7 % c. 6,1 %), de toxicomanie (74,1 % c. 20,5 %) et de traitement de la toxicomanie (50,8 % c. 9,8 %). Enfin, les analyses générales peuvent initialement avoir caché l’envergure de certaines des différences à même les groupes de délinquantes en ce sens que les délinquantes dont l’infraction liée aux drogues la plus grave consistait était le trafic de drogues avaient généralement des profils de toxicomanie plus marqués que les délinquants qui n’avaient pas été condamnées pour une infraction liée aux drogues, tandis que celles dont l’infraction la plus grave était l’importation/exportation affichaient des profils plus prometteurs que ces dernières dans ce domaine.

Mise en liberté

Les analyses sur la mise en liberté et les résultats postlibératoires ont porté uniquement sur les délinquantes qui avaient été mises en liberté au 1er août 2007. À cette date-là, toutes les délinquantes incluses dans le groupe des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues (n = 373) et 93,7 % de celles qui n’avaient pas été condamnées pour ce type d’infraction (n = 624) avaient été mises en liberté. Il y a lieu de noter que celles du premier groupe étaient beaucoup plus susceptibles d’avoir obtenu la semi‑liberté ou la libération conditionnelle totale (94,6 %) que celles du second groupe (71,2 %), χ2 (1, n =1039) = 80,29, p < 0,0001. Ces dernières obtenaient le plus souvent la libération d’office ou la mise en liberté à l’expiration du mandat. Il n’y avait pas de différences significatives quant au type de mise en liberté accordée entre les sous‑groupes de délinquantes dont l’infraction la plus grave était une infraction liée aux drogues.

Lorsqu’ils obtiennent la semi‑liberté, la libération conditionnelle totale ou la libération d’office, les délinquants peuvent se voir imposer des conditions de surveillance qu’ils doivent respecter pendant leur liberté sous condition. En moyenne, les délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues se voyaient imposer plus de conditions de surveillance que celles condamnées pour une infraction de ce type (2,2 c. 1,8), t (944 [degrés de liberté corrigés par la méthode Satterthwaite]) = 4,68, p < 0,0001. On n’a pas constaté de différences dans le nombre de conditions imposées entre les sous‑groupes du groupe des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues.

Résultats postlibératoires

Les résultats postlibératoires ont été examinés uniquement pour les délinquantes qui n’étaient pas considérées comme passibles d’expulsion étant donné que les délinquantes expulsées avaient beaucoup moins d’occasions de voir leur mise en liberté révoquée ou de récidiver pendant qu’elles se trouvaient au Canada6. Par conséquent, 36 délinquantes ont été exclues des analyses7 : cinq étaient des délinquantes qui n’avaient pas été condamnées pour une infraction liée aux drogues (laissant donc 619 délinquantes mises en liberté dans ce groupe), 29 appartenaient au sous‑groupe des délinquantes condamnées pour importation/exportation de drogues (en laissant donc 103), tandis que deux appartenaient au sous‑groupe des délinquantes condamnées pour trafic de drogues (en laissant 222). Cela laissait au total 342 délinquantes dans le groupe de celles qui avaient été condamnées pour une infraction liée aux drogues. Il est intéressant de noter que moins de 1 % des délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues ou pour le trafic de drogues étaient passibles d’expulsion, tandis que plus d’une délinquante sur cinq dans le groupe des délinquantes condamnées pour importation/exportation satisfaisait à ce critère.

La période de suivi pour les analyses des résultats postlibératoires correspondait au temps écoulé entre la date de mise en liberté de chaque délinquante et la date d’expiration de son mandat ou le 1er août 2007 au plus tard. En moyenne, cette période était de 2,8 ans (ET = 1,0 an, allant de 1,7 à 7,4 ans). La période moyenne était sensiblement plus courte pour les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues que pour celles de l’autre groupe (2,6 ans c. 2,9 ans), t (959) = 4,01, p < 0,0001, ce qui n’est pas étonnant étant donné que les membres de ce groupe purgeaient aussi des peines plus courtes. L’autre constatation rejoignant les conclusions sur la durée de la peine est le fait que les délinquantes dont l’infraction liée aux drogues la plus grave était l’importation/exportation purgeaient une peine légèrement (mais non pas sensiblement) plus longue que celles dont l’infraction liée aux drogues la plus grave était le trafic de drogues (2,8 ans c. 2,5 ans).

Une comparaison en fonction du taux de réincarcération a révélé que les délinquantes qui n’avaient pas été condamnées pour une infraction liée aux drogues subissaient une révocation de la liberté sous condition (pour manquement aux conditions ou par suite d’une nouvelle infraction) plus souvent que les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues (49,5 % c. 37,7 %), χ2 (1, n =1003) = 12,55, p < 0,001. Même si les membres du premier groupe étaient aussi plus susceptibles de voir leur liberté sous condition révoquée par suite d’une nouvelle infraction ou à cause d’une accusation en instance (14,8 % c. 9,9 %), cette différence n’était pas statistiquement significative. On a constaté une tendance analogue lorsqu’on a comparé les sous‑groupes de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues, celles déclarées coupables de trafic voyant plus souvent leur liberté sous condition révoquée pour quelque raison que ce soit que les délinquantes condamnées pour importation/exportation de drogues (48,2 % c. 11,7 %), χ2 (1, n =325) = 40.49, p < 0,0001, même si la révocation de la liberté sous condition pour perpétration de nouvelles infractions ou à cause d’accusations en instance produisait des taux statistiquement similaires (12,1 % c. 3,9 %).

Toutefois, comme nous l’avons signalé, les périodes de suivi n’étaient pas équivalentes pour les différents groupes. Il est donc possible que les résultats constatés soient attribuables partiellement au fait que les délinquantes qui n’ont pas été condamnées pour une infraction liée aux drogues ont eu plus d’occasions de voir leur liberté révoquée ou de commettre une nouvelle infraction. C’est pourquoi on a aussi effectué les analyses de régression de Cox. Cette technique permet de déterminer s’il y a des différences, liées à l’appartenance à un groupe, dans le laps de temps moyen écoulé jusqu’à la réincarcération. Elle permet aussi de compenser pour les différences entre les périodes de suivi. Un dernier avantage de la méthode de régression de Cox est qu’elle permet d’inclure des covariables. Ce point est particulièrement important étant donné qu’on a constaté une différence entre les groupes en ce qui concerne le risque, les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues présentant moins de risque que celles de l’autre groupe, et les délinquantes du sous‑groupe du trafic de drogues affichant quant à elles un taux de risque plus élevé que celles du sous‑groupe de l’importation/exportation. Étant donné que le risque évalué est aussi lié aux résultats postlibératoires (SCC, 1989), le fait d’inclure le risque comme covariable permet de voir si des différences subsistent dans le laps de temps moyen écoulé avant la réincarcération après avoir tenu compte de ce lien reconnu.

Le tableau 10 présente les résultats des régressions de Cox effectuées avec et sans le risque comme covariable pour les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues et celles qui n’ont pas été condamnées pour ce type d’infraction. Comme on peut le voir, le laps de temps écoulé avant une révocation (soit pour toute révocation ou une révocation après perpétration d’une nouvelle infraction ou une accusation) varie sensiblement selon le groupe lorsqu’on ne tient pas statistiquement compte du risque; les délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues affichent en effet des taux plus élevés de révocation. Toutefois, ces différences disparaissent lorsqu’on tient  compte du risque.

Tableau 10
Régression de Cox appliquée au laps de temps jusqu’à la révocation en fonction du risque et du groupe d’infractions
Modèle de régression B SE Wald H.R. χ2
Toute révocation  
Modèle 1 : groupe de l’infraction         23,23***
Appartenance au groupea 0,50 0,11 22,76*** 1,65  
Modèle 2 : groupe de l’infraction ajouté à l’effet du risqueb         2,02
Risque 0,59 0,07 79,71*** 1,81  
Appartenance au groupea 0,16 0,11 1,99 1,17  
Révocation avec nouvelle infraction/ accusation  
Modèle 1 : groupe de l’infraction         5,14*
Appartenance au groupea 0,46 0,21 5,05* 1,58  
Modèle 2 : groupe de l’infraction ajouté à l’effet du risqueb         0,60
Risque 0,51 0,13 15,14*** 1,67  
Appartenance au groupea 0,17 0,22 0,59 1,18  

Note : Groupe de l’infraction liée aux drogues : n = 342. Groupe de l’infraction non liée aux drogues : n = 619. 
a La catégorie de référence pour l’appartenance au groupe est le groupe de l’infraction liée aux drogues.
b Les régressions du laps de temps jusqu’à la révocation pour le groupe de l’infraction ajoutées à l’effet du risque représentent un test du changement dans la capacité prédictive par rapport à un modèle qui inclut uniquement le risque.
* p < 0,05. *** p < 0,0001.

Les graphiques de survie ont également été tracés pour compléter ces analyses (voir l’Annexe A). Ils confirment le fait que les délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues subissaient une révocation de leur liberté sous condition plus rapidement et plus fréquemment que celles condamnées pour une infraction liée aux drogues. Toutefois, la différence diminuait sensiblement après prise en compte de l’effet du risque. On pouvait observer la même chose dans le cas des révocations pour nouvelles infractions ou accusations.

Toutefois, en ce qui concerne les sous‑groupes de délinquantes dont l’infraction la plus grave était une infraction liée aux drogues, les conclusions étaient légèrement différentes (voir le Tableau 11). Encore une fois, avant de tenir compte du risque, le laps de temps écoulé avant la révocation (toute révocation ou révocation pour nouvelle infraction ou accusation) différait selon que l’infraction liée aux drogues la plus grave était l’importation/exportation ou le trafic de drogues. Après avoir tenu compte du risque, toutefois, la différence entre les groupes persistait pour toute révocation. Autrement dit, même après avoir tenu compte des différences dans les profils de risque des délinquantes condamnées pour une infraction d’importation/exportation ou de trafic, celles du dernier groupe affichaient des taux plus élevés de révocation de la mise en liberté et la révocation se produisait plus rapidement que celles qui avaient commis une infraction d’importation/exportation. Toutefois, on n’a pas constaté cette différence lorsqu’on a examiné uniquement les révocations attribuables à une nouvelle infraction ou une accusation.

Tableau 11
Régression de Cox appliquée au laps de temps écoulé jusqu’à la révocation pour le niveau de risque et le type d’infraction en fonction de l’infraction liée aux drogues la plus grave
Modèle de régression B SE Wald H.R. χ2
Toute révocation  
Modèle 1 : groupe de l’infraction         44,38***
Appartenance au groupea ‑1,80 0,31 34,51*** 0,17  
Modèle 2 : groupe de l’infraction ajouté à l’effet du risqueb         33,97***
Risque 0,54 0,13 16,78*** 1,71  
Appartenance au groupea ‑1,57 0,32 24,73*** 0,21  
Révocation avec nouv. infraction/ acc.  
Modèle 1 : groupe de l’infraction         7,33**
Appartenance au groupea ‑1,35 0,54 6,33* 0,26  
Modèle 2 : groupe de l’infraction ajouté à l’effet du risqueb         3,32
Risque 0,75 0,26 8,03** 2,10  
Appartenance au groupea ‑0,95 0,57 2,82 0,39  

Note : Sous‑groupe de l’infraction d’importation/exportation de drogues : n = 103. Sous‑groupe d’infractions de trafic de drogues : n = 222. 
aLa catégorie de référence pour l’appartenance au sous‑groupe de l’importation/exportation.
bLes régressions du laps de temps jusqu’à la révocation pour le groupe de l’infraction ajoutées à l’effet du risque représentent un test du changement dans la capacité prédictive par rapport à un modèle qui inclut uniquement le risque.
* p < 0,05. *** p < 0,0001.

Les résultats de ces analyses ont aussi été présentés sur un graphique (voir l’Annexe B). Lorsqu’on s’arrête à la catégorie de toute révocation, on voit clairement que les délinquantes condamnées pour trafic de drogues affichent des taux plus élevés de révocation de la mise en liberté et que cette révocation survient plus rapidement que pour les délinquantes condamnées pour l’importation/exportation de drogues, même après prise en compte de l’effet du risque. Toutefois, après prise en compte du risque, il ne subsiste aucune différence significative entre les sous‑groupes lorsqu’on examine la révocation pour nouvelle infraction ou accusation.

Discussion

Ce rapport a présenté un profil des délinquantes sous responsabilité fédérale dont l’infraction la plus grave était liée aux drogues. Pour le mettre en contexte, nous avons comparé ce profil à celui des délinquantes dont l’infraction la plus grave n’était pas liée aux drogues. Des analyses de suivi ont également été effectuées pour comparer les délinquantes dont l’infraction liée aux drogues la plus grave était l’importation/exportation et celles dont l’infraction la plus grave était le trafic ou la possession de drogues en vue d’en faire le trafic.

Si l’on s’arrête tout d’abord aux caractéristiques démographiques, on voit qu’il y avait plus de différences entre les sous‑groupes de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues qu’entre ces dernières et les délinquantes dont l’infraction la plus grave n’était pas liée aux drogues. Les délinquantes incluses dans le sous‑groupe de l’importation/exportation étaient, dans une proportion beaucoup plus forte, passibles d’expulsion. Elles étaient aussi dans une plus forte proportion des Noires, tandis que les délinquantes faisant partie du sous‑groupe du trafic de drogues ou du groupe des délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues étaient dans de plus fortes proportions des Blanches ou des Autochtones. Cette différence peut être attribuable à la composition raciale de nombreux pays où l’importation de drogues est courante (p. ex. certaines îles des Antilles, certains pays d’Afrique; Gendarmerie royale du Canada, 2007). En outre, les délinquantes condamnées pour importation ou exportation de drogues étaient en général plus jeunes et plus susceptibles d’être célibataires que celles condamnées pour trafic de drogues.

Dans l’ensemble, les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues en général et celles du sous‑groupe de l’importation/exportation en particulier avaient des antécédents criminels moins lourds, présentaient un niveau plus faible de risque, avaient moins de besoins liés aux facteurs criminogènes et semblaient plus motivées que les délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues. Sur ces plans, le profil des délinquantes incluses dans le sous‑groupe du trafic de drogues tendait à ressembler à celui des délinquantes dont l’infraction la plus grave n’était pas liée aux drogues. Dans les comparaisons entre les délinquantes dont l’infraction la plus grave était liée aux drogues et les autres délinquantes, les différences dans l’évaluation globale des besoins liés aux facteurs criminogènes étaient attribuables principalement au fait que les premières avaient moins de problèmes dans les domaines de la toxicomanie et de l’orientation personnelle/affective. Parmi les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues, celles dont l’infraction la plus grave était le trafic de drogues avaient plus de besoins que celles dont l’infraction la plus grave était l’importation ou l’exportation dans six des sept domaines : emploi, relations matrimoniales/familiales, fréquentations et relations sociales, attitudes, toxicomanie et orientation personnelle/affective. Les délinquantes incluses dans le sous‑groupe du trafic de drogues étaient aussi plus susceptibles que celles du sous‑groupe de l’importation/exportation et celles du groupe des délinquantes non condamnées pour une infraction liée aux drogues d’avoir des antécédents d’alcoolisme, de toxicomanie et de traitement de la toxicomanie.

Ces constatations soulignent l’importance de bien distinguer les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues et les délinquantes ayant des problèmes de toxicomanie. En effet, dans cet échantillon, seulement la moitié des premières avaient des besoins liés aux facteurs criminogènes dans le domaine de la toxicomanie. Bien qu’il y ait certes un chevauchement entre la perpétration d’infractions liées aux drogues et la consommation de drogues, ces constatations, ajoutées à celles de Motiuk et Vuong (2006), semblent indiquer qu’il est assez courant pour des délinquantes d’être impliquées dans l’importation et l’exportation de drogues sans entretenir des liens solides avec le milieu criminel et la toxicomanie. Autrement dit, il se peut que les délinquantes commettent ces infractions pour des raisons autres que la consommation de drogues. Elles peuvent notamment le faire pour des raisons financières. En effet, Adler (1993) a constaté que, pour de nombreux délinquants condamnés pour des infractions liées à l’importation de drogues, celle‑ci était considérée comme un moyen de faire de l’argent assez rapidement et sans trop d’efforts. On estime par exemple que 100 tonnes d’héroïne sont importées au Canada chaque année (Kennedy, 2002, cité dans Nolin et Kenny, 2002). Avec une valeur marchande de 201,60 $US le gramme en 2005 (Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, 2008), cette quantité représente une valeur de plus de 200 millions de dollars par année.

Certains chercheurs ont même laissé entendre que souvent les délinquantes ne tenaient pas à mener une carrière criminelle (Adler, 2003) et qu’elles étaient souvent impliquées de manière accessoire et à des niveaux relativement faibles dans le processus d’importation (c.‑à‑d. comme messagers ou passeurs; p. ex. Caulkins, Johnson, Taylor et Taylor, 1999; Davis, Johnson, Randolph et Liberty, 2005)8. Pour ces rôles, elles ne touchent sans doute que des proportions relativement faibles des sommes venant de l’importation.

Par contre, les délinquantes impliquées dans le trafic de drogues ont peut‑être adopté davantage un mode de vie criminel. Ainsi, Adler (2003) a constaté que celles qui faisaient le trafic de drogues étaient plus portées que celles qui se livraient à l’importation ou l’exportation de ces substances de considérer cette activité comme faisant partie d’une carrière criminelle, d’avoir tissé des réseaux de relations criminelles et d’être au moins partiellement motivées par la consommation de drogues. L’exploration des motifs et autres facteurs contribuant à la criminalité (p. ex. gains financiers par opposition à la nécessité d’obtenir de l’argent pour payer des drogues) parmi les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues pourrait constituer une piste de recherche intéressante.

En ce qui concerne la mise en liberté et les résultats postlibératoires, les délinquantes dont l’infraction la plus grave était liée aux drogues étaient plus susceptibles d’obtenir une mise en liberté discrétionnaire et moins susceptibles d’être réincarcérées après leur mise en liberté. Au sein de ce groupe, celles dont l’infraction la plus grave était le trafic étaient plus exposées à une révocation de leur mise en liberté sous condition que celles dont l’infraction la plus grave était l’importation ou l’exportation. Toutefois, les constatations relatives aux taux de réincarcération étaient attribuables en partie à la différence entre les groupes de délinquantes quant aux niveaux de risque. Après un rajustement statistique pour tenir compte du risque évalué, il n’y avait aucune différence entre les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues et celles qui n’avaient pas été condamnées pour une infraction de ce genre pour ce qui est du taux de réincarcération ou de la vitesse à laquelle elles étaient réincarcérées, soit pour quelque raison (c.‑à‑d. révocation pour manquement aux conditions ou révocation pour nouvelle infraction ou accusation) soit uniquement pour nouvelle infraction ou accusation. Il y a toutefois lieu de noter que même après avoir fait des rajustements pour tenir compte des différences dans les profils de risque, les délinquantes incluses dans le sous‑groupe du trafic voyaient plus souvent et plus rapidement leur liberté révoquée que les délinquantes incluses dans le groupe de l’importation/exportation. Comme cela n’était pas le cas des révocations attribuables à de nouvelles infractions ou accusations, on peut en déduire que ces révocations étaient attribuables à des manquements aux conditions de surveillance.

Les conditions de surveillance servent à gérer le risque lié aux besoins rattachés aux facteurs criminogènes. Ainsi, l’interdiction d’établir des contacts peut être imposée à une personne qui a des problèmes particuliers dans le domaine des fréquentations criminelles, tandis que l’abstinence de drogues, d’alcool ou des deux et des analyses d’urine aléatoires peuvent être imposées pour gérer le risque lié à la toxicomanie. Il semble donc logique qu’un plus grand nombre de conditions de surveillance soient imposées aux délinquantes dont l’infraction liée aux drogues la plus grave est le trafic et qui ont plus de besoins. Cela signifie que ces délinquantes avaient plus d’occasions de manquer aux conditions de leur surveillance que les délinquantes condamnées pour importation/exportation de drogues ou pour des infractions non liées aux drogues. Les analyses ont toutefois démontré qu’il n’y avait pas de différence quant au nombre de conditions de surveillance imposées aux délinquantes dans chacun des sous‑groupes de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues, ce qui prouve que cette explication n’est pas la bonne.

Il se peut aussi que les profils de besoins plus prononcés des délinquantes incluses dans le sous‑groupe du trafic de drogues expliquent plus directement les différences dans les taux de révocation. Les recherches démontrent qu’il existe un lien entre des niveaux élevés de besoins liés aux facteurs criminogènes et des taux plus élevés de réincarcération et de récidive (Gendreau, Little et Goggin, 1996). C’est d’ailleurs pourquoi on appelle parfois ces besoins des facteurs de risque dynamiques. Dans ce cas, l’absence de différences dans les taux de récidive peut être attribuable au fait que la liberté sous condition de ces délinquantes a été révoquée pour manquement aux conditions avant que les délinquantes aient eu l’occasion de récidiver.

Limites et orientations futures

Ce profil a consisté en une comparaison entre les délinquantes dont l’infraction la plus grave était liée aux drogues et les autres délinquantes. Toutefois, il a été impossible de désagréger complètement le groupe de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues. Même si les délinquantes condamnées pour importation/exportation et pour trafic de drogues étaient assez nombreuses pour qu’on puisse faire un examen de leurs profils, ce n’était pas le cas des délinquantes dont l’infraction la plus grave était la production/culture de drogues et la simple possession. Il faut donc appliquer avec circonspection à ces délinquantes les conclusions tirées de ces profils.

Ce profil fait ressortir l’hétérogénéité des délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues, surtout en ce qui concerne les antécédents de toxicomanie et les niveaux de besoins liés aux facteurs criminogènes dans ce domaine. Le profil de besoins des délinquantes dont l’infraction la plus grave était le trafic de drogues ressemblait à celui des délinquantes qui n’avaient pas été condamnées pour une infraction liée aux drogues. Ces constatations font ressortir l’importance de faire la distinction entre les types de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues et entre ces dernières et les toxicomanes tant en recherche que dans la pratique.

Conclusion

Ce rapport visait à tracer un profil de base des délinquantes canadiennes purgeant une peine de ressort fédéral dont l’infraction la plus grave était liée aux drogues. Des différences sensibles ont été constatées entre les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues et les délinquantes non condamnées pour une infraction de ce genre ainsi que parmi les premières, selon le type d’infraction liée aux drogues. Une catégorie de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues en particulier, soit celle dont l’infraction la plus grave était l’importation ou l’exportation, se distinguait clairement tant des autres délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues (trafic de drogues) que des délinquantes non condamnées pour ce type d’infraction. Dans cet échantillon, les délinquantes dont l’infraction la plus grave était l’importation ou l’exportation se distinguaient par leur plus faible niveau de risque, leurs niveaux de besoins moins prononcés et des antécédents et besoins moindre dans le domaine de la toxicomanie.

Les résultats sont importants pour les responsables de l’élaboration des programmes destinés aux délinquantes. Conscients des différences entre les groupes de délinquantes, ils pourront élaborer des programmes et d’autres interventions correctionnelles mieux adaptés, augmentant ainsi leur capacité de favoriser le changement. Les constatations de cette étude semblent par exemple indiquer que la participation à des programmes ciblant la toxicomanie ne procure peut‑être guère de bienfaits aux délinquantes condamnées pour l’importation de drogues. Pour être assignées à des programmes de traitement de la toxicomanie, les délinquantes doivent normalement atteindre des seuils sur les mesures de dépendance à l’égard de l’alcool ou des drogues; toutefois, dans la pratique, on écarte parfois cette exigence pour donner plus de poids aux impressions cliniques des responsables de cas. Or les résultats soulignent le fait que, comme le prévoit la politique, les délinquantes condamnées pour importation de drogues qui n’atteignent pas ces seuils ont plutôt intérêt à être exclues des programmes de traitement de la toxicomanie. Vu les constatations au sujet des délinquants de sexe masculin selon lesquelles l’importation de drogues est souvent un moyen de faire de l’argent (Adler, 1993), il serait peut-être préférable d’aiguiller ces délinquantes vers des programmes visant à changer leurs attitudes procriminelles ou encore des programmes d’éducation et d’employabilité pour en définitive les aider à gagner leur vie légitimement.

Bibliographie

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United States Sentencing Commission (2007).  Cocaine and federal sentencing policy,  Washington, DC, auteur.

Annexes

Annexe A. Courbes de survie : Délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues et autres délinquantes

Tableau A1. Courbes de survie pour les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues et les autres délinquantes : Laps de temps écoulé jusqu’à une révocation

Modèle 1 : Groupe d’infraction - Proportion restant dans la collectivité - Laps de temps (en jours)

Modèle 2 : Groupe d’infraction ajouté au risque - Proportion restant dans la collectivité - Laps de temps (en jours)


Tableau A2. Courbes de survie pour les délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues et les autres délinquantes : Laps de temps écoulé jusqu’à une révocation pour nouvelle infraction/accusation

Modèle 1 : Groupe d’infraction - Proportion restant dans la collectivité - Laps de temps (en jours)

Modèle 2 : Groupe d’infraction ajouté au risque - Proportion restant dans la collectivité - Laps de temps (en jours)

Délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues - Autres délinquantes

Annexe B. Courbes de survie : Délinquantes condamnées pour importation/exportation et trafic de drogues

Tableau B1. Courbes de survie par sous‑groupe de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues : Laps de temps écoulé jusqu’à une révocation

Modèle 1 : Groupe d’infraction - Proportion restant dans la collectivité - Laps de temps (en jours)

Modèle 2 : Groupe d’infraction ajouté au risque - Laps de temps (en jours)

Délinquantes condamnées pour importation/exportation - Délinquantes condamnées pour trafic de drogues

Tableau B2. Courbes de survie par sous‑groupe de délinquantes condamnées pour une infraction liée aux drogues : Nouvelles infractions/accusations

Modèle 1 : Groupe d’infraction - Proportion restant dans la collectivité - Laps de temps (en jours)

Modèle 2 : Groupe d’infraction ajouté au risque - Proportion restant dans la collectivité - Laps de temps (en jours)

Délinquantes condamnées pour importation/exportation  - Délinquantes condamnées pour trafic de drogues


1 Vu la faiblesse des taux de base, nous ne pouvions inclure d’autres sous-groupes d’infractions liées aux drogues.

2 On a retenu l’infraction la plus grave plutôt que n’importe quelle infraction afin d’assurer la comparabilité avec d’autres publications dans ce domaine, dont beaucoup utilisent le critère de l’infraction la plus grave. Celle‑ci a été déterminée en fonction d’une hiérarchie d’infractions, les catégories suivantes correspondant à un ordre décroissant de gravité : meurtre/homicide involontaire coupable, tentative de meurtre/homicide involontaire coupable, infractions sexuelles, vol qualifié, voies de fait, autres infractions avec violence, infraction liée aux drogues, infractions commises avec facultés affaiblies, introduction par effraction, autres infractions liées aux biens, autres infractions.

3 Cette façon de procéder a facilité l’examen de la récidive puisque l’examen des condamnations antérieures donnait aux délinquantes en question un plus long laps de temps durant lequel elles pouvaient être mises en liberté et, le cas échéant, connaître une révocation de leur mise en liberté.

4 L’importation ou l’exportation était considérée comme l’infraction la plus grave, suivie de la production ou la culture, du trafic et de la possession en vue d’en faire le trafic et de la simple possession. Le trafic et la possession de drogues en vue d’en faire le trafic ont été regroupés en raison de leur ressemblance conceptuelle et pour assurer la conformité avec les procédures suivies dans les recherches antérieures (Motiuk et Vuong, 2006).

5 Chacun des cinq premiers domaines reçoit une cote de facteur considéré comme un atout, aucune difficulté actuelle, besoin modéré ou besoin manifeste. Les domaines de la toxicomanie et de l’orientation personnelle/affective reçoivent une des trois cotes de difficulté, mais ne peuvent pas être considérés comme un atout.

6 Ceci est important étant donné que les analyses de suivi de la révocation et de la récidive étaient basées uniquement sur les dossiers de sources canadiennes.

7 Parmi ces 36 délinquantes, 11 étaient des Blanches, 19 des Noires, aucune n’était Autochtone et six appartenaient à la catégorie de l’origine ethnique « autre/inconnue ».

8 D’après des recherches américaines, seulement un accusé sur 13 dans des affaires de drogues est considéré comme un importateur de haut niveau (United States Sentencing Commission, 2007). Bien que cette constatation ne s’applique peut‑être pas entièrement au contexte canadien, elle permet de penser qu’une proportion considérable d’importateurs incarcérés dans les établissements canadiens sont éventuellement classés à des niveaux assez faibles dans la hiérarchie de l’importation.