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Tendances au niveau fédéral et résultats de la mise en liberté sous condition

La libération conditionnelle n'est pas un concept nouveau au Canada. Cela fait près d'un siècle qu'il existe une législation qui permet la mise en liberté d'un détenu avant l'expiration de sa peine. De fait, 1999 marquera les 100 ans de la libération conditionnelle au Canada.

Cadre législatif

L'évolution de la législation relative à la liberté conditionnelle au Canada est marquée par trois étapes importantes. Cela a commencé avec la Loi des libérations conditionnelles (Ticket of Leave Act) de 1899, qui permettait la mise en liberté des détenus selon des facteurs liés à l'infraction, le caractère du détenu et la possibilité de perpétrer une nouvelle infraction.

La Loi sur la libération conditionnelle est entrée en vigueur en 1959. Elle a créé la Commission nationale des libérations conditionnelles et lui a donné le mandat d'octroyer la libération conditionnelle, d'établir les conditions de la mise en liberté et de révoquer la mise en liberté de délinquants sous responsabilité fédérale. La Commission peut aussi révoquer la mise en liberté des délinquants sous responsabilité provinciale ou territoriale qui sont dans des juridictions sans Commission de libération conditionnelle.

En 1992, la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC) a remplacé la Loi sur la libération conditionnelle et la Loi sur les pénitenciers. Elle a fourni un cadre complet pour les politiques relatives au système correctionnel et à la mise en liberté sous condition, pour la formation et pour le fonctionnement.

Au cours de 1998, la LSCMLC fera l'objet d'un examen par un comité parlementaire. On prévoit que cet examen, et la réponse gouvernementale, façonneront les services correctionnels et la mise en liberté sous condition alors que le Canada entrera dans le nouveau millénaire.

La mise en liberté sous condition au cours des 20 dernières années

Au cours des 20 dernières années, la mise en liberté sous condition a joué un rôle important dans le système correctionnel fédéral. Chaque année, 4 délinquants sous responsabilité fédérale sur 10 (37 ­ 44 %) ont purgé leur peine dans la collectivité. Ils étaient soit en liberté conditionnelle ou en liberté surveillée, devenue la libération d'office. La LSCMLC a remplacé la liberté surveillée, qui était une mise en liberté dans la collectivité basée sur la remise de la peine pour bonne conduite en établissement, par la libération d'office, qui est une mise en liberté dans la collectivité exigée par la Loi après que le délinquant ait purgé les deux tiers de sa peine.

Un examen plus approfondi des libérés conditionnels révèle que chaque année, environ 7 délinquants sur 10 (66 ­ 75 %) sous surveillance sont dans la collectivité en liberté conditionnelle, parmi lesquels la moitié environ est en libération conditionnelle totale. Le restant, soit 3 délinquants sur 10, étaient en liberté surveillée ou en libération d'office.

Alors que la libération d'office est basée sur la proportion de la peine purgée, la libération conditionnelle est basée selon l'examen du cas et l'évaluation du risque par la Commission nationale des libérations conditionnelles. Il y a deux régimes de libération conditionnelle :

  • La semi-liberté qui vise à préparer les délinquants à la libération conditionnelle totale ou à la libération d'office et dans le cadre duquel les délinquants réintègrent chaque soir la maison de transition ou le pénitencier.
  • La libération conditionnelle totale qui permet aux délinquants de travailler et de vivre dans la collectivité. Les délinquants peuvent purger jusqu'à deux tiers de leur peine sous surveillance dans la collectivité.

Au cours des 20 dernières années, la Commission a octroyé la semi-liberté à 6 ou 7 cas de semi-liberté sur 10 (58 ­ 71 %). En comparaison, la Commission a octroyé la libération conditionnelle totale à environ 3 ou 4 cas sur 10 (30 ­ 42 %).

En 1992­1993, la LSCMLC a introduit la procédure d'examen expéditif de la libération conditionnelle (PEE). On doit ordonner dorénavant la libération conditionnelle totale aux détenus non violents sous responsabilité fédérale qui en sont à leur première peine d'emprisonnement si la Commission détermine qu'ils ne risquent pas de commettre une infraction avec violence avant la fin de leur peine. Les taux d'octroi de mises en liberté pour les cas de PEE ont été beaucoup plus élevés (80 ­ 89 %) que les taux d'octroi pour les cas réguliers de libération conditionnelle totale (19 ­27 %).

Efficacité de la libération conditionnelle

Les tendances relatives à la mise en liberté sous condition démontrent que la libération conditionnelle et la libération d'office sont d'importantes stratégies pour la gestion de la population carcérale sous responsabilité fédérale. Environ 40% de la population carcérale se retrouve annuellement sous surveillance dans la collectivité, ce qui a visiblement un effet sur les besoins d'hébergement et sur les coûts.

Cependant, pour la Commission, l'efficacité de la mise en liberté sous condition est mesurée en fonction de sa contribution à la sécurité publique. En fait, la mise en liberté sous condition est basée selon la théorie qu'une mise en liberté graduelle des détenus accroît la sécurité de la collectivité. Les données sur les résultats de la mise en liberté sous condition semblent valider cette théorie.

La Commission évalue l'efficacité de la mise en liberté sous condition avec trois indicateurs. Le premier est le taux de réussite qui comprend :

  • une période de mise en liberté sous surveillance pour laquelle le délinquant est demeuré dans la collectivité pour toute la durée -- pour la libération conditionnelle totale et la libération d'office, la période de surveillance se termine à l'expiration du mandat;
  • les révocations pour l'inobservation des conditions de la mise en liberté (le plus souvent des violations techniques); ces révocations sont considérées comme des interventions positives pour réduire le risque dans la collectivité en empêchant d'autres activités criminelles.

Toute mise en liberté sous condition qui se termine par une révocation en raison d'une nouvelle infraction (récidive) est définie comme étant un échec.

Le deuxième indicateur est le nombre d'accusations pour des infractions graves perpétrées par les délinquants en liberté dans la collectivité, selon le régime de mise en liberté, dans huit catégories d'infractions qui mettent l'accent sur les agressions :

  • meurtre;
  • tentative de meurtre;
  • agression sexuelle;
  • voies de fait graves;
  • prise d'otage;
  • séquestration;
  • vol qualifié;
  • incidents sensationnels comme l'incendie volontaire.

Le troisième indicateur est la récidive liée à des infractions à une loi fédérale après l'expiration du mandat. Les facteurs qui influencent le comportement du délinquant après l'expiration du mandat vont au-delà de la capacité de gestion de la Commission. Néanmoins, la Commission suit ce type de récidive comme un indicateur d'efficacité à long terme.

Taux de réussite de la mise en liberté sous condition

Les données pour la période allant de 1992­1993 à 1996­1997 indiquent que les taux de réussite étaient élevés pour tous les régimes de mise en liberté. Cependant, il y avait des différences notables entre les différents régimes.

Les taux de réussite pour la semi-liberté (voir le Graphique 1) étaient plus élevés que ceux pour la libération conditionnelle totale ou pour la libération d'office. De fait, le taux de réussite de la semi-liberté est passé de 92 % à 96 %, y compris une augmentation de 17 % de la proportion de délinquants ayant terminé leur semi-liberté sans réintégrer un établissement et une diminution de 13 % de la proportion de délinquants dont la semi-liberté a été révoquée pour inobservation des conditions (par ex., s'abstenir des substances intoxicantes). Le taux annuel de récidive pour les délinquants en semi-liberté a baissé pour passer de 8 % à 4 %; le taux de récidive non violente est passé de 6 % à 3 % et le taux de récidive avec violence est passé de 2 % à 1 %.

Graphique 1

Les taux de réussite pour la libération conditionnelle totale régulière (87 % à 92 %) se rapprochent de ceux de la semi-liberté (voir le Graphique 2). Les taux se situaient entre 62 et 73 %, avec des taux plus élevés en 1995­1996 et 1996­1997. Les taux de révocation pour inobservation des conditions varient de 17 à 24 %. Les taux de récidive pour la libération conditionnelle totale régulière ont baissé, pour passer de 13 % à 8 % durant la période à l'examen. Quant aux taux de récidive non violente, ils ont chuté de 11 % à 6 % et les taux de récidive avec violence sont demeurés stables à 2 %.

Graphique 2

La PEE est entrée en vigueur en 1992­1993. Par conséquent, les renseignements sur les taux de réussite pour ce régime de mise en liberté pour les années 1992­1993 et 1993­1994 doivent être pris avec circonspection vu que ce programme était en phase d'essai. Toutefois, au cours des années suivantes, la PEE est devenue un programme à part entière.

Au cours des dernières années, les taux de réussite pour la PEE se sont améliorés (85 % en 1996­1997). Toutefois, ils sont moins élevés que ceux de la semi-liberté ou de la libération conditionnelle totale régulière (voir le Graphique 3). Les taux d'achèvement de la PEE (56 %) étaient plus faibles que ceux pour la libération conditionnelle totale régulière (72%), alors que les taux pour l'inobservation des conditions sont demeurés élevés (29 % comparativement à 20 %). Les taux de récidive pour la PEE sont également demeurés plus élevés (15 %), mais ils se sont améliorés. La récidive pour les cas de PEE impliquait surtout des infractions sans violence. Le taux de récidive avec violence est resté à 1 % pour les deux dernières années.

Graphique 3

Les taux de réussite pour la libération d'office se situent entre 82 et 89 % (voir le Graphique 4). Ils sont plus faibles que les taux de la semi-liberté ou de la libération conditionnelle totale régulière. Par contre, ils sont semblables aux taux d'achèvement et aux taux de révocation pour l'inobservation des conditions des cas de PEE. Au cours des cinq dernières années, les taux de récidive pour les délinquants en libération d'office ont décliné (de 18 % à 13 %), mais ils sont demeurés plus élevé que les taux pour la semi-liberté ou la libération conditionnelle totale régulière.

Graphique 4

Tableau 1

Accusations pour Infractions graves
Infractions
1992-1993
1993-1994
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
Meutre
21
17
16
15
10
9
Tentative de meutre
17
9
13
15
7
9
Agression sexuelle
43
43
49
22
31
23
Voie de fait
34
27
25
21
28
34
Prise d'otage
1
4
5
3
1
1
Séquestration
19
9
3
5
4
6
Vol Qualifié
88
102
113
71
90
79
Autres incidents
sensationnels
3
29
32
13
24
27
Total
226
240
256
165
195
188

Accusations pour infractions graves

Les données sur la réussite indiquent que le taux de récidive avec violence a décliné pour tous les régimes de mise en liberté. L'analyse des accusations pour infractions graves renforce ces constatations.

De 1992­1993 à 1994­1995, le nombre d'accusations pour infractions graves est passé de 226 à 256, soit une hausse de 13 %. En 1995­1996, ces accusations ont chuté à 165, soit une baisse de 36 % ou encore 91 accusations de moins qu'en 1994­1995. Le nombre d'accusations pour infractions graves s'est élevé à 195 en 1996­1997, soit une hausse de 18 %, pour ensuite tomber à 188 en 1997­1998.

Lorsque l'on examine les accusations selon le régime de mise en liberté, le nombre d'accusations pour infractions graves commises par des délinquants en semi-liberté a fortement diminué; de 73 accusations en 1992­1993, il est passé à 12 en 1996­1997 (une chute de 84 %), puis il s'est élevé à 26 en 1997­1998 (voir le Tableau 2). De 1995 à 1998 le nombre d'accusations portées contre les délinquants en liberté conditionnelle totale a fluctué mais est demeuré bien en dessous des niveaux de 1992­1993 et de 1994­1995. Le nombre d'accusations portées contre les délinquants en liberté d'office a considérablement augmenté, avec les totaux les plus élevés en 1996­1997 (133) et 1997­1998 (125). Durant la période à l'examen, les délinquants en liberté d'office étaient impliqués dans plus de 50 % de toutes les accusations pour infractions graves. En comparaison, 20 % des accusations étaient portées contre les délinquants en semi-liberté et 26 % contre les délinquants en liberté conditionnelle totale.

Tableau 2

Accusations pour infractions graves selon le régime de mise en liberté
Régime de mise
en liberté
1992-1993
1993-1994
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
Semi-liberté
73
68
64
15
12
26
Lib. cond. totale
55
79
69
43
50
37
Libération d'office
98
93
123
107
133
125
Total
226
240
256
165
195
188

Toutefois, le nombre d'accusations est seulement une partie du tableau. Le taux des accusations pour infractions graves par 1 000 délinquants dans la collectivité, selon le régime de mise en liberté, offre aussi un indicateur significatif (voir le Graphique 5).

Graphique 5

Le taux annuel des accusations pour infractions graves par 1 000 délinquants en liberté d'office (LO) se situait entre 45 et 62. Le taux pour les délinquants en liberté conditionnelle totale (LCT) se situait entre 9 et 15. C'est-à-dire que les délinquants en liberté d'office étaient quatre à cinq fois plus susceptibles d'être accusés pour une infraction grave que les délinquants en liberté conditionnelle totale. Avant 1995­1996, les taux d'accusation par 1 000 délinquants en semi-liberté (37 à 48) se rapprochaient de ceux des délinquants en liberté d'office. Toutefois, à partir de 1995­1996, les taux pour les délinquants en semi-liberté (SL) ont fortement chuté comparativement aux taux pour les délinquants en liberté d'office.

Graphique 6

Récidive après l'expiration du mandat

Les données sur la récidive après l'expiration du mandat pour les délinquants sous responsabilité fédérale indiquent que les délinquants en liberté d'office qui atteignent la date d'expiration du mandat sont trois à quatre fois plus susceptibles d'être réincarcérés dans un établissement fédéral que les délinquants en liberté conditionnelle totale qui ont purgé toute leur peine. Les calculs sont basés sur le statut, en date du 31 mars 1997, des délinquants qui ont été mis annuellement en liberté d'office ou en liberté conditionnelle totale de 1986­1987 à 1996­1997. Comme on s'y attendait avec cette méthode de calcul, les taux de récidive sont plus élevés pour le groupe de délinquants qui étaient dans la collectivité pour une plus longue période, peu importe la forme de leur mise en liberté.

Ces données semblent appuyer deux conclusions principales. Premièrement, la mise en liberté sous condition est un aspect important des stratégies de gestion de la population carcérale sous responsabilité fédérale et du contrôle du coût. Deuxièmement, la mise en liberté sous condition se préoccupe de la sécurité du public, particulièrement dans les situations où le Service prépare le cas et la Commission nationale des libérations conditionnelles évalue le risque concernant la décision qui permet au détenu d'être en liberté conditionnelle.


1. 340, avenue Laurier ouest, Ottawa (Ontario) K1A 0P9.