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Caractéristiques démographiques des délinquants en semi-liberté

Dans le système correctionnel canadien, les programmes de mise en liberté sous condition (semi-liberté, libération conditionnelle totale et libération d'office(2)) permettent aux délinquants de sortir de prison pour purger une partie de leur peine dans la collectivité. Durant cette période de mise en liberté sous condition, le délinquant peut être réincarcéré s'il ne respecte pas certaines conditions imposées aux termes de lois relatives à la résidence et au comportement. À la date de la libération d'office ou à l'octroi de la libération conditionnelle totale, le détenu est mis en liberté dans la collectivité jusqu'à la fin de sa peine. Toutefois, la semi-liberté est exceptionnelle du fait qu'elle est accordée pour une période de temps relativement courte (généralement six mois) et que la date d'achèvement ne coïncide pas avec la date d'expiration de la peine.

La semi-liberté revêt également un caractère unique du fait que le délinquant doit vivre dans un établissement correctionnel (prison ou maison de transition) ou se présenter dans un établissement de ce genre à intervalles réguliers, ce qui restreint ses activités dans la collectivité et permet une surveillance plus étroite de la part des agents de correction.

Actuellement, un délinquant est admissible à la semi-liberté six mois avant sa date d'admissibilité à la libération conditionnelle totale, qui est fixée au tiers de sa peine. Cette méthode de calcul de l'admissibilité n'est entrée en vigueur qu'en novembre 1992(3). Auparavant, le délinquant devenait généralement admissible à la semi-liberté après avoir purgé un sixième de sa peine(4).

Dans cet article, nous examinerons les caractéristiques démographiques des délinquants en semi-liberté. Nous nous arrêterons sur la semi-liberté non menée à bien afin de pouvoir détecter les facteurs de risques - question d'importance cruciale en raison de l'intervalle de temps relativement court entre le début de la peine et l'admissibilité à cette semi-liberté. Méthodologie Les données de l'étude ont été recueillies par l'examen des dossiers des délinquants. Un échantillon représentatif de 929 délinquants non autochtones a été choisi parmi ceux dont la semiliberté se terminait, de quelque façon que ce soit, au cours de l'exercice 1990-1991. Par ailleurs, 44 délinquantes et 77 délinquants autochtones dont la semi-liberté se terminait au cours de cet exercice ont été ajoutés à cet échantillon; ils représentaient la population totale de leur catégorie. Semi-liberté et durée de la peine On distingue trois principales formes de semi-liberté : la semi-liberté régulière, qui dure en principe de quatre à six mois et où le délinquant revient chaque soir au centre correctionnel communautaire, au centre résidentiel communautaire ou à l'établissement; les projets de semi-liberté ou projets spéciaux, qui permettent aux délinquants de travailler à l'extérieur au cours de la journée; et l'«autre» catégorie de semiliberté, où le délinquant ne se présente que périodiquement à l'établissement ou au centre communautaire.

La majorité des personnes de l'échantillon bénéficiaient de la semi-liberté régulière (87% des hommes, 95% des femmes et 97% des Autochtones), une petite proportion seulement des hommes bénéficiaient des projets spéciaux (8%) ou d'autres formes de semi-liberté (3%) (voir Tableau 1).

Tableau 1

Forums de semi-liberté et caracteristiques de la peine des délinquants
en semi-liberté
 
Hommes
Femmes
Autochones de
sexe masculin
Semi-liberté
Réguilére
87,3 %
95,0 %
97,2 %
Projets spéciaux
8,1 %
2,5 %
0
Autre
2,6 %
2,5 %
2,8%
Durée de la peine
De 2 à 4 ans
63,8 %
65,9 %
66,2 %
De 5à 9ans
24,8 %
31,8 %
28,6 %
10 ans ou plus
8,1 %
0
2,6 %
À perpétuite
3,3 %
2,3 %
2,6 %
Nombre *
929
44
77
* En raison de valeurs manuantes, le nombre total des diverses catégories
ne correspond pas nécessairement à l'ensemble des échantillons.

Environ les deux tiers du groupe purgeaient des peines de deux à quatre ans. Comme on peut s'y attendre, le nombre de délinquants de chaque catégorie chute à mesure que les peines s'allongent. Vingt-cinq pour cent des hommes, 32 % des femmes et 29 % des Autochtones purgeaient une peine d'une durée de cinq à neuf ans, et quelque 3 % seulement de chaque catégorie étaient condamnés à perpétuité. Caractéristiques démographiques La majorité des délinquants en semi-liberté étaient âgés de 26 à 40 ans. Quelque 60 % des hommes et des Autochtones et un peu plus de la moitié des femmes appartenaient à ce groupe d'âge. Les hommes et les Autochtones de l'échantillon sont à peu près dans le même groupe d'âge alors que la population féminine est légèrement plus jeune-près d'un tiers ont entre 17 et 25 ans (voir Tableau 2).

Tableau 2

Caractéristiques démographiques des délinquants en semi-liberté
(au moment de leur infraction)
 
Hommes
Femmes
Autochones de
sexe masculin
Âge *
De 17 à 25 ans
22,0 %
29,5 %
25,0 %
De 26 à 40 ans
59,0 %
52,3 %
60,5%
Plus de 40 ans
19,0 %
18,2 %
14 ,5 %
Situation de famille
Célibataires
35,7 %
35,0 %
29,6 %
Mariés ou conjoints de fait
49,6 %
52,5 %
56,3 %
Séparés, divorcés ou veufs
14,7 %
12,5 %
14,1 %
Situation au regard de l'emploi
Sans emploi
50,3 %
57,1 %
60,0 %
Employés
45,8 %
40,5 %
29,2 %
Étudiants, à la retraite ou
incarcérés
3,9 %
2,4 %
10,8 %
Niveau d'instruction
8e année ou moins
30,8 %
27,9 %
56,8 %
De la 9e à la 13e année
59,1 %
65,1 %
41,9 %
Études postsecondaires
10,1 %
7,0 %
1,3 %
Nombre **
929
44
77
* Il s'agit de la seule catégorie non évaluée au moment de l'infraction; elle a
été mesurée au moment de l'étude
** En raison de valeurs manuantes, le nombre total des diverses catégories
ne correspond pas nécessairement à l'ensemble des échantillons.

On observe peu de variations quant à la situation de famille entre les trois groupes. Environ la moitié des délinquants des trois groupes étaient mariés ou conjoints de fait au moment de leur infraction, alors qu'à peu près 14 % étaient séparés, divorcés ou veufs. Toutefois, on compte légèrement moins de célibataires chez les délinquants autochtones en semi-liberté avec 30 %, comparativement à 36 % et près de 35 % respectivement chez les hommes et les femmes.

En ce qui concerne l'emploi, plus de la moitié des délinquants étaient sans emploi au moment de l'infraction. C'est pour les hommes que la proportion de sans emploi est la plus faible avec 50 %, comparativement à 57 % pour les femmes et à 60 % pour les Autochtones.

Près des deux tiers (65 %) des délinquantes avaient fait des études secondaires au moment de l'infraction et sur l'ensemble, quelque 7 % avaient même poursuivi des études postsecondaires. De même, 59 % des hommes avaient fait des études secondaires et 10 % de l'ensemble avaient poursuivi des études postsecondaires. Toutefois, seulement 42 % des Autochtones avaient fait des études secondaires au moment de l'infraction et la majorité (57 %) n'avaient pas atteint la neuvième année. Taux d'échec Aux fins de cette étude, on a utilisé deux définitions du taux d'échec. Le premier taux correspond au taux général et englobe le manquement aux conditions spéciales de la semi-liberté, la révocation de la semi-liberté sans nouvelle infraction et la révocation en raison d'une nouvelle infraction. Le second taux ne regroupe que les révocations de la semi-liberté en raison d'une nouvelle infraction. Il a été calculé dans le but de déterminer si l'échec de la semi-liberté est attribuable à la récidive ou simplement à des violations «techniques».

En raison du petit nombre de délinquantes de l'échantillon, le taux d'échec n'a pas été examiné en détail. Toutefois, le taux d'échec général de ce groupe était de 30 %, dont 5 % pour cause de récidive. Quant aux délinquants autochtones, ils ont été incorporés avec les délinquants de l'échantillon général.

Le taux d'échec général chez les délinquants s 'établit à 27 % (pour toutes les catégories de semiliberté), dont près de 10 % est dû à la récidive. Plus précisément, environ un quart (26 %) des délinquants en semi-liberté régulière ont vu leur liberté révoquée, dont 10 % à cause d'une nouvelle infraction (voir Tableau 3). Ces taux sont inférieurs pour la semi-liberté «projets spéciaux» et pour les autres formes de semi-liberté (le taux d'échec général s'établissant à quelque 10 %, dont environ 4 % dû à la récidive).

Tableau 3

Taux d'echec de la semi-liberté selon la forme de
semi-liberté et les caracteristiques de la peine
 
Taux d'echec
général
(pour chaque groupe)
Taux d'echec en raison
d'une nouvelle infraction
(pour chaque groupe)
Semi-liberté
Réguliére
26,3 %
9,7 %
Projets spéciaux
10,4 %
3,0 %
Autre
8,3 %
4,2 %
Durée de la peine
De 2 à 4 ans
25,7 %
9,3 %
De 5 à 9 ans
27,2%
9,2%
10 ans ou plus
32,9 %
11,8%
À perpétuité
12,1%
3,0%

Environ un quart des délinquants purgeant une peine de deux à quatre ans ou de cinq à neuf ans ont eu leur libération conditionnelle révoquée (26 % et 27 % respectivement). Ce nombre atteint près d'un tiers (33 %) pour les délinquants purgeant une peine de dix ans ou plus, mais est bien inférieur pour les délinquants condamnés à perpétuité (12 %).

La tendance est analogue en ce qui concerne le taux de révocation pour cause de récidive, puisque le taux d'échec se situe légèrement au-dessous de 10 % pour les deux groupes (peines de deux à quatre ans et de cinq à neuf ans) de délinquants purgeant une peine de moins de dix ans, mais est légèrement supérieur (12 %) pour ceux qui purgent une peine de dix ans ou plus, puis inférieur (3 %) pour ceux qui sont condamnés à perpétuité. Taux d'échec et caractéristiques démographiques En règle générale, les taux d'échec des deux groupes sont inversement proportionnels à l'âge.

Le taux d'échec global est de 41 % pour les délinquants de moins de 25 ans, de 25 % pour les délinquants âgés de 26 à 40 ans et de 14 % pour les délinquants de plus de 40 ans. De même, le taux d'échec pour cause de récidive est de 15 % pour les délinquants les plus jeunes, de 9 % pour les délinquants de l'âge intermédiaire et de 5 % pour les plus âgés (voir Tableau 4).

Tableau 4

Caractéristiques démographiques des délinquants
et taux d'échec de la semi-liberté
 
Taux d'echec
général
(pour chaque groupe)
Taux d'echec en raison
d'une nouvelle infraction
(pour chaque groupe)
Âge *
De 17 à 25 ans
40,6 %
14,8 %
De 26 à 40 ans
24,8 %
8,5 %
Plus de 40 ans
14,0 %
5,4 %
Situation de famille
Célibataires
28,5 %
9,5 %
Mariés ou conjoints de fait
21,9 %
7,6 %
Séparés, divorcés ou veufs
28,0 %
7,0 %
Situation au regard de l'emploi
Sans emploi
33,9 %
9,5 %
Employés
16,8 %
7,7 %
Étudiants, à la retraite ou
incarcérés
31,0 %
19,0 %
Niveau d'instruction
8e année ou moins
28,9 %
9,9 %
De la 9e à la 13e année
25,9 %
8,0 %
Études postsecondaires
19,4 %
12,9 %
* Il s'agit de la seule catégorie non évaluée au moment de l'infraction; elle a
été mesurée au moment de l'étude

En ce qui concerne la situation de famille, les délinquants mariés ou ayant un conjoint de fait au moment de l'infraction sont ceux qui affichent le taux d'échec général le plus faible avec 22 %. Les délinquants célibataires et séparés, divorcés ou veufs affichent des taux légèrement plus élevés (29 % et 28 % respectivement). Ils ont toutefois le taux d'échec le plus faible pour cause de récidive (7 %).

En outre, les délinquants qui occupaient un emploi au moment de leur infraction étaient deux fois plus susceptibles d'accomplir avec succès leur période de semi-liberté (taux d'échec général de 17 %) que ceux qui étaient sans travail (34 % et 31 % pour les deux autres groupes). En revanche, les délinquants qui étaient étudiants, à la retraite ou incarcérés au moment de leur infraction étaient deux fois plus nombreux à avoir eu leur libération conditionnelle révoquée pour cause de récidive que les deux autres groupes (19 % par rapport à 10 % et 8 %). Ce résultat doit être analysé avec prudence étant donné que les délinquants étudiants, à la retraite ou incarcérés constituent un groupe beaucoup moins nombreux que celui des délinquants sans emploi ou employés.

Enfin, le taux d'échec général décroît avec le niveau d'instruction des délinquants au moment de l'infraction, passant de 29 % pour ceux qui ont moins d'une neuvième année d'études à 26 % pour ceux qui ont fait des études secondaires et à 19 % pour ceux qui ont poursuivi des études postsecondaires. Néanmoins, l'instruction ne change guère le taux d'échec dû à la récidive (13 % des délinquants ayant achevé leurs études postsecondaires, 10 % des délinquants ayant un niveau d'études inférieur à la neuvième année et 8 % des délinquants ayant commencé des études postsecondaires). Délinquant type en semi-liberté Le délinquant type en semi-liberté peut donc être décrit comme étant de sexe masculin et non autochtone, âgé de 26 à 40 ans et ayant commis probablement un vol, une infraction contre les biens ou une infraction en matière de drogues. Au moment de l'infraction, cette personne était mariée ou vivait avec un conjoint de fait, était sans emploi et avait entrepris mais non terminé ses études secondaires.

Par contre, le profil type du délinquant qui voit sa semi-liberté révoquée est légèrement différent.

Cette personne a moins de 25 ans, a commis le plus souvent une infraction contre les biens ou s'est rendue coupable d'agression, de vol ou de tentative de meurtre. Au moment de l'infraction, elle était célibataire, sans emploi et avait un niveau d'instruction inférieur à la neuvième année.

Cette esquisse ouvre de nouvelles voies d'exploration pour mettre en évidence les facteurs de risque susceptibles de mener à l'échec de la semi-liberté. Une recherche dans cette direction s'impose pour améliorer la capacité du système correctionnel à choisir, d'une part, les meilleurs éléments susceptibles de bénéficier d'une forme particulière de libération conditionnelle et, d'autre part, la forme de libération conditionnelle correspondant le mieux au profil des délinquants.


(1)Direction de la recherche et des statistiques, Service correctionnel du Canada, 340, avenue Laurier ouest, pièce 4B, Ottawa (Ontario) K1A 0P9.
(2)La libération d'office a remplacé la liberté surveillée dans la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, qui est entrée en vigueur le 1er novembre 1993. La libération d'office permet la libération d'un délinquant dans la collectivité après qu'il a purgé les deux tiers d'une peine d'emprisonnement d'une durée déterminée (la condamnation à perpétuité pour des crimes comme le meurtre au premier et au second degré n'est pas une peine d'une durée déterminée.)
(3)Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
(4)Loi sur la libération conditionnelle des détenus.